DOCU. "Si loin de la Polynésie" : trois jeunes Polynésiens racontent leur exil volontaire dans l’espoir d’un avenir meilleur

Partir et prendre son envol. Chaque année, de jeunes Polynésiens quittent leurs îles pour l’Hexagone, très loin de leur famille. Ils découvrent alors une autre vie qui devient progressivement la leur. Découvrez les portraits de Mana et de sa femme Ida à Nantes, de Kiani à Lens et du sergent Clément à Fréjus. Tous ont décidé de dépasser leur pudeur pour témoigner de ce déracinement volontaire et raconter leurs joies et les difficultés rencontrées.

Ce documentaire révèle le passage à la vie adulte de ces jeunes Polynésiens, qui ont en commun des parcours marqués par l’éloignement de la terre natale et par l’absence au quotidien de la famille restée en Polynésie. Ce documentaire tente d’explorer, avec eux et leurs proches, leurs histoires d'exils pas comme les autres. 

Mana et Ida rêvaient de liberté et d’autonomie

Ida et Mana dans les rues de Nantes

 À 18 ans, Mana et Ida ont fait le grand saut en s’installant à Nantes. Neuf ans plus tard, ils sont fiers d’avoir réussi à tracer leur chemin. La solidité de leur couple, l’entraide polynésienne et l’attachement profond à leur culture leur ont permis de surmonter la désillusion des premières années. 

On s’était dit qu’on allait apprendre.

Mana

Moi, j’avais envie de partir pour grandir dans ma tête. … Gagner en maturité.

Ida

Les premiers jours dans l’Hexagone ont été un peu compliqués avec les démarches administratives à effectuer dans un environnement où ils ne connaissaient personne et sans aucune famille pour les aider. C’est un souvenir que Mana gardera toute sa vie. Pendant les deux premières années, Ida a ressenti très fortement le manque de la famille et l’éloignement. Quand le couple retrouve d'autres Polynésiens, moments joyeux par essence, ils ne parlent pas du mal du pays pour ne pas se plomber le moral les uns les autres. Maintenant qu’ils ont des enfants et des projets à long terme, ils sont confrontés à la question de la transmission : celle de la culture et des valeurs traditionnelles polynésiennes.

Partir pour réaliser son rêve

L’histoire de Kiani est celle d’une petite fille qui a voulu réaliser son rêve : devenir footballeuse professionnelle. En 2017, à tout juste 15 ans, elle trouve le courage de quitter Tahiti et surtout sa famille. Ce départ nécessaire pour progresser dans son sport, Kiani l'a payé au prix d’immenses sacrifices. Après Strasbourg, puis Cardiff au pays de Galles et Sarrebruck en Allemagne, elle pose ses valises dans les Hauts-de-France pour intégrer le célèbre Racing Club de Lens. 

Kiani en pleine préparation physique avec sa coach.

Les entraînements n’ont pas du tout la même intensité ici et à Tahiti. Ici, on ne t’attend pas. Soi tu es là, soi tu n’es pas là.

Kiani

Aujourd’hui Kiani a trouvé ses marques dans son nouveau club. Mais rien n’est encore gravé dans le marbre. Elle doit gagner sa place en équipe première pour pouvoir vivre du football. Un enjeu qu’elle affronte seule. Kiani avoue avoir connu des moments de découragement. Que ses parents viennent la voir jouer dans l’Hexagone serait une grande joie. Kiani doit puiser en elle pour trouver la force physique, mentale et émotionnelle pour concrétiser le rêve d'une petite fille du fenua.

Le plus gros sacrifice que j’ai fait, c’était de quitter ma famille. C’est le prix du haut niveau. Il fallait être prête à ça.

Kiani

Devenir quelqu'un

Avant de quitter son île, il faut déjà avoir un objectif. Se dire "si je vais là-bas, quand je reviendrai je serai vraiment quelqu’un".

Sergent Clément

Le sergent Clément à l'entraînement

Le sergent Clément est Marquisien dans l’âme, arrivé dans l’Hexagone il y a onze ans, à l’âge de 18 ans, pour intégrer le prestigieux régiment d’infanterie de marine (RIMA) qui accueille la plus grande communauté de Polynésiens et d’Ultramarins de France. Il a choisi l'armée pour voir autre chose que ce qu'il vivait au pays. Son parcours illustre bien la devise du régiment "Croche et tient ".

Aujourd’hui chef de groupe, il a sous ses ordres une dizaine de compatriotes et fait ainsi honneur à ses aînés. "Je n’ai jamais renoncé à ma langue et à ma culture ", reconnaît-il, mais "il fallait que je renonce à abandonner la tristesse parce que si j’avais trop de tristesse, je pense que je ne serai pas encore là". Les retrouvailles entre Ultramarins lui font vraiment du bien. Après onze ans passés dans l’Hexagone, il n’a aucun regret et se sent bien ici. Il y a rencontré sa femme, elle aussi originaire de Polynésie, à un bal tahitien en France. Ils ont maintenant fondé une famille.

Réalisation  : Laurence Generet
Production 13 Prods & Pop'Films, avec la participation de France Télévisions 
Durée : 52 minutes
2022