Mettre le clignotant. Ou "pouce" comme disent parfois les enfants. Voilà ce qu'a fait Alexie en 2022. La championne du javelot avait besoin d'une pause. Afin d'aider son corps à digérer. Son mental à se régénérer. En conséquence, la Guyanaise est devenue spectatrice. Oups. Pardon. Supportrice. "L'an passé, j'ai suivi mon compagnon Pierce sur toutes les courses cyclistes auxquelles il a participé. Notamment le Tour de Guyane. C'était extraordinaire de pouvoir l'encourager. Que de souffrance sous le soleil et si longtemps sur un vélo. Chapeau !" Et qu'en a pensé Pierce Ponet, 30e au classement final ? "Je crois qu'il a apprécié ma présence. Il m'a juste dit : maintenant, c'est à ton tour !"
Comme un long trou noir
"Je me suis blessée à 26 ans. Aujourd'hui, je vais sur mes 29..." Amer constat. Comme si la période qui venait de s'écouler pour Alexie Alaïs ressemblait à un très long tunnel. Répétitif. Opération, rééducation, entraînement, opération, rééducation, entraînement. "Aujourd'hui, je n'ai plus de douleurs." Vraiment ? "Comme je n'ai plus de cartilage sur mon genou gauche, j'ai de l'arthrose et ça oui, c'est douloureux. Mais je m'adapte." C'est-à-dire ? "Après chaque entraînement, je dois glacer mon genou, puis le masser. En résumé, j'apprends à combattre différemment."
En 2023, la Guyanaise doit donc adapter sa technique de lancer. La faute à un corps meurtri. "Je n'ai toujours pas une flexion complète du genou." Un genou moins souple et une vitesse qui laisse encore à désirer. "Avant, je courrais très vite. Ce qui est important pour bien lancer. Je cherche à retrouver cette vitesse." Sans oublier toutes les appréhensions logiques. "Mon genou gauche est équipé d'une grosse attelle articulée. Ça me sécurise mentalement. Tout en constituant une contrainte supplémentaire."
La guerrière se réorganise
Pour sortir de ce trou noir, Alexie a accepté de revoir technique et… méthode d'entraînement. "J'aurais eu l'impression de stagner sinon." La championne de France de javelot 2018, 2019 et 2020 est partie retrouver Cédric Djerbir qui l'entraînait déjà en 2011. "Cédric est installé à Bordeaux. Je le rejoins tous les deux mois pour un cycle de travail de quinze jours. Un gros stage intensif." Le reste du temps, la Guyanaise s'entraîne seule. Chez elle. En Guyane. "Je garde un contact quotidien en visio avec Cédric. Il fait un retour technique de mes séances. Ça se passe très bien."
En ce début d'année 2023, le nouveau et à la fois ex-coach de la lanceuse se déclare confiant. "Cédric est ravi des résultats de nos séances. Il faut dire qu'il me connaît très bien." Bizarrement et pour la première fois, la grande guerrière guyanaise souffre d'un excès de doutes. "Je sais que ça vous surprend. Mais j'ai besoin de retrouver la confiance. C'est d'ailleurs tout ce qu'il faut me souhaiter pour la nouvelle année. Selon Cédric, il suffira d'un simple déclic. Alors… je lui fais confiance !"
L'année du retour
Ce simple déclic pourrait intervenir dans les prochains jours. Car Alexie Alaïs compte bien être à Salon-de-Provence, les 25 et 26 février pour les championnats de France Hivernaux de lancers. Petite précision : pour y participer, il faut être qualifié. "Pour cela, j'ai deux compétitions en Guyane, les 21 et 28 janvier. Je stresse pas mal. Alors que je n'ai besoin que d'un seul jet. Pour me débloquer. Me relancer. Me prouver à moi-même que je peux encore lancer en mode guerrière."
Se relancer. Puis dérouler. Jusqu'à l'objectif. De toute sa vie. Les Jeux Olympiques de Paris 2024. "C'est pour les JO que je me force à revenir. Ça prendra le temps que ça prendra mais j'y arriverai." L'été dernier, la Guyanaise a suivi les championnats du monde d'athlétisme qui se déroulaient à Eugene aux États-Unis. Pas de pincement au cœur de ne pas y être. Juste un grand plaisir devant les différents exploits. Et une certitude chez Alexie. "Si les filles sont capables de le faire, alors moi aussi." Si ce n'est pas déjà un peu de la confiance retrouvée, alors qu'est-ce que c'est... ?