Pour la première fois, la plus haute juridiction française a examiné l'affaire des contrôles d'identité jugés discriminatoires. L'État avait été condamné en juin 2015 pour "faute lourde". La Cour d'appel avait alors donné raison à 5 des 13 plaignants.
L'arrêt de la Cour de cassation confirmera-t-il le jugement de la Cour d'appel de juin 2015 ? Rendue le 9 novembre à 14 heures, la décision pourrait être historique si elle donnait raison aux 13 citoyens. C'est la première fois que la "Cour Suprême de l'ordre judiciaire" se penche sur les "contrôles au faciès".
Après avoir perdu en première instance en octobre 2013, les plaignants avaient interjeté appel, soutenus par le Défenseur des droits. En juin 2015, la Cour d'appel de Paris avait reconnu une violation des droits dans 5 des 13 cas. Elle avait alors estimé que les contrôles d'identité discriminatoires étaient illégaux et que les principes de l'égalité et de non-discrimination s'appliquaient également aux forces de l'ordre. Cinq des 13 hommes avaient obtenu gain de cause et l'État condamné à leur verser 1.500 euros de dommages et intérêts à chacun.
L'État comme les 8 personnes déboutées avaient décidé de porter en dossier en cassation.
De son côté, l'avocate générale Nathalie Ancel a estimé que parmi les 8, trois jugements devaient être cassés. Pour les cinq restants, l'État "a apporté des éléments objectifs motivant le contrôle, comme la dangerosité de la zone". Pas question donc de revenir sur la décision de la Cour d'appel.
Maître Alice Meier, avocate de l'agent judiciaire de l'État a jugé quant à elle que "les règles légales encadrant ces contrôles avaient été parfaitement respectées". Elle a mis en garde les magistrats contre la tentation de "prendre une position de principe": "il ne faut pas que la décision ait pour conséquence de jeter sur tout policier, voire tout représentant de l'État, une suspicion".
Dans cette affaire, "nous sommes face aux carences de l'État", estime Laurence Cohen, sénatrice du Val-de-Marne. "Il est en pleine faillite par rapport aux engagements de François Hollande. Il faut légiférer", martèle-t-elle. Comme de nombreuses associations, elle demande l'établissement d'un récépissé par la police après chaque contrôle.
En 2012, le candidat Hollande assurait dans son 30e engagement de campagne vouloir "lutter contre le délit de faciès". Promesse non-respectée jusqu'à aujourd'hui. Selon une étude menée en 2009 à Paris par Open Justice Initiative, les personnes perçues comme "noires" et "arabes" sont contrôlées respectivement six à huit fois plus que celles perçues comme "blanches".
Une longue bataille judiciaire
Le feuilleton judiciaire a débuté en 2013. Treize jeunes hommes, français d'origines nord-africaine et subsaharienne, âgés de 18 à 35 ans, assignaient l'État en raison des "contrôles au faciès" qu'ils subissaient de la part des forces de l'ordre. Une première.Après avoir perdu en première instance en octobre 2013, les plaignants avaient interjeté appel, soutenus par le Défenseur des droits. En juin 2015, la Cour d'appel de Paris avait reconnu une violation des droits dans 5 des 13 cas. Elle avait alors estimé que les contrôles d'identité discriminatoires étaient illégaux et que les principes de l'égalité et de non-discrimination s'appliquaient également aux forces de l'ordre. Cinq des 13 hommes avaient obtenu gain de cause et l'État condamné à leur verser 1.500 euros de dommages et intérêts à chacun.
L'État comme les 8 personnes déboutées avaient décidé de porter en dossier en cassation.
Vers un allégement de la charge de la preuve ?
À la barre, Maître Thomas Lyon-Caen, au nom de ces 8 personnes, a rappelé que selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, il ne revient pas à la personne qui dénonce une discrimination d'en apporter la preuve complète, mais seulement un "commencement de preuve". Il s'agit ensuite à la partie mise en cause d'apporter des "éléments ou des faits objectifs" prouvant qu'il n'y a pas eu discrimination. Il a demandé à ce que soit allégée la charge de la preuve.De son côté, l'avocate générale Nathalie Ancel a estimé que parmi les 8, trois jugements devaient être cassés. Pour les cinq restants, l'État "a apporté des éléments objectifs motivant le contrôle, comme la dangerosité de la zone". Pas question donc de revenir sur la décision de la Cour d'appel.
Maître Alice Meier, avocate de l'agent judiciaire de l'État a jugé quant à elle que "les règles légales encadrant ces contrôles avaient été parfaitement respectées". Elle a mis en garde les magistrats contre la tentation de "prendre une position de principe": "il ne faut pas que la décision ait pour conséquence de jeter sur tout policier, voire tout représentant de l'État, une suspicion".
Mise en place de récépissés
À l'issue de l'audience, Niane, un des 13 plaignants a confié à La1ere.fr qu'il regrettait qu'il soit "difficile de prouver que vous avez été victime de discrimination. J'espère qu'on reconnaîtra enfin en France qu'il y a des contrôles au faciès et que l'État sera condamné à nouveau". Avis partagé par Régis, contrôlé à la sortie d'un centre commercial à La Défense à Paris. "Depuis 3 ans, rien n'a changé. J'espère que la loi change, qu'il y ait la traçabilité des contrôles. Il faut que tout individu soit contrôlé sans distinction. Il y a un abus de la part des forces de police, surtout qu'il n'y a aucun moyen de suivre ce qu'ils ont fait".Dans cette affaire, "nous sommes face aux carences de l'État", estime Laurence Cohen, sénatrice du Val-de-Marne. "Il est en pleine faillite par rapport aux engagements de François Hollande. Il faut légiférer", martèle-t-elle. Comme de nombreuses associations, elle demande l'établissement d'un récépissé par la police après chaque contrôle.
En 2012, le candidat Hollande assurait dans son 30e engagement de campagne vouloir "lutter contre le délit de faciès". Promesse non-respectée jusqu'à aujourd'hui. Selon une étude menée en 2009 à Paris par Open Justice Initiative, les personnes perçues comme "noires" et "arabes" sont contrôlées respectivement six à huit fois plus que celles perçues comme "blanches".