Premier skipper handisport à boucler un tour du monde à la voile en solitaire sans assistance et sans escale, Damien Seguin a participé à quatre Jeux Paralympiques, décroché trois médailles dont deux en or en para voile, à Athènes en 2004 et à Rio en 2016.
À 45 ans (il soufflera ses bougies le 3 septembre), le Guadeloupéen est sur tous les fronts cette année : alors qu'il prépare son second Vendée Globe dont le départ sera donné le 10 novembre prochain, il fait aussi partie de l'encadrement de l'équipe de France paralympique. Il a accordé un entretien à Hodane Hagi Ali dans l'émission radio Olympique Social Club Spéciale Para (à retrouver ici). Extraits choisis.
Vous avez porté le drapeau paralympique avec l'astronaute britannique John McFall sur la place de la Concorde pour la cérémonie d'ouverture. Vous flottez encore un peu comme le drapeau ?
J'ai été mis sur orbite, je pense que je vais rejoindre John dans les étoiles. C'était un bel honneur que m'a fait l'organisation de Paris 2024. Porter le drapeau paralympique, c'est aussi porter tout le symbole. Les Agitos (le symbole qui était sur le drapeau équivalent des anneaux olympiques pour les Jeux Paralympiques, ndlr), c'est l'esprit en mouvement, ça représente bien toutes les valeurs que portent les Paralympiens, on appelle les athlètes comme ça. Donc c'est vrai que je ne touche pas terre depuis.
Le para voile est un sport ouvert à toutes et à tous, quel que soit le handicap. Mais la discipline n'est pas présente à ces Jeux Paralympiques de Paris. Le regrettez-vous ?
Oui forcément, je le regrette parce que c'était ma discipline. Elle n'est plus au programme des Jeux depuis Rio 2016 donc j'aurais été le dernier champion paralympique en voile. On travaille pour que cela puisse revenir au programme un jour parce que cela porte énormément de symbolique. C'est un sport mixte, il y a les hommes, les femmes, il y a différentes catégories de handicaps et tout le monde navigue ensemble, il n'y a pas plusieurs classements donc symboliquement c'était super sympa.
Mais la discipline continue d'exister dans les clubs, au sein des fédérations et aujourd'hui il y a de plus en plus de pratiquants. J'ai toujours considéré que la mer et la voile étaient un environnement qui appartenait à tout le monde et il n'y a pas de raison que même avec un handicap, on ne puisse pas en profiter.
Comment plaidez-vous justement pour que cette discipline soit réinscrite au programme des Paralympiques dans quatre ans à Los Angeles ?
On a fait un gros travail avec la fédération internationale pour avoir plus de nations représentées, notamment des pays africains qui étaient totalement absents de la scène internationale. Donc on a organisé ce qu'on appelle des clinics c’est-à-dire se déplacer avec des bateaux, former des gens, leur faire découvrir le monde de la voile, etc. Donc on a quasiment doublé le nombre de nations qui étaient capables de participer à des championnats du monde donc on a fait notre part du travail. Et aujourd'hui on a reposé notre candidature pour réintégrer les Jeux Paralympiques. Après la décision est plus complexe que la simple volonté mais en tout cas on a fait le job qui était intéressant à faire.
Aussi, on a travaillé sur les supports adaptés et cela a permis aussi de nous structurer de manière différente en France sur les clubs de voile et on a vu un vrai boom de la discipline. Surtout si vous avez envie de faire de la voile, si ça vous traverse l'esprit un jour, n'hésitez pas à vous rapprocher d'un club, il y en a forcément un à côté de chez vous, que ce soit proche de la mer ou sur des lacs ou des rivières.
J'ai envie de dire en Outre-mer, on est bien loti...
Oui, j'en sais quelque chose, j'ai grandi en Guadeloupe, c'est là que j'ai appris à faire de la voile et il n'y a pas de plus joli plan d'eau pour débuter, il y a du vent tout le temps, il fait beau. Pareil, il y a eu un travail qui a été fait localement avec des bateaux adaptés et des entraîneurs formés aussi pour pouvoir accueillir du public handisport, c'est important de pratiquer en toute sécurité.
Damien Seguin, vous accompagnez les athlètes de la sélection française qui sont aux Jeux Paralympiques. Comment cela se passe-t-il ?
Tout se passe super bien ! Déjà le village est vraiment de qualité, et c'est la première fois qu'on a une délégation qui est aussi importante avec autant d'athlètes, autant d'encadrants donc c'est un peu nouveau à gérer de cette manière-là, mais il y a une belle émulation avec tout le monde.
On a beaucoup de chances de médailles, et maintenant c'est à eux de jouer. Nous, l'encadrement, on est là pour les mettre dans les meilleures conditions possibles. Moi, j'essaie de faire profiter aux athlètes et aux encadrants des athlètes de toute l'expérience que j'ai eue des Jeux. On sait que la performance tient à très peu de choses, des fois c'est éminemment psychologique donc si je peux les aider là-dedans, je le fais du mieux possible.
Quels conseils donnez-vous à des jeunes ou moins jeunes athlètes ?
Les conseils sont simples : c'est avant tout prendre du plaisir. Après ceux qui sont sélectionnés pour les Jeux Paralympiques c'est qu'ils méritent leur place, ils n'arrivent pas là par hasard.
Il faut aussi réussir à aborder l'événement d'une façon particulière parce que bien souvent les compétitions paralympiques – en dehors des Jeux – ont très peu de public, et là ça va être complètement différent. [...] En plus quand on est Français, on va vraiment être encouragé donc tout ça, ça peut vraiment changer les routines, ça peut des fois un peu inhiber, il y en a d'autres que ça peut surexciter. Je pense qu'il faut éviter les deux extrêmes, forcément ce n'est pas propice à la performance.
Voilà, rappeler des choses très simples, les aider, les accompagner du mieux possible. Et s'ils en ressentent le besoin, on peut aller encore plus loin dans l'accompagnement.