La place des Antilles et la place de l'île de La Réunion, de la guillotine aux manifestations parisiennes

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Cette semaine, La1ere consacre une série d'articles aux rues ultramarines de Paris. Symétriques, les places des Antilles et de l'île de La Réunion ont accueilli la guillotine à la Révolution française. Aujourd'hui, c'est le point de départ des manifestations.
L'immense place de la Nation fait de l'ombre à ses voisines. Aux abords de ce gigantesque carrefour de la circulation de l'Est parisien, lorsque l'on questionne les passants sur l'existence de la Place des Antilles, peu sont ceux qui savent la situer. Certains la voient dans le 20e arrondissement, d'autres en dehors de la capitale. Sa sœur jumelle, la place de l'île de La Réunion, n'est pas plus connue des badauds. Un homme parvient à se souvenir : "ce n'est pas loin, une sortie de la ligne 9 du métro s'appelle Nation-Place des Antilles".
 
De fait, la Place des Antilles se situe bien ici, au pied de la colonne du Trône Nord et du grand pavillon de Saint-Louis. En face, de l'autre côté de l'avenue du Trône, on trouve la place de l'île-de-la-Réunion avec sa colonne du Trône Sud et son pavillon Philippe-Auguste, monuments identiques classés au patrimoine national depuis le 24 avril 1907. La première marque le début du 11e arrondissement, l'autre l'entrée dans le 12e.

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C'est le 27 mai 1986 que les deux places prennent leur dénomination actuelle, en hommage aux îles françaises des Caraïbes et à La Réunion, à l'époque seul département d'outre-mer à ne pas avoir de rue à son nom.
 

Barrière de péage et place de la guillotine

L'histoire des deux places remonte au XVIIe siècle, lorsqu'est percée l'avenue du Trône en honneur au retour de Louis XIV et Marie-Thérèse d'Autriche après leur mariage. Un siècle plus tard, la place se trouve sur le tracé du mur des Fermiers généraux, une enceinte de Paris. La barrière du Trône est édifiée juste avant la Révolution et encadrée par les deux colonnes de 28 mètres de haut que l'on observe encore aujourd'hui. C'est ici que Paris percevait l'octroi, une taxe sur les marchandises qui entraient dans la ville et qui concernait notamment le vin, l'huile ou le sucre, apprend-on dans le Dictionnaire historique des rues de Paris de Jacques Hillairet, publié en 1960. Les deux pavillons abritaient les bureaux et les logements du personnel administratif.

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"Ici/à la barrière du Trône/l'échafaud fut installé/du 13 juin au 8 juillet 1794". Telle est l'inscription que l'on découvre sur une plaque apposée contre le pavillon Philippe-Auguste de la place de l'île-de-la-Réunion. Pendant la Terreur, période sanglante de la Révolution française, la guillotine installée à proximité tranchait les têtes des opposants au nouveau régime.
 

Point de départ des manifestations

Aujourd'hui, les deux places, îlots solitaires perdus dans le brouhaha de Nation, sont retombées dans l'anonymat. Les arbres plantés ça et là côtoient des sans-abris avinés dormant sur les bancs et les pavillons abritent des logements sociaux.
 
Il reste toutefois un héritage de ce glorieux passé royal et révolutionnaire. La place de la Nation et ses deux voisines servent de point de départ traditionnel à de nombreuses manifestations parisiennes.