Coronavirus : pourquoi la situation est-elle considérée si critique dans les départements d'Outre-mer ? [Data]

État d'urgence sanitaire, confinement, plan blanc dans les hôpitaux, appel aux soignants volontaires… Alors que les mesures se multiplient en Outre-mer pour lutter contre le coronavirus et que Sébastien Lecornu est en visite aux Antilles, la 1ère passe au crible les chiffres de l'épidémie fournis par Santé Publique France.

Des contaminations et des hospitalisations qui grimpent en flèche, des taux d'occupation des services de réanimation inédits… En Martinique, mais aussi en Guadeloupe, Guyane, Polynésie et à La Réunion, l'État et les autorités sanitaires dressent des bilans inquiétants et prennent de nouveau des mesures de restrictions des libertés pour lutter contre la propagation du Covid-19.

Sur quels arguments se basent les autorités pour prendre ces décisions ? La hausse des contaminations a-t-elle réellement une incidence sur le nombre de décès enregistrés ? Alors que ce mardi, 249 soignants et 60 pompiers sont partis en direction des Antilles pour prêter main forte au personnel médical sur placela 1ère fait le point sur la situation sanitaire dans les départements d'Outre-mer. 

Des taux d'incidence vertigineux et inédits en France

Le taux d'incidence, c'est le nombre de nouvelles personnes testées positives sur sept jours et pour 100 000 habitants. Il permet des comparaisons entre différentes périodes et différentes aires géographiques. Ces derniers mois, le taux d'incidence a souvent été le critère pour mettre en place et lever les mesures sanitaires. Au début de l'épidémie, les autorités ont fixés trois niveaux pour cet indicateur :
   - vert : en dessous de 10 pour 100 000 habitants
   - orange ou seuil de vigilance : au-delà de 10 pour 100 000 habitants
   - rouge ou seuil d'alerte : au-delà de 50 personnes pour 100 000 habitants

En Guadeloupe, un taux record a été atteint en semaine 31 (du 2 au 8 août) : 1855 personnes ont été testées positives sur une population de 100 000 habitants en sept jours. Ce taux est de 1176 en Martinique. Du jamais vu jusqu'ici en France. Bien que nettement plus bas, le taux d'incidence dépasse largement le seuil d'alerte à La Réunion (402) et en Guyane (259).

Pour rappel, à Mayotte, au plus fort de la vague de mars dernier - qui avait alarmé les autorités, le taux d'incidence avait atteint 851. Aujourd'hui, il est autour de 15. Contrairement aux autres départements d'Outre-mer, il n'y a pas de nouvelle vague de contaminations à Mayotte à ce stade. 

Les hôpitaux des Antilles saturés

Quand le nombre de contaminations augmente, les hospitalisations pour Covid-19 grimpent elles aussi. Mayotte - où le taux de personnes testées positives est bas - compte très peu d'hospitalisations liées au Covid-19 : depuis le 1er juillet, le 101e département a compté au maximum deux patients hospitalisés.

À l'inverse, ce mardi 10 août, la Guadeloupe enregistrait 221 hospitalisations en lien avec le Covid-19, dont 47 en réanimation ou en soins intensifs. Le nombre total de lits de réanimation a été porté à 55, selon Olivier Veran. La Martinique évoque, elle, 333 hospitalisations, dont 60 en réanimation ou en soins intensifs, alors qu'elle compte désormais 53 lits de réanimation, toujours selon le ministre de la Santé. Dix autres lits devraient être ouverts dans les prochains jours

La Guyane enregistre 94 hospitalisations (dont 24 en réanimation ou en soins intensifs) et La Réunion 203 (dont 54 en réanimation ou en soins intensifs). Il faut noter que ce dernier territoire compte 860 000 habitants, soit entre deux à trois fois plus que chacun des départements de Guadeloupe, Martinique et Guyane. Même si la situation y est inquiétante, l'épidémie y est mieux contenue, à ce stade, qu'aux Antilles. 

Nouveaux pics de décès

Au 10 août 2021, Santé Publique France répertorie 331 décès en Guadeloupe et 184 dans l'île sœur de la Martinique. La Guyane a, quant à elle, essuyé 189 morts depuis le début de l'épidémie en mars 2020, alors qu'à la Réunion, on en dénombre 304 et à Mayotte 132. Selon les données de l'agence nationale de santé publique, il s'agit des décès constatés à l'hôpital, exclusivement. Il est important de noter que si dans l'Hexagone, les décès ont lieu généralement en milieu hospitalier, beaucoup de décès à Mayotte se produisent à domicile.

Le graphique ci-dessous montre que le 101e département de l'océan Indien, qui connait peu de nouveaux cas de Covid-19 ces dernières semaines, a également atteint un plateau en terme de décès depuis le mois de mai. En revanche, les quatre autres départements des Outre-mer enregistrent une augmentation du nombre de morts liées au Covid-19. 

Après un plateau en début d'année 2021, les Antilles ont connu une nouvelle hausse du nombre de décès liés au coronavirus. Cette augmentation ne s'est plus interrompue en Guadeloupe jusqu'à atteindre 331 morts, ce mardi, selon Santé publique France. En revanche, la Martinique était parvenue à endiguer, provisoirement, le nombre de morts liées au Covid-19 de mi-mai à fin juillet, avant une nouvelle hausse ces derniers jours. 

Pour pouvoir comparer les situations entre les différents départements, nous avons ramené le nombre de décès à une population équivalente (ici 1 million d'habitants). L'île de La Réunion dans l'océan indien - territoire des Outre-mer le plus peuplé - apparait ainsi comme le département qui a connu le moins de décès, proportionnellement à sa population. A l'inverse la Guadeloupe affiche le plus lourd bilan et semble être entrée dans un nouveau pic de décès, enregistrant 51 morts en moins de deux mois (15 juin - 8 août). 

Les populations de départ sont celles fournies par l'INSEE. Elles peuvent être légèrement différentes de la réalité, notamment à Mayotte et en Guyane, deux départements qui connaissent une forte immigration clandestine.