L'affaire avait catalysé le mouvement #BlackLivesMatter dénonçant les violences policières contre les Noirs: cinq ans après, le chef de la police new-yorkaise a annoncé le renvoi du policier accusé d'avoir asphyxié un homme non armé qui résistait aux injonctions de la police.
L'histoire, qui suscita de nombreuses manifestations et déchaîna les passions, remonte au 17 juillet 2014 : Eric Garner, 43 ans, père de six enfants, avait été violemment plaqué au sol par des policiers qui le soupçonnaient de vendre illégalement des cigarettes dans un quartier de Staten Island. Obèse et asthmatique, M. Garner, qui refusait d'être interpellé mais n'était pas armé, avait perdu connaissance alors que cinq hommes s'employaient à le menotter, avant de décéder.
Daniel Pantaleo, l'agent de police qui avait utilisé une technique d'étranglement pour appréhender Eric Gardner, et qui a causé sa mort, a été renvoyé de la police de New York. pic.twitter.com/XZYvsy5saV
Les images de l'interpellation, filmées par un ami, avaient fait le tour du monde : on y entend Eric Garner répéter à maintes reprises, "Je ne peux pas respirer" ("I can't breathe"). Malgré les manifestations que la mort avait suscitées, le policier Daniel Pantaleo avait gardé son emploi, mais était cantonné à des tâches administratives. Il avait été récemment suspendu dans l'attente de la décision de M. O'Neill.
Pressions
Son licenciement semblait cependant la seule option depuis la recommandation de la juge début août. De puissantes associations de défense des droits civiques, dont celle du célèbre révérend Al Sharpton, avaient appelé le chef de la police à s'y conformer. Le sujet était aussi devenu très sensible pour le maire démocrate de New York, Bill de Blasio. Candidat à la présidentielle 2020, qui se positionne comme un grand défenseur des minorités et ne cesse de citer son bilan en matière de criminalité à New York parmi ses points forts.
Five years ago, we watched an unarmed man die. So many asked: what if he was my son? What if he was my brother? What if he was my father? What if he was me?
Eric Garner was a father, a brother, a son. And he should be here with us today.
M. O'Neill, qui a servi quelque 30 ans comme policier avant d'être promu à la tête de la police new-yorkaise, a lui anticipé que sa décision déclencherait la colère parmi les policiers new-yorkais. "Si j'étais encore policier aujourd'hui, je serais probablement furieux contre moi", a-t-il déclaré, faisant valoir que les policiers exerçaient "l'un des métiers les plus difficiles au monde" et devaient prendre des décisions difficiles "en un instant".
Mais "c'est ma responsabilité de protéger la ville comme les policiers new-yorkais", s'est-il justifié. Un syndicat de policiers, the Police Benevolent Association, l'a immédiatement accusé d'avoir, par cette décision, "privilégié la politique et ses propres intérêts plutôt que ceux des policiers qu'il prétend diriger".
#BlackLivesMatter
Dans un avis de 46 pages, dont des extraits ont été publiés par les médias américains dimanche, la juge qui a présidé au procès administratif avait estimé que le policier Daniel Pantaleo avait fourni, lors d'une enquête interne sur les circonstances de la mort d'Eric Garner, des explications "non plausibles et mensongères". Elle avait aussi jugé "non fiables" les témoignages des autres policiers interrogés sur cet incident.
Si le mouvement #BlackLivesMatter est moins fort aujourd'hui, les polémiques sur les violences policières contre des Noirs reviennent régulièrement. En janvier 2019, un policier blanc de Chicago, reconnu coupable du meurtre, quatre ans plus tôt, d'un adolescent sur lequel il avait tiré 16 fois, a été condamné à près de sept ans de prison.
La condamnation, relativement clémente, a choqué une partie de la ville, et le maire démocrate Rahm Emanuel a décidé de ne pas se représenter, après avoir été critiqué pour avoir tardé à diffuser la vidéo de la fusillade.