Le tribunal administratif de Guyane a enjoint jeudi l'Etat "de prolonger" les concessions minières de la Compagnie Montagne d'or en Guyane, annulant le refus implicite du ministre de l'Economie Bruno Le Maire. Pour autant, ce n'est pas un feu vert donné au projet minier controversé.
Le tribunal a "enjoint à l'État de prolonger", "dans un délai de six mois" les concessions, clés de voute du projet minier controversé dit de la Montagne d'or. Il a ainsi "annulé" le refus implicite de M. Le Maire de prolonger les concessions minières de la Compagnie Montagne d'or en Guyane.
S'appuyant sur le dépassement du délai réglementaire d'instruction de deux ans, le ministre de l'Economie avait implicitement rejeté le 21 janvier 2019 le renouvellement pour 25 ans des concessions minières de la compagnie Montagne d'or (CMO), portant alors juridiquement un coup d'arrêt au plus grand projet d'extraction d'or primaire jamais proposé en France, porté par le consortium russo-canadien Nordgold-Columbus Gold.
Le tribunal administratif a considéré que CMO "présente suffisamment d'éléments justifiant de ses capacités techniques et financières pour exploiter les concessions". La justice a aussi souligné le "défaut de contestation sérieuse" de M. Le Maire, pour justifier son rejet implicite.
Les concessions (d'une surface de 40 km2) sont situées dans les communes de Saint-Laurent du Maroni et Apatou, en pleine forêt, entre deux réserves à haute valeur de biodiversité. La compagnie y envisage dans les prochaines années l'exploitation et le traitement par cyanuration en circuit fermé d'un gisement de 85 tonnes d'or.
Lors de l'audience du 3 décembre, le rapporteur public avait pointé du doigt, dans ce contentieux, la "faiblesse" et l'absence de "pertinence" des arguments de l'État pour justifier son refus. C'est un "point difficile du dossier" qui n'est "pas à l'avantage de l'administration" avait ajouté le rapporteur public.
Un dossier complexe
En octobre 2019, un rapport de la mission interministérielle que s'était procuré le quotidien économique l'Usine Nouvelle avait estimé que le projet de Montagne d'or en Guyane répondait "aux standards mondiaux adapté à la situation locale". La mission "a pu accéder à une documentation technique très importante" issue "d’études réalisées par des sociétés d’ingénierie réputées". Elle "n’a pas noté de points curieux ou erronés dans ces rapports établis avec sérieux et professionnalisme". Ce document avait été remis aux ministres de la Transition écologique et solidaire, de l’Economie et des finances, et de l’Intérieur, qui n'avaient pas souhaité le rendre public. Le projet industriel contesté de Montagne d'or dans l'Ouest Guyanais prévoyait la création de 3.700 emplois directs, dont 90 % d'emplois locaux. Les associations écologistes estimaient qu'il représentait une menace pour l'environnement et la biodiversité.