Bleues KO, argent OK : après l'amertume de la défaite en finale du Mondial, place à la suite pour les handballeuses françaises

Etre ou ne pas être heureuses, telle est la question :
Parfois il faut savoir se contenter d’une place de vice… quelque chose. Les coéquipières de Coralie Lassource visaient l’or dans cette finale. Un coup sur la tête pour les vice-championnes du monde de handball, pas complètement heureuses, mais qui sauront rebondir.

Une finale au scénario un peu fou, mais surtout une image à retenir : ce podium où les Bleues sont moins souriantes que les Danoises, pourtant seulement troisièmes de la compétition. Et pour cause, en handball la médaille de bronze est synonyme d'une dernière victoire et l’argent d'une défaite. Même si celle-ci est logique, tant les Norvégiennes ont dominé leur sujet, avec un renversement total de situation dans le match en début de seconde mi-temps

Dur à avaler !

Angélique Spincer notre consultante est restée longtemps dubitative. "Il me fallait digérer", avoue-t-elle après coup.

"Après un match comme celui-là, on essaie toujours de comprendre ce qui s’est passé. Si j’avais la réponse... Je pense que ça peut s’expliquer par plusieurs facteurs : on fait une grosse première mi-temps, on mène 16/12 et la Norvège ne pouvait plus que revenir avec les dents longues pour recoller au score. On connaît leurs qualités. Mais il n'y a pas d’excuses à chercher, la Norvège nous a dominé de la tête et des épaules dans la deuxième mi-temps, le 4/0 d’entrée de jeu nous fait très mal à la tête", continue l'ancienne demi-centre réunionnaise. 

J’ai aussi la sensation que les filles étaient épuisées. A un moment donné, la fatigue se fait plus sentir quand un adversaire remet de la pression et de l’impact, alors tout s’inverse. Mentalement on s’épuise aussi à essayer de comprendre ce qui nous arrive.

Angélique Spincer

Pour Allison Pineau, une des premières à se présenter devant le micro de Manu Roux en zone mixte, la déception prédomine d’abord : "Un titre ? C’est si proche et si loin à la fois. Dans cette finale on fait une super première mi-temps. La Norvège a été très bonne en deuxième, nous on n’a pas été extras à la finition alors qu’on a les opportunités pour revenir dans le match, ça fait partie du jeu. On tombe sur un adversaire qui a su inverser la tendance, et une fois le lead pris, elles n’ont rien lâché. En deuxième mi-temps c’est compliqué. Honnêtement on ne pouvait pas rivaliser pour une médaille d’or en ne marquant que 6 buts."

Allison Pineau a réalisé un sans-faute aux jets de 7 mètres, ça n'a pas suffit

Coralie Lassource, la capitaine, est encore plus déçue. Son rêve de doublé s’est envolé. Elle revient aussi sur cette deuxième période cauchemardesque, où les Françaises ont été battues 17/6 : "En 2e mi-temps on est beaucoup moins bonnes, on perd nos moyens et ça leur a permis de revenir et de repasser devant. On a alors couru après le score, et on n’a pas fait ce qu’il fallait pour repasser devant."

Je n’ai pas forcément de mots, à chaud c’est compliqué de parler après une défaite, on se contentera de cette médaille plus tard mais là c’est dur à avaler.

Coralie Lassource, capitaine de l'équipe de France

Impactées physiquement ?

Le scénario du match s’est vite écrit malgré quelques révoltes individuelles en début de seconde période, avec Coralie Lassource. Et le résultat est lourd, une défaite avec 7 buts d’écart. Les Bleues ont elle lâché physiquement ? Angélique Spincer tente une première analyse, réaliste : "On n’a pas eu la même compétition en termes d’adversité que les Norvégiennes, mais ça n’enlève rien à leur titre qu’elles méritent amplement. A-t-on fait la mi-temps de trop ? Au niveau des ressources énergétiques on était un peu en dessous après avoir joué la Serbie, la Russie, la Suède et le Danemark. Si on cherche des excuses, on s’est plus livrées que la Norvège dans ce tournoi. Mais ça fait partie du jeu, on n’a pas su garder cette rage, cette hargne de la demi-finale. On était un peu essoufflées."

Kari Brattset Dale, la pivot Norvégienne a pesé sur la défense bleue, Béatrice Edwige et Méline Nocandy ont du mal a la stopper.

Autre argument de l’entraîneuse de Plan-de-Cuques, celui de l’essence même du handball, "qui est avant tout un sport collectif, ne l’oublions pas". "Dans ce cas la tendance du moment peut vite s’inverser, la Norvège avait à cœur de se racheter de ses JO. Il y aussi des équipes en face qui travaillent et qui progressent comme nous, il ne manque pas grand-chose, un peu de réussite, un peu de fraîcheur. Ce match on le rejoue dans deux jours la fin peut être différente."

A nous de ne pas baisser la garde et de continuer à travailler fort, on a un staff qui travaille bien avec ses joueuses. On va vite analyser ça pour revenir encore plus fortes.

Angélique Spincer

Propos corroborés par la demi-centre guadeloupéenne Allison Pineau : "On rencontre aussi des adversaires qui sont aussi conquérantes et qui cherchent à nous contrer, nous ne sommes pas invincibles." 

L’avenir ? Plutôt bleu

Dans cette équipe, le raté de la finale ne doit rien remettre en cause. Les Françaises nous ont offert des matchs magnifiques. En terme de handball pur, le quart de finale contre la Suède, et en terme d’émotions la demi-finale contre le Danemark.

Toujours pour Allison, même si la médaille d’argent a un goût un peu amer, il faut relativiser et positiver. "On a un parcours assez exceptionnel, avec une équipe qui a dû trouver un nouvel équilibre entre des anciennes qui sont partie à la retraite après les Jeux et de nouvelles arrivantes. Cette année 2021 a été un bon cru, on n’a pas de quoi rougir de ce qu’on a montré. Dans quelques jours je savourerai cette belle médaille d’argent."

Même la capitaine martiniquaise Coralie Lassource retrouve face aux caméras un coin de ciel bleu. "Demain ou après-demain ça ira mieux, mais en sortant du match c’est compliqué de voir les points positifs de notre année. Et il y en a."

Méline Nocandy au duel face à Veronica Christiansen, sera bientôt appelé à mener le jeu de l'équipe de France

Les Bleues vont enchaîner avec l’Euro 2022, qui se déroulera en Slovénie, en Macédoine et au Monténégro, en novembre prochain. Avec quasiment le même groupe. Et en sport collectif, tout peut aller très vite.

La série positive n’est pas rompue, on est encore en finale, pour la troisième fois de suite, j’espère que la prochaine fois on sera sur la plus haute marche. 

Allison Pineau, demi-centre équipe de France

Et les joueuses d'Outre-mer dans tout ça ?

Orlane Kanor n’a fait que des petits bouts de match, de retour après sa grave blessure qui l'avait privée des JO. Avec Méline Nocandy elles vont perfectionner à Metz leurs automatismes du terrain. Méline sera peut-être appelée à mener le jeu en bleu pour suppléer Grace Zaadi.

Océane Sercien-Ugolin va continuer à accumuler de l’expérience avec son club Slovène de Krim. Quant à Coralie Lassource, elle s’est affirmée comme "une vraie meneuse, sur et en dehors du terrain", selon Angélique Spincer, qui conclut, évoquant les deux cadres de l'équipe : "Ce match va nous servir de tremplin, il y a encore de belles choses à venir. On a une équipe jeune, qui a les crocs, on va relever la tête, les anciennes joueuses comme Allison Pineau et Béatrice Edwige vont continuer jusqu’à 2024 et vouloir rectifier le tir rapidement et accompagner les jeunes. Non je ne me fais pas de soucis pour elles !"