Festival d’Avignon. “Monstres”, l’appropriation culturelle en question

"Monstres" d'Elisa Sitbon Kendall au Festival OFF d'Avignon
La pièce d’Élisa Sitbon Kendall met en scène quatre personnages qui souhaitent monter une pièce de l’autrice guadeloupéenne Simone Schwartz-Bart, qui se déroule en Haïti. L’une d’entre eux, métisse antillaise, remet en cause la légitimité du metteur en scène, blanc.

La pièce Monstres - proposée dans le cadre du Festival de théâtre OFF d'Avignon - jouerait presque sur la mise en abîme : son autrice et co-metteuse en scène Elisa Sitbon Kendall s’est - en montant le projet - elle-même retrouvée dans la position de son personnage metteur en scène cherchant à monter une pièce de Simone Schwartz-Bart. Avec ce même questionnement, voire doute : “Quelle est ma légitimité ?”…

La comédienne Olenka Ilunga

Dans la pièce, Noé est bousculé dans ses certitudes par l’une de ses comédiennes, métisse guadeloupéenne, qui estime que le regard de son metteur en scène blanc ne prend pas assez en compte la réalité des personnages noirs. Du coup, il ne peut pas selon elle diriger la pièce vers une bonne direction. Et ce point de vue entraîne alors des frictions entre eux deux puis entre tous les comédiens de la troupe.

C’est la question de l’appropriation culturelle que soulèvent avec la pièce Monstres, les deux metteuses en scène du spectacle Elisa Sitbon Kendall et Gaïl-Ann Willig : 

Elisa Sitbon Kendall et Gaïl-Ann Willig ©La 1ere

Rôle(s) métissé(s) pour Olenka

Le rôle de la comédienne métisse guadeloupéenne qui vient rebattre les cartes du spectacle en s’interrogeant sur cette question de l’appropriation culturelle, c’est Olenka Ilunga qui l’endosse. Les internautes de la1ere la connaissent bien pour être apparue dans la série Ultra loin où elle jouait cette fois-ci une étudiante… réunionnaise ! 

La jeune comédienne elle-même métisse belge-congolaise (qui a vécu quelques années à La Réunion et a décidément un tropisme pour les Outre-mer dans ses projets artistiques !) s’est d’ailleurs avec Monstres retrouvée dans la situation de réécrire, avec ses metteuses en scène, une partie de son personnage afin de mieux coller à la realité. Quand on vous parlait de mise en abîme…
La comédienne Olenka Ilunga :

Olenka Ilunga ©La 1ere

Notre avis

Monstres est ce que l’on pourrait appeler une comédie dramatique avec des ressorts de franche comédie qui se mêlent à quelques scènes touchantes (comme celle où le personnage d’Olenka Ilunga appelle son père antillais pour lui demander pourquoi ne pas lui avoir transmis sa langue…).

Sur la question de l’appropriation culturelle, si la pièce pose et aborde très justement les questions, elle ne livre pas d’avis tranché laissant sans doute au public le soin de se faire son opinion, ce qui peut être une bonne chose en soi… Mais à ne pas choisir de point de vue, la narration en souffre un peu par endroits. 

Reste une pièce qui vaut largement le coup d’œil pour son délicat sujet et l’énergie des quatre comédiens qui assument avec justesse leurs rôles… de quatre comédiens en plein doute !

À voir : "Monstres", jusqu’au 21 juillet à la Factory - Salle Tomasi, Festival OFF d’Avignon.