Originaires des Antilles, de l’océan Indien et du Pacifique, trois autrices sont venues présenter leur dernier roman au festival Etonnants Voyageurs, qui s'est tenu à Saint-Malo du samedi 18 au lundi 20 mai. Ces trois écrivaines parlent des violences que subissent leurs îles.
Dans Basses Terres, publié aux Éditions Liana Levi, Estelle-Sarah Bulle se remémore à travers ses personnages le mois de juillet 1976, quand l’éruption de la Soufrière a provoqué le déplacement de milliers de Guadeloupéens. Dans son premier roman, Là où les chiens aboient par la queue, elle évoquait les évènements de 1967, qui ont également marqué l’île.
Ces évènements ne sont pas très connus hors de la Guadeloupe alors qu'ils ont fortement marqués la société guadeloupéenne et antillaise. Ils ont laissé des traumatismes liés à la violence d'État pour mai 1967 et à la violence naturelle pour juillet 1976.
Estelle-Sarah Bulle
Tension sociale et écologique
Ces trois écrivaines racontent également la violence des hommes. Dans Le jour des caméléons d'Ananda Devi, publié aux Éditions Grasset, les personnages féminins doivent faire face à la barbarie d’un gang de rue ou à la domination brutale d’un mari.
Malgré le mouvement #MeToo, je me rends bien compte à quel point ce mouvement ne rayonne pas dans d'autres sociétés, dans d'autres pays où même à un autre niveau de la société occidentale, donc les vrais changements ne sont pas profonds.
Ananda Devi
Le roman d'Ananda Devi peut également être appréhendé comme une fable écologique. Elle met en parallèle la violence faite aux femmes de tout temps et sous toutes les latitudes à celle qui détruit l'environnement de l'île Maurice.
Le système patriarcal fait écho à un système économique, de la haute finance, de la mondialisation qui s'impose à nos îles.
Ananda Devi
Aux vents des îles, une maison d’édition de Polynésie, publie un recueil de six nouvelles de Kristiana Kahakaouwila, 39 bonnes raisons de transformer des obsèques hawaïennes en beuveries. La jeune auteure parvient à saisir avec élégance, brutalité, humour et profondeur, les tensions qui secouent son archipel.
Hawaï est toujours vu comme un paradis de carte postale. C'est un paradis mais pour d'autres raisons. C'est un paradis pour les familles, les communautés, les pratiques culturelles qui existent. J'ai eu envie de retourner la carte postale et montrer l'envers du décor.
Kristiana Kahakauwila
Trois romans, trois écrivaines racontent leurs îles et portent un regard tendre et admiratif sur leurs héroïnes, des femmes qui partout doivent résister. Au-delà des océans, les iliennes ont de nombreux points communs que ces trois autrices ont pu partager avec le public du festival Etonnants Voyageurs.