L’imagerie mentale a révolutionné la Guyanaise Alexie Alaïs, nouvelle star du javelot

L'athlète guyanais Alexie Alaïs chez elle à Kourou
Un mental d’acier. Telle est la première grande force de l’athlète guyanaise Alexie Alaïs. Un atout qu’elle développe toute seule. Actuellement en famille à Kourou, la lanceuse de javelot écoute son cerveau et peaufine son physique. Attention, le cocktail Alaïs se révèle très fort.
Elle est insaisissable. N’allez pas imaginer qu’Alexie Alaïs soit compliquée à cerner. Non. C’est juste que la Guyanaise passe son temps entre Kourou et Boulouris. Deux ou trois mois en Guyane. Puis un séjour dans l’Hexagone. Avant un retour express à la maison. Et ainsi de suite. Il faut suivre. Surtout que la pandémie de coronavirus a encore chamboulé son planning. À peine arrivée au CREPS de Boulouris début mars pour un premier stage de préparation, Alexie comprend vite. La situation sanitaire va devenir compliquée. Avant même la mise en place du confinement, la championne reprend le chemin de Kourou :

J’étais bien mieux chez moi en Guyane. Je dispose d’un important matériel sur place et je suis habituée à me préparer physiquement à la maison. Sans compter que j’ai pu continuer à lancer. Mes parents disposent d’un long terrain devant la maison. Donc pas de repos pour mes javelots. Si ce n’est peut-être depuis un mois avec la saison des pluies.


Chez les Alaïs, la pratique du sport se retrouve dans l’ADN de tous ses membres. Irène, la maman était handballeuse au Geldar de Kourou. Jean-Luc, le papa sprintait sur 100 et 200 mètres. Agathe la sœur, fut handballeuse professionnelle. Enfin n’oublions pas Alan, le frère qui officie aujourd’hui en tant qu'éducateur sportif. De quoi vivre un confinement actif. Aucun risque de canapé-blues. Place au sport en famille : "C’était très sympa. On faisait du training en groupe. Alan nous guidait. Le seul bémol concernait la musique. Mon frère voulait nous mettre de la musique caribéenne. Alors que je suis plutôt branchée dancefloor ou techno. Au final, ils ont fini par adopter ma musique. Ma force de persuasion est peut-être plus importante que celle de mon frère," sourit la championne.
 
Alexie Alaïs, numéro 1 française du lancer de javelot
 

Saison écourtée mais motivation décuplée

La musique qu’elle aime dans les enceintes. Des conditions d’entraînement à peu près normales. Elle est pas belle, la vie ? Durant le confinement pourtant, le moral d’Alexie Alaïs, 25 ans a fait le yoyo. Pas simple d’affronter toutes ces nouvelles dramatiques sur le plan sanitaire. Conséquence évidente : le monde de l’athlétisme a dû s’adapter. JO de Tokyo reportés en 2021. Et des Championnats d’Europe d’athlétisme 2020 à Paris carrément annulés : "Ça a fait deux gros coups durs successifs. Pour les Europe à Paris, je comptais vraiment aller chercher un podium. Puis j’ai pris du recul. J’ai analysé la situation. Le report d’un an des Jeux va me laisser plus de temps pour travailler. Je vais pouvoir gagner en expérience. En 2021, je n’irai pas au Japon juste pour participer."

Depuis le 10 août 2019, Alexie Alaïs a changé de catégorie. Lors des Championnats d’Europe par équipes en Pologne, son jet à 63 mètres 46 explose son record personnel. Deuxième performance française de tous les temps. De quoi émouvoir le couple Brisseault, Magali et David. Le duo entraîne Alexie depuis 2015. Le travail a payé : "Magali a changé ma technique. Avant que je la rejoigne, elle me disait que je lançais mal mais loin. Avec ses conseils, elle m’a promis que je lancerai bien et encore plus loin. Elle ne s’est pas trompée !"
Durant le confinement, la team Alaïs-Brisseault a fonctionné comme tout le monde. À distance. Merci WhatsApp. Plans d’entraînement sur mesure. Fonctionnement optimal. À tel point que la numéro 1 française du javelot ne demanderait que quinze petits jours de préparation avant de relever le défi d’une éventuelle compétition. Explication : la Guyanaise dispose dans son jeu, d’un atout majeur que toutes les autres n’ont pas forcément…
 
La Guyanaise Alexie Alaïs sous le maillot de l'équipe de France d'athlétisme.
 

L’imagerie mentale. Merci Mélina !

Si Alexie a changé de dimension en 2019, sa première métamorphose date de 2018. Championnats d’Europe à Berlin. La Guyanaise prend la sixième place de la finale. En coulisses, Mélina Robert-Michon jubile. Les conseils de la médaillée olympique au disque ont été reçus cinq sur cinq :

Juste avant Berlin, Mélina a été extraordinaire, confie Alexie. Elle m’a dit : apprends à fermer les yeux et à t’imaginer en train de lancer à telle ou telle distance. J’ai essayé et j’ai fini par développer dans mon coin, ce concept d’imagerie mentale. Disons que je l’ai adapté. Ma mère est aujourd’hui infirmière-sophrologue. Elle m’apporte aussi des conseils précieux. Et désormais, cet entraînement mental est devenu super important pour moi.


Alexie Alaïs croise donc les doigts pour que le programme de compétitions nationales concocté par la Fédération Française à l’automne soit respecté. La Guyanaise rêve d’un doublé : championnat de France / record de France. Son cerveau ne pense d’ailleurs qu’à ça. Cerveau et javelot chez Alexie Alaïs, tout un programme : "C’est bien simple, la nuit, je rêve que je lance ! Même dans la journée, je peux avoir des mimiques de lanceuse. Sans même que je m’en rende compte. Ça fait rire mes parents."

Le cerveau d’Alexie semble ne jamais dormir. Un cerveau lanceur de javelot 24/24. Un cerveau visionnaire également : "Il m’a déjà donné des infos pour 2021. Et même pour les années suivantes. C’est incroyable. Je ne rentrerai pas dans les détails mais je peux vous dire que ça s’annonce bien. Reste juste à transformer tout ce qu’il m’a montré en gestes gagnants."
 
La performance de la Guyanaise Alexie Alaïs en 2019 en Pologne... vue depuis les tribunes avec son entraîneur Magali Brisseault et la reine du disque Mélina Robert-Michon ©Fédération Française d'Athlétisme