Festival La 1ère à Marseille : trois graffeurs peignent les Outre-mer

Rival & Richard Barri - Festival La 1ère
Vinie vient de Toulouse, Rival et Richard Barri vivent en Polynésie. Les trois artistes ont, en quelques jours, à coups de bombe ou de pinceaux, dessiné leur vision des Outre-mer sur l'un des murs de la Friche de la Belle de Mai.

Peu à peu, l’œuvre prend forme. Trois artistes travaillent de concert pour lui donner vie. Au centre, une surfeuse. Autour, des animaux marins. En fond, des tentacules colorés.

Vinie, Rival et Richard Barri réalisent une fresque autour des Outre-mer dans le cadre du Festival La 1ère à Marseille. Ces trois-là ont déjà travaillé ensemble en Polynésie, mais cette fois-ci, la conception de l’œuvre s’est faite à distance. "Vinie est toulousaine, on a fait du ping-pong pour s’envoyer les maquettes. Avec Rival on habite à Tahiti, on a pu se donner rendez-vous et en discuter", détaille le graffeur Richard Barri.

Vini, en plein travail.

La préparation a débuté il y a près de deux mois. Il a fallu se mettre d’accord sur un sujet et se répartir les rôles. Richard Barri a un style très graphique, Rival excelle dans le réalisme et l’univers de Vini est plus chimérique, inspiré de l’esthétique des mangas et des comics. "On se complète. Vini est très douée en personnages, on a voulu la laisser créer le personnage principal", explique Rival. Lui s’est occupé des animaux marins qui semblent vouloir sortir du mur. Il a opté pour une raie et un requin hyperréalistes, un choix loin d’être anodin pour l’artiste polynésien : "J’ai voulu mettre l’accent sur ces deux animaux-là. Chez nous, on appelle ça un tâura", soit des animaux ou des végétaux "alliés" à des humains. "Auparavant, dans les familles, ils avaient des tâuras liés à des animaux marins. C’est un petit clin d’œil à la Polynésie", détaille l'artiste.

La plupart du temps on travaille seul. En équipe, on apprend une autre méthode de travail, c’est enrichissant.

Rival, graffeur.

Le personnage tient une planche de surf, référence aux JO et à l’épreuve qui se déroulera en Polynésie en juillet prochain. Autre allusion à la culture mélanésienne : le motif de tatouage marquisien qui habille la planche. "Le thème de la fresque c’est "convergence", et la signification de ce tatouage marquisien c’est la convergence. Il relie le ciel et la terre. Dans une partie du motif il y a des oiseaux, et dans la partie inférieure il y a une anguille et quelques poissons. C’est l’alliance du ciel et de la terre", décrypte Richard Barri, qui a grandi en Nouvelle-Calédonie avant de s’installer à Tahiti.

"On n'habite pas au même endroit, mais on se retrouve sur le mur"

Ce mélange ciel, terre, mer, se retrouve dans la chevelure du personnage créé par Vini, où tentacules de poulpe, poissons et feuillages s’entremêlent. "L’idée, c’était de rassembler leur vision des Outre-mer, eux qui y habitent, et la mienne, moi qui y suis allé plusieurs fois, explique Vinie. J’ai choisi un personnage féminin, parce que je suis une fille et que j’ai envie d’apporter une touche féminine dans ce milieu du graffiti qui est très masculin."

On n’habite pas au même endroit, mais on se retrouve sur le mur. On découvre des styles différents et des façons de travailler différentes. J’ai appris beaucoup sur la Polynésie française grâce à cette fresque.

Vinie, graffeuse.

"C’est sans doute très calculé d’avance. Je ne sais pas s’ils ont un plan... Certainement que oui, sinon ce ne serait pas aussi bien proportionné", suppose Blandine, une touriste de passage à Marseille. En effet, la maquette a bien été élaborée en amont, mais les graffeurs s’adaptent et ne suivent pas à la lettre leur dessin initial. "Sur la maquette, la planche était arrondie", explique Vinie, qui a changé son dessin après la victoire de Vahine Fierro au Tahiti pro. Désormais, le personnage porte une planche pointue décorée d’un bord rose, identique à celle brandie par la championne après son sacre. "On n’est pas dans un atelier tout seul, c’est beaucoup de rencontres, d’échanges avec les gens qui passent et avec qui on communique, raconte la graffeuse. Je trouve que c’est un art intéressant parce que, normalement, on va en galerie et on découvre une œuvre finie. Là, les gens voient l’évolution du projet, c’est gratuit et c’est une découverte qu’ils n’avaient pas prévue."

La fresque sera visible à la Friche de la Belle de Mai jusqu’à la fin des Jeux olympiques.