À 22h29, le 1er juin 2009, le vol Air France 447 à destination de Paris décolle de Rio de Janeiro, au Brésil. Peu après 2h du matin, l’avion s’abîme dans l’océan Atlantique.
Les 12 membres d’équipage et les 216 passagers meurent sur le coup. Parmi eux, deux Calédoniens et un Réunionnais. François Henry, 39 ans, était steward pour Air Austral. Originaire du Port, il voyageait avec sa compagne.
Le procès du constructeur Airbus et de la compagnie Air France s'ouvre aujourd'hui à Paris. Ils sont poursuivis pour "homicides involontaires".
Quatre minutes
Le drame se noue en quelques minutes. Alors que l’avion traverse un orage, des cristaux de givre se forment dans les sondes de vitesse de l’appareil et finissent par les bloquer. Ces tubes métalliques placés à l’extérieur de l’avion permettent de mesurer la pression du vent et, par extension, de calculer la vitesse de l’appareil. La mesure est essentielle : en dessous d’une certaine vitesse, un avion ne peut plus voler, il "décroche" et tombe comme une pierre.
Dans le cockpit de l’AF 447, les évènements s’enchaînent très vite. En moins de deux minutes, le système de pilotage automatique se déconnecte et une série d’alarmes se déclenche. L’écoute des boites noires révèle que les pilotes –ils étaient trois à bord- ne comprennent pas ce qu’il se passe. Leurs appareils de mesure affichent des données incohérentes, mais ils ne font pas le lien avec un dysfonctionnement des sondes de vitesse. Les pilotes perdent le contrôle et ne parviennent pas à empêcher le décrochage de l’appareil. L’avion chute à une vitesse folle, plusieurs dizaines de mètres par seconde. Moins de cinq minutes après l’arrêt du pilotage automatique, l’avion s’abîme dans l’océan.
Une cinquantaine de corps ont été retrouvés peu après le drame, mais les débris de l’appareil n’ont été localisés que début avril 2011. A alors commencé un difficile travail de repêchage des corps et d’identification des victimes. Certaines, immergées à 3 900 mètres de profondeur pendant de longs mois, étaient encore attachées à leurs sièges.
Le corps de François Henry n’a été rapatrié à La Réunion que deux ans et demi après le drame, en novembre 2011.
"Homicide involontaire"
En août 2019, la justice décide d'un non-lieu pour Air France et Airbus, considérant que les géants de l'aviation ne pouvaient pas anticiper le drame. Mais les proches des victimes font appel, et le 12 mai 2021, la chambre d'instruction de la cour d'appel de Paris ordonne un procès. Air France et Airbus sont poursuivis pour "homicides involontaires".
Le constructeur Airbus est renvoyé devant la justice pour avoir sous-estimé les défaillances de ses sondes de vitesse, les tubes Pitot. L’accusation reproche à Air France de ne pas avoir assez formé ses pilotes, qui n’ont pas su réagir face au givrage des sondes.
La compagnie connaissait les défaillances des tubes Pitot. En 2008, plusieurs incidents, eux aussi causés par la formation de givre dans les conduits, avaient été signalés. Quelques semaines avant le drame, la compagnie avait entamé le changement des sondes sur ses A330 et ses A340.
476 proches de victimes se sont constitués parties civiles pour ce procès qui doit durer jusqu’en décembre. Air France et Airbus risquent 225 000 euros d’amende. Une somme modeste au vu de la taille de ces géants de l’aéronautique. Mais le véritable enjeu concerne l’image de marque de la compagnie aérienne, qui doit son succès mondial à sa réputation de fiabilité.