Des Antillais parties civiles au procès de la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge

Un train a déraillé le 12 juillet 2013 à la gare de Brétigny-sur-Orge, faisant sept morts, dont un Guadeloupéen, et près de 400 blessés.
Ce lundi 25 avril s’ouvre le procès de la catastrophe de Brétigny-sur-Orge, neuf ans après le drame. Sept personnes y ont perdu la vie, dont un Guadeloupéen âgé de 19 ans. À cela s’ajoute plus de 400 blessés dont un Martiniquais qui se trouvait également sur le quai.

En fin d’après-midi, le 12 juillet 2013, l’intercité Paris-Limoges déraille en gare de Brétigny-sur-Orge (Essonne). Parmi les victimes, Brandon Bondot, un jeune Guadeloupéen de 19 ans, originaire des Grands-Fonds de Sainte-Anne. Lors du drame, il se trouvait sur le quai, attendant le RER C. Il est la plus jeune victime de l’accident. La 1ère s’était rendue, à l'époque, à Brétigny-sur-Orge, à la rencontre de ses proches encore sous le choc. Le jeune homme était très apprécié et investi dans le club de foot de la ville. Son entraîneur lui prédisait un avenir prometteur. Sa mère, ses quatre frères et sœurs, et ses oncles et tantes vivent toujours en région parisienne. Son père et grand-père paternel en Guadeloupe. Ils se sont tous constitués parties civiles.


Le Martiniquais, Géronimo Voltine a eu un peu plus de chance. Il attendait lui aussi le RER pour rentrer à Étampes où il vivait alors, lorsqu’il a été projeté sur les rails. Depuis, il est retourné vivre en Martinique. Il suivra le procès de loin, trop affecté pour être présent au tribunal. Il a subi de multiples fractures, dont certaines à la colonne vertébrale. Cet accident lui laisse des séquelles physiques et psychiques.

Les blessés de cette catastrophe ferroviaire se trouvaient à quai ou dans les wagons. Le train en direction de Limoges transportait 385 passagers, il devait seulement passer en gare de Brétigny.

Dès le lendemain du drame, un responsable de la SNCF estime qu'une éclisse, sorte d'agrafe métallique reliant deux rails dans un aiguillage, se serait détachée, provoquant le déraillement du train.

Trois enquêtes ouvertes

Trois enquêtes sont ouvertes : une interne à la SNCF et à Réseau ferré de France (RFF), une du Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT), rattaché au ministère des Transports et une judiciaire ouverte par le parquet d'Évry. Le 24 juillet, le parquet annonce que l'enquête pour homicides et blessures involontaires a été confiée à trois juges d'instruction, et précise que le basculement de l'éclisse "semble être à l'origine de la catastrophe".

Un rapport d'enquête de la SNCF révèle en septembre qu'un des quatre boulons retenant l'éclisse était manquant, probablement bien avant la catastrophe. Un examen visuel de cette pièce avait eu lieu le 4 juillet, mais n'avait rien relevé d'anormal.

Dans un rapport d'étape publié le 10 janvier 2014, le BEA-TT met en cause les règles de maintenance en vigueur à la SNCF, qui ont conduit à ne pas remarquer les défaillances.

Les experts judiciaires relèvent, en juillet, un "déficit" de maintenance et confirment que "c'est bien le basculement d'une éclisse" qui a causé la catastrophe.

Mises en examen

En septembre 2014, la SNCF et RFF sont mis en examen pour homicides et blessures involontaires. En novembre, un rapport réalisé à la demande des syndicats pointe une baisse d'effectifs d'agents de surveillance des voies "plus importante qu'ailleurs" sur la zone de Brétigny, et un "dysfonctionnement organisationnel". La SNCF conteste les chiffres, selon elle, "parcellaires et approximatifs".

Le rapport définitif du BEA, publié le 18 septembre 2015, pointe encore du doigt la maintenance à la SNCF. En janvier 2016, un rapport d'expertise complémentaire remis aux juges conclut qu'une "surveillance efficace aurait sans doute permis" d'éviter la catastrophe.

"Imprévisible", selon la SNCF

La SNCF dénonce des "incohérences" dans cette expertise et demande de nouvelles analyses, évoquant désormais un déraillement "imprévisible", dans un courrier aux juges le 29 février 2016.

Une nouvelle expertise remise aux juges le 22 avril suivant indique que trois des quatre boulons retenant l'éclisse mise en cause s'étaient cassés ou dévissés bien avant l'accident, étayant l'hypothèse d'un défaut de maintenance.

Une contre-expertise, réalisée à la demande de la SNCF, conclut à nouveau en juillet 2018 que la catastrophe a été causée par la "vétusté" des rails, et non pas par un défaut imprévisible de l'acier.

La SNCF soutient cependant deux mois plus tard, sur la foi d'un nouveau rapport qu'elle a commandé à un expert indépendant, que la catastrophe était un accident.

Le 9 janvier 2019, un salarié de la SNCF, qui était à la tête d'une brigade chargée de l'inspection des voies, est mis en examen pour homicides et blessures involontaires. Le 12 juin 2020, ce cheminot, SNCF Mobilités et SNCF Réseau (qui a succédé à RFF) sont renvoyés en correctionnelle.

C’est l’une des plus graves catastrophes ferroviaires françaises depuis la collision en 2008 entre un TER et un car scolaire à Allinges (Haute-Savoie), tuant sept collégiens.