L'amendement à l’article 71 de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé adoptée en juillet 2019 avait déjà donné le feu vert aux agences régionales de santé pour autoriser la venue de certains médecins, chirurgiens-dentistes ou sages-femmes ayant des diplômes hors Union européenne. Pourtant, en Guadeloupe où la pénurie inquiète, l'ARS n'a jamais mis à profit cette opportunité pour faire venir des médecins cubains.
La solution cubaine sans lendemain en Guadeloupe
Dans une lettre adressée le 8 septembre dernier au préfet de Guadeloupe et à la directrice de l’ARS (Agence régionale de Santé), Gérard Cotellon, le directeur du CHU avait alerté sur la situation préoccupante de l’hôpital et lancé un appel à l'aide, précisant que le système était au bord de la saturation face à l'afflux grandissant de patients Covid.Trois jours plus tard, le 11 septembre, le sénateur de Guadeloupe Dominique Théophile s'est fait son porte-parole auprès du ministre de la Santé, Olivier Véran, pour lui demander d’intervenir dans le dossier des médecins ayant des diplômes hors Union européenne. Malgré ce décret du 31 mars 2020, "aucune mesure n’a encore été prise", regrettait le sénateur, dénonçant une situation "incompréhensible", alors que le CHU est au bord de "la saturation".
J’ai adressé un courrier au ministre des Solidarités et de la Santé concernant la situation du CHU de #Guadeloupe et demandé au Gouvernement d’intervenir dans le dossier des Praticiens à diplôme hors Union Européenne (PADHUE). pic.twitter.com/hK7vsHcHnp
— Dominique Théophile (@SenateurDTheoph) September 11, 2020
Dans une situation d'urgence, comme celle que traverse la Guadeloupe avec la pandémie, le sénateur Théophile précise que, "la solution pour les Antilles-Guyane vient de Cuba, le pays le mieux organisé du monde et le seul en mesure de fournir du personnel médical de par sa réserve de médecins et sa situation géographique". Et le sénateur d'ajouter, "il manque aujourd'hui 12 millions de médecins dans le monde et par conséquent il en manque aussi en France. Dans la situation actuelle, la réserve sanitaire ou le renfort du Service de Santé des Armées sont des missions ponctuelles et déterminées."
L'ARS Guadeloupe sous pression
Pourquoi alors, aucun médecin cubain n'est arrivé en Guadeloupe pour appuyer le personnel de santé fatigué et sous pression avec le coronavirus ? Le sénateur a son explication.L'ARS n'a jamais contacté l'Ambassade de Cuba en France pour faire venir des médecins, car elle est sous pression. Les médecins locaux s'opposent à la présence de médecins cubains en Guadeloupe. Ils craignent qu'ils ne finissent par s'installer définitivement et avance, comme pour se justifier, qu'ils ne connaissent pas notre langue, ni même notre matériel médical.
Cette situation est d'autant plus incompréhensible en Guadeloupe que, depuis le mois de juin, une quinzaine de médecins sont présents en Martinique pour appuyer les médecins locaux. Une première en France. "C'est un coup de force du président du conseil régional de la Martinique. Alfred Marie-Jeanne a fait pression sur l'ARS et a participé au financement", indique Dominique Théophile. Une présence pourtant loin de faire l'unanimité dans l'île soeur.
Au mois de juillet dernier, l'union des médecins libéraux avaient émis de fortes réserves quant à la pertinence de leur présence. Selon ces médecins, la volonté politique aurait supplanté les précautions administratives. Très engagé sur les questions de santé, le sénateur de Guadeloupe s'inquiète de la pénurie actuelle de médecins, mais s'interroge également pour l'avenir. "Si demain, la pandémie en France atteint le même niveau que la Guadeloupe, il n'y aura plus de réserves sanitaires disponibles. Si demain, la pénurie de médecins en France s'aggrave, nous dépendrons de Paris qui sera dans l'incapacité de subvenir à nos besoins."
L'une des solutions pour permettre de garantir une présence suffisante et pérenne de médecins en Guadeloupe, et plus généralement aux Antilles-Guyane, repose sur le projet de création d'une faculté de médecine qui est, après celui des médecins cubains, l'autre combat du sénateur de la Guadeloupe. Un rapport est attendu début octobre sur ce projet.