Archives d'Outre-mer - 12 septembre 1928, la Guadeloupe dévastée par un cyclone

Pointe-à-Pitre après le cyclone de 1928
Le 12 septembre 1928, la Guadeloupe est frappée par le plus violent cyclone de son histoire. Le bilan humain est effroyable, estimé à près de 2.000 morts. Après son passage, l'île ne sera plus jamais la même notamment avec une reconstruction des bâtiments en béton par l'architecte Ali Tur.

Le cyclone de septembre 1928 constitue avec Irma, Hugo et José les principaux ouragans qui ont touché les Antilles depuis le début du XXe siècle. 

L'ouragan Okeechobee est surnommé "le cyclone de 28". C’est l’un des premiers ouragans à être classé en catégorie 5, le plus haut grade de l’échelle Saffir-Simpson. Les vents dépassent les 230 km/h par endroit et le niveau de la mer s’élève de plusieurs mètres. Le bilan estimé est de près de 2.000 morts. Ce cyclone d'une violence extrême a laissé des traces dans les esprits de tous  les Guadeloupéens de cette génération. 

Récit de la catastrophe

Ce 12 septembre 1928, la population est inquiète. Depuis la veille, la mer est houleuse, le ciel est brumeux, il y a des rafales de vent. Dans la matinée, les autorités de la Guadeloupe reçoivent un câble de Porto Rico : un cyclone dévastateur se dirigerait droit sur l'île.

La panique monte. Avec les moyens de communication de l’époque, le gouverneur informe un maximum de personnes sur l’île dans le peu de temps qui lui est imparti. Les habitants tentent de se protéger en consolidant à la va-vite les portes et fenêtres des bâtiments. Mais il est déjà trop tard.

Les îlets de Petit Cul-de-Sac sont submergés par quatre mètres d'eau et sur la centaine d'habitants qu'ils comptent, seule une trentaine sont miraculeusement sauvés par deux gabarres à la dérive. Au Gosier, toutes les maisons sont détruites. Des pièces de fer pesant 150 kg de la sucrerie Darbousier sont arrachées et retrouvées à plus de 50 mètres.

Pointe-à-Pitre est presque complètement détruite. Les rues de la ville ne sont plus qu’un amas de pierres, de briques, de branches d'arbres, de feuilles, de tôle, d'ardoises, de tuiles, de fils télégraphiques, de bois, de poutres. Des barges de la darse sont transportées par la marée de tempête et la force du vent jusqu'à l'emplacement de l'actuel kiosque à musique de la place de la Victoire.

Le centre du cyclone est passé exactement sur l'île.

La Grande Terre particulièrement touchée, Pointe-à-Pitre en ruine

Le lendemain matin l’île se réveille et observe les ravages provoqués par ce phénomène. Pointe-à-Pitre, comme de nombreuses autres villes et bourgs de la Guadeloupe est ravagée. Le centre du Lamentin n’existe plus, tout comme le bourg de Morne-à-l’Eau. La quasi-totalité des structures publiques ont disparues et que dire de l’habitat populaire encore largement composé de cases en bois et tôles dont il ne reste plus grand chose.

L'aspect général de l'île est celui d'une zone bombardée.  

Les rues de Pointe-à-Pitre après la Catastrophe

Les pertes humaines sont très lourdes, même s'il est difficile d'évaluer le nombre exact de tués, il se situe entre 1500 et 2000 morts.

Le déroulé de cette journée avec ce reportage de Guadeloupe la 1ère réalisé par Jacky Massicot datant de 2018  : 

 

Après 1928, l'île change de physionomie 

Tout est à reconstruire, d'autant que la Guadeloupe a déjà validé l’organisation des fêtes du tricentenaire du rattachement de l’île à la France qui doivent accueilllir une délégation gouvernementale en 1935 et par la même occasion prouver l’entrée dans la modernité de la colonie.

Cette reconstruction est confiée à l'architecte du ministère des colonies, Ali Tur (1889-1977). En avril 1929 un contrat est signé entre le gouverneur Tellier et lui, prévoyant la construction ou la reconstruction de divers bâtiments publics (palais de justice, palais du gouverneur, etc.) sur une durée de quatre ans pour un montant total estimé à quarante millions de francs. À ces commandes pour le compte de l’État français et la Colonie de Guadeloupe, s'ajoutent des contrats passés avec les municipalités pour la construction d'hôtels de ville, d'églises ou d’écoles.

De 1929 à 1937, l'architecte construit ou reconstruit plus d'une centaine d'édifices privés et publics. Le béton est préféré aux matériaux traditionnels pour ses qualités de résistance, avec des structures poteaux-poutres aux hourdis d'agglomérés, enduits au mortier de ciment. 

Ali Tur possède un style original, à travers une formation marquée par l'École des Beaux-Arts et par de nombreuses références aux réalisations d'Auguste Perret (architecte français, l'un des premiers techniciens spécialistes du béton armé). Il intègre ici les acquis des expériences sur l'architecture climatique, diffusées lors de l'Exposition coloniale de 1931. 

En 1991, cinq édifices sont protégés à l'occasion d'une campagne thématique sur l'oeuvre de cet architecte en Guadeloupe :
• Hôtel de préfecture, à Basse-Terre
• Palais du conseil général, à Basse-Terre
• Palais de justice de Basse-Terre
• Église Saint-André de Morne-à-l'Eau
• Hôtel de ville de Pointe-Noire

Ville de Basse-Terre, Guadeloupe, France d'Outre-Mer - Préfecture - Par Ali Georges Tur après le cyclone de 1928 - Style Art déco


Ce cyclone a profondément marqué l’histoire et l’architecture de la Guadeloupe.

Regardez ce reportage RFO Guadeloupe de 1991 consacré à Ali Tur lors des journées portes ouvertes aux monuments historiques d'Alain Heudes: