Euro 2020 de Handball - Béatrice Edwige : « J’ai appris à aimer le ballon »

Face à la meneuse Danoise Mia Bidstrup lors de France Danemark
Avec 110 sélections et 75 buts la Guyanaise Béatrice Edwige possède l’expérience pour parler librement de tous les sujets, ceux qui fâchent comme l’arbitrage, ceux qui la ravissent comme la défense ou la relève en bleu. Cet Euro pourrait être celui d'une nouvelle consécration pour la Guyanaise.


 
D’abord un petit état des troupes à l’entame de cette troisième et dernière semaine : tout va bien, les filles sont en forme, le programme est dense, mais elles ont fait le plus dur dans l’enchaînement des deux derniers matchs. Surtout le dernier selon Olivier Krumbholz le coach des bleues : " Contre la Russie c’était un match exceptionnel, c’était très méritoire d’être revenu et ça se joue sur un coup de dés. L’équipe reste invaincue, et on se rapproche au plus près de la qualification grâce à la meilleure défense du monde " , rappelle-t-il lors de la dernière conférence de presse à l’hôtel des bleues

 

Des certitudes en défense

Voilà c’est dit, forcément le technicien français voit d’un œil particulier la performance d'une de ses joueuses préférées depuis le début de la compétition, Béatrice Edwige tient la baraque défensive bleue. Elle monte beaucoup plus sur ses adversaires que l’an dernier lors du mondial de Kumanoto au Japon, un mauvais souvenir. " Oui c’était une année particulière l’an dernier mais je ne peux pas dire que c’est une évolution. L’an passé individuellement on n’a pas été au niveau, moi non plus. Ceci dit j’ai toujours eu une manière de défendre qui est de porter vers le haut et « d’attaquer l’attaque ». C’est plus flagrant cette année, on a surtout pris conscience qu’on pouvait enchaîner très vite, et poser des soucis aux adversaires. Elles ne s'attendent pas à ce qu’on ouvre autant notre défense et qu’on la referme si vite."
 
 

Ce qu’elle n’a pas voulu dire parce qu’elle est modeste, c’est qu’elle est la patronne de la défense, elle s’y investit énormément de par sa volonté de réussir la performance.

Olivier Krumbholz, entraîneur équipe de France

 
Béatrice tente de s'interposer face à la Russe Valéria Maslova


La semaine dernière Olivier Krumbholz avait avoué aimer s’entourer de "ministres spécialisés" en parlant de son équipe. Celle de la défense lui donne toute satisfaction : " Béatrice travaille énormément à la vidéo sur l’étude de l’adversaire avec une vision d’ensemble, elle recherche une très grande précision et une très grande rigueur par rapport à ce qu’on peut faire. Ce n’est pas facile car il y a deux systèmes en défense, zone ou « homme à homme », et pas mal de joueuses passent d’un système à un autre entre le club et l’équipe de France. Nous on a toujours été très exigeants et cette exigence est reprise par Béatrice qui est LA patronne de défense," insiste -il.

 

L’arbitrage en question

L’équipe de France râle contre les arbitres mais elle n’est pas la seule. Sur le terrain Béatrice a souvent pris des pénalités de deux minutes, comme contre la Russie. On a l’impression qu’il y a des niveaux d’arbitrage très différents dans cette compétition où l'EHF (European Handball Federation) n'a voulu que des doublettes féminines au sifflet. Olivier Krumbholz peste souvent sur le bord de la touche.

" Pester pour Olivier ça n’est pas nouveau " reprend avec humour Béatrice. " Après, sur cette compétition, sans trop en parler car on ne sait jamais ce n’est pas fini, je trouve que le niveau n’est pas au top, on espérait plus des arbitres. Il faut savoir que nous c’est notre vie, ça ne s’arrête pas après le match. Je ne généralise pas mais sur cette compétition, on n’est pas la première équipe à se plaindre du niveau de l’arbitrage, même les Danoises, pourtant à domicile, l’ont fait " continue-t-elle.
 

On attend des arbitres qu’ils se donnent autant que nous sur un match, avec un même niveau de compétence.

Béatrice Edwige


Des décisions qui peuvent perturber un ensemble bien huilé, avec une pointe d’incompréhension pouvant très vite déstabiliser une équipe. " Quand il y a une décision injuste dans le match, oui. Mais là on est un peu prêtes à tout et on s’attend à tout type de réaction de la part des arbitres, on ne peut même plus être surprises par un passage en force ou un deux minutes. En fait on ne sait pas trop sur quel pied danser sur certaines sanctions. On a l’impression que pour les arbitres les règles ne sont pas claires, notamment sur celle du passage en force. Il devrait y avoir une réflexion générale sur cette situation " analyse Béatrice Edwige.

 

Les jeunes frappent à la porte 

Ses statistiques en équipe de France le montrent, 75 buts marqués, la Guyanaise aime attaquer. Seulement une jeune prodige d’à peine 20 ans Pauletta Foppa (elle les aura le 22 décembre), d’origine camerounaise, occupe la place devant. Frustrant ? " Olivier me donne des petit temps de jeu en attaque pour me faire plaisir (rires), mais souvent dans les matchs quand je sens que ces moments offensifs sont importants, je laisse rentrer Pauletta. Mais j’aime le ballon, quand je sais que c’est important et que je dois faire les deux je peux me concentrer là-dessus. Mais là dans ce tournoi pour moi c’est du 80% défense 20% en attaque " note Béatrice.
 
Pauletta Foppa "les mains en or" en action contre le Danemark

 

Je ne peux pas dire que je n’aime pas le ballon, mais je peux dire qu’honnêtement j’ai appris à aimer le ballon. Mais quand on face à des joueuses comme Pauletta, il faut savoir laisser la place à celles qui ont des "mains en or". 

Béatrice Edwige



Dans le même ordre d'idée envers les nouvelles joueuses, Béatrice admire aussi la montée en puissance d’Océane Sercien–Ugolin la jeune guadeloupéenne de 23 ans, révélation du match contre la Russie : " C’est bien ce qu’elle fait, elle est arrivée dans le groupe l’an dernier et ça n’a pas été simple pour elle. Petit à petit elle monte en puissance et elle a la chance de débuter les matchs car Olivier lui fait confiance, elle intègre notre jeu et notre manière de faire. De manière générale, nos jeunes sont de bonnes défenseuses à leur âge. Ok elles aiment l’attaque mais elles savent aussi que pour pouvoir prétendre mettre un pied en équipe de France, il faut aussi aimer défendre et elles sont sur la bonne voie."
 

Battre la Suède pour continuer l’aventure

Le match contre la Suède ce mardi 15 décembre va être déterminant pour l’avenir des bleues dans cet Euro. Une victoire et c’est une place en demi-finale assurée. La préparation mentale est importante pour une équipe qui a tout à perdre contre une autre qui jouera libérée de toute pression. Mais pas d’inquiétude selon Olivier Krumbholz : " On a des joueuses de maturité et un groupe qui se parle. Les filles seront disponibles et concentrées, il y aura peut-être une petite crispation vu l’enjeu qui est suprême. Mais cette équipe sait se servir de ce qui arrive pour rebondir, c’est le résultat du travail de Richard Ouvrard, notre préparateur mental. Une équipe de France fatiguée a tenu les Russes alors une équipe de France revigorée va faire souffrir la Suède. Mais on ne craint rien, pas de problème avec les filles quand Richard gère ", glisse malicieusement le technicien français.

Cela fait rire Béatrice Edwige, qui rajoutera vite une mise en garde car la Suède est éliminée et ça peut changer les données du match
" Ce sera leur dernier match, elles n’auront rien à perdre pendant 60 minutes où elles vont tout donner. Peut-être que le coach va faire des rotations pour des filles qui vont vouloir se montrer, qui plus est face à l’équipe de France. Oui il y a danger, mais nous on sait ce qu’on veut. "
 
Soulagée après le nul contre la Russie

Une place en demi-finale. Une victoire conjuguée à une première place du groupe 1 assurerait à la France de ne pas croiser la route de la Norvège, la terreur du groupe 2. Mais il y a encore du lourd avec l’Allemagne, la Croatie ou les Pays-Bas possibles adversaires en cas de qualification. Les Pays-Bas, championnes du monde en titre, sont entraînées par le coach français Emmanuel Mayonnade, l’actuel entraîneur de Metz, élu meilleur entraîneur du monde en 2019. Ça pourrait faire de belles retrouvailles pour Béatrice avec un coach qui l’a révélé au plus haut niveau.