À Saint-Malo, ambiance "morose" après le faux départ de la Route du Rhum

Démontage du village de la Route du Rhum à Saint-Malo, avec cette fois, les bateaux encore à quai.
Avec le report du départ de la 12e Route du Rhum, la ville de Saint-Malo n'en a pas tout à fait fini avec la course. Si le village est fermé et en cours de démontage, les bateaux restent à quai dans une ambiance particulière et inédite, entre morosité et calme apprécié par les skippers.

Les camions et transpalettes ont remplacé les visiteurs et les vendeurs sur les quais de Saint-Malo. Une scène habituelle, au lendemain de la fermeture du village de course, à un détail près : cette fois, la quasi-totalité des bateaux engagés dans la course est encore à quai. Le report du départ de la course, inédit dans l'histoire de la Route du Rhum, a bousculé tout le monde, à commencer par les skippers.

Tous s'étaient mis dans une bulle de concentration, prêts à prendre le départ dimanche 6 novembre à 13h02 comme prévu, même si cela impliquait pour certains d'aller ensuite se mettre à l'abri dans un port. "Ça casse un peu le rythme", nous confiait le Guadeloupéen d'adoption Thibaut Vauchel-Camus (Solidaires en Peloton) lors de l'annonce du report. Lui a profité de ce rab malouin pour profiter de sa famille, installée tout près de la ligne de départ. 

"C'est un peu morose"

Dimanche, alors que le soleil était petit à petit chassé par le vent qui se levait au large, ils ont pu profiter comme les autres skippers d'un peu de repos bien mérité. "Je me suis enfermé deux jours et j'en ai profité pour me requinquer", explique ce lundi matin Kéni Piperol sur les pontons de Saint-Malo, enrhumé et fatigué par 10 jours de sollicitations permanentes. Mais le jeune skipper le reconnaît, il a "envie d'y aller" maintenant. "Ça fait un moment qu'on est à Saint-Malo avec un village qui commence à être démonté, c'est un peu morose tout ça. On a envie d'être sur l'Atlantique et de rejoindre la Guadeloupe."

L'objectif désormais est de "rerentrer dans sa bulle", en attendant les précisions de l'organisation. Daniel Ecalard, qui vogue aux couleurs de la Martinique, avait sorti son bateau du bassin samedi matin pour se placer au large de Dinard, en attendant le départ. Il a dû faire la manœuvre inverse, alors qu'il comptait profiter de cette sortie pour aller tester sa nouvelle voile. "On attend maintenant les informations pour la suite", confirme-t-il, alors qu'il profite de cette pause pour terminer quelques réglages sur son monocoque. "J'espère pouvoir aller naviguer un peu cet après-midi ou mardi."

En attendant, les rares touristes encore présents dans la ville en cette rentrée et les Malouins revenus dans leur cité, savourent de pouvoir circuler dans le calme. "Je ne sais pas si j'ai le droit d'être ici mais j'en profite", glousse une riveraine qui s'est glissée sur les quais au milieu des camions. Comme elle, quelques personnes se baladent au bord des pontons, où les contrôles sont moins nombreux, pour admirer de près les bateaux.

L'ambiance dimanche à la fermeture du Pavillon Guadeloupe, par Hodane Hagi Ali : 

Les bénévoles toujours sur le pont

Si le village a fermé ses portes et que l'afflux de visiteurs a fortement diminué, il faut néanmoins encore s'occuper des 138 skippers toujours présents. Sorties des écluses, accompagnement aux bouées, gestion de la ligne de départ, mais aussi la présence des curieux sur la pointe du Grouin et au Cap Fréhel... il reste encore beaucoup de travail. Tout cela est majoritairement géré par les 400 bénévoles de la Société nautique de la baie de Saint-Malo (SNBSM), qui sont payés "en considération", rappelle Jean-Claude Bazin, l'un des "cinq doigts de la main" à la tête des équipes volontaires. 

"Un mail a été envoyé à tous pour savoir qui pourrait rester, on a eu 70 réponses", raconte-t-il. "Ils sont un peu mobilisés sur le village qui est en train d'être démonté, mais c'est surtout sur le nautique" pour la sortie des écluses. Avec Bernard Lhomer, Maurice Gromil, Jean-François Tilly et Claude Desnos, il a aussi dû s'organiser rapidement. "C'est un peu comme la météo, il faut improviser", explique, malicieux, celui qui en est à sa septième Route du Rhum en tant que bénévole. "Celle-ci est forte, et elle se termine de manière originale, pas habituelle". Pas question pour autant de se laisser abattre. "C'est et ça restera grisant !"