Une histoire du tatouage en BD, une pratique ancestrale en Polynésie

Une BD sur le tatouage signée Jérôme Pierrat et Alfred
Jérôme Pierrat vient de publier une Bande dessinée sur le tatouage. Le rédacteur en chef de tatouage magazine raconte de manière très instructive l’histoire de cet art populaire qui trouve sa source notamment en Polynésie. Interview de La1ere.fr.
Le dessinateur Alfred et Jérôme Pierrat, rédacteur en chef de tatouage magazine nous livrent une Bande dessinée passionnante sur l’histoire du tatouage. Un peu dans l’esprit de "Tatoueurs, tatoués", l’exposition du musée Quai Branly (musée Chirac) à Paris qui a remporté un gros succès public, cette BD permet un voyage à travers le temps et la planète. La1ere.fr vous propose un arrêt en Polynésie, l’un des berceaux du tatouage que Jérôme Pierrat connaît bien. 


La1ere : d’où vient le mot tatouage ?

Jérôme Pierrat : C’est un mot originaire de Tahiti. Tatau signifie frapper. Dans son récit, "Voyage autour du monde", James Cook détaille les instruments utilisés par les tatoueurs à Tahiti. Il parle de "tattow", ce mot deviendra "tattoo" en Anglais, tatouage en Français. Dans presque toutes les langues, le mot se dit de la même façon, sauf au Japon où l’on dit "Irezumi" qui signifie inscrire dans la peau.

Comment les tatouages polynésiens se sont exportés en Europe ?

Au 18e siècle, deux chefs polynésiens se sont rendus en Europe. A l’époque, la mode était à l’exhibition d’humains. Ces deux hommes n’ont pas été enlevés. En 1769, Le Français Bougainville revient de Tahiti avec le chef Aotourou. Cinq ans après, c’est Omai, prince de Raiatea qui débarque à Londres à la suite d’un violent orage. Il avait servi d’interprète lors du deuxième voyage de James Cook et il est reparti en Polynésie à la faveur du troisième voyage du célèbre explorateur britannique.


Pourquoi les missionnaires ont interdit le tatouage en Polynésie au 19e siècle ?

Il y a cette idée dans le christianisme que Dieu a fait l’homme à son image et qu’il était donc interdit de modifier son corps. Les missionnaires ont traité le tatouage comme une culture païenne. Et puis, avec l’arrivée des occidentaux, les Polynésiens ont du porter des vêtements couvrant leurs corps. Du coup, le tatouage perdait de son intérêt comme marqueur social car ce sont d'abord les notables qui se tatouaient.  


Comment l’archipel des Samoa a-t-il pu conserver la pratique du tatouage ?

Dans la partie américaine de l’archipel, les habitants ont pu conserver leurs pratiques traditionnelles. C’est ainsi que certaines familles, les Suluape sont tatoueurs de père en fils depuis des siècles. On ne sait même plus quand cela a commencé ! Certains sont partis en Nouvelle-Zélande. Pour tous les Polynésiens qui ont renoué avec le tatouage dans les années 1960-1970, les Samoa, c’était "the place to be", un pèlerinage pour redécouvrir les dessins des ancêtres.

Qui est ce Karl Von der Steinen qui a fait un catalogue des tatouages des Marquises ?

C’est un médecin et anthropologue allemand qui travaillait pour le musée de Berlin. Envoyé en mission en 1897 aux Marquises, il a effectué des relevés des tatouages des hommes et des femmes qu’il a rencontrés. Ses croquis et ses planches constituent la plus importante trace d’un art tribal alors menacé de disparition.  


D’où vous vient cet intérêt pour le tatouage ? Avez-vous des tatouages polynésiens ?

Je suis tatoué depuis les années 80, ma période rock et punk. J’avais 15 ans lors de mon premier tatouage. J’ai principalement  des dessins japonais. Et pourtant, tous les ans depuis 1999, en tant que rédacteur en chef de Tatouage Magazine, je vais au festival Tattoonesia en Polynésie française, mais j’ai tellement envie de me baigner là-bas ! Or avec un tatouage récent, il faut éviter la mer et le soleil pendant trois semaines…
 
Le tatouage
Jérôme Pierrat et Alfred
Editions : La petite bédéthèque des savoirs (Le Lombard)
Prix : 10 euros