La ministre des Outre-mer a officiellement installé la commission des Enfants de la Creuse. Cette instance présidée par le sociologue Philippe Vitale devra faire la lumière sur l’histoire de ces enfants exilés de La Réunion entre 1963 et 1982. Pour l’instant pas question de réparations.
Les Réunionnais de la Creuse ne renoncent pas. Ils étaient une quinzaine ce jeudi à venir observer les premiers pas d’une commission dont ils ont souhaité la création il y a deux ans. Parmi eux, Marie-Josée Virapin, elle est optimiste : "cette commission va nous permettre de faire la lumière sur cette histoire dramatique. On va pouvoir enfin récupérer nos dossiers bloqués". C’est l’objectif de cette instance composée de cinq membres.
La commission des Enfants de la Creuse devra établir un tableau précis des enfants concernés et de leur situation démographique actuelle. Dans cette mission, Philippe Vitale est entouré de deux historiens réunionnais Prosper Eve et Gilles Gauvin. Ce dernier a fait sa thèse sur Michel Debré à La Réunion, l’homme par qui tout est arrivé. Wilfried Bertile, géographe et Michel Verneray, ex-fonctionnaire de l’IGAS nommé par la ministre des Outre-mer viennent compléter ce quintette.
Lors de sa présentation George Pau-Langevin a précisé les objectifs de cette commission dont la durée de travail a été fixée à deux ans. Il s’agit d’approfondir la connaissance historique sur les enfants de la Creuse et de contribuer à sa diffusion. A ce propos Philippe Vitale estime que cette "affaire d’Etat doit être connu de tous" et doit figurer dans les manuels d’histoire.
Un site internet pour les Réunionnais de la Creuse
Mais le travail de la commission ne s’arrête pas là. Elle doit parvenir à établir les décisions et les actes qui ont permis le transfert des 1615 enfants et adolescents réunionnais vers l’hexagone. Pour cela, la commission devra être à l’écoute des associations. Un site officiel devrait rapidement voir le jour sur internet où les enfants réunionnais de la creuse et leurs familles pourront poster des messages.
A la recherche des ses oncles et tantes
Magalie Savrimoutou, 30 ans est à la recherche de trois de ses oncles et tantes disparus en 1966. "Ma grand-mère de 78 ans voudrait les retrouver. A l’époque en 1966, sa boutique a été rasée en raison de la construction d’un HLM, explique à La1ere.fr la jeune femme. Elle s’est retrouvée seule, sans rien, avec six enfants. Elle a placé les trois derniers en septembre 1966. Ensuite, elle n’a jamais plus eu de nouvelles d’eux. A notre demande, poursuit Magalie Savrimoutou, Le conseil régional de la Réunion a mené des recherches. Ils ont retrouvé les dossiers, mais ils ne veulent pas nous en donner l’accès". La jeune femme fonde beaucoup d’espoir dans le travail de la commission.
De son côté Jean-Charles Pitou de l'association Génération brisée espère que l’image des Réunionnais de la Creuse changera. "A La Réunion, on a l’impression qu’on les dérange. J’ai écrit à Bras-Panon, à Saint Benoit pour demander des aides pour loger des Réunionnais de la Creuse de passage. Je n’ai reçu aucune réponse. Quant à moi et ma sœur, c'est bien simple, nous avons été tout simplement déshérités. Des terres familiales se sont vendues sans nos avis".
Sur la question des réparations, George Pau-Langevin ne s’est pas trop appesantie. "La commission fera un bilan de la situation (…) A ce moment-là, nous verrons ce qui est possible, envisageable et fondé", sans préciser de délai. Philippe Vitale a semblé un peu plus ouvert à cette question affirmant : "nous ne nous interdisons rien".
Et pourtant, il y a une forte attente de la part des associations. Jean-Philippe Jean-Marie de Rasinn Anlèr : "je suis déçue que les Réunionnais de la Creuse n’aient pas obtenu de billets d’avion pour pouvoir connaître leurs racines. Cela aurait du être fait dès le début". Marie-Josée Virapin de Génération brisée ajoute : "moi, j’ai 60 ans, cette argent (NDLR s’il y a des réparations) on ne va pas en profiter. Je me bats pour mon fils. On a beaucoup fait souffrir nos propres enfants avec toute cette histoire". De son côté, Valérie Andanson de la Fédération des enfants déracinés des DROM se veut optimiste : "on ne peut pas mettre la charrue avant les boeufs", lance-t-elle à La1ere.fr.