JO 2021 : qui est Amandine Buchard, la judokate martiniquaise qui revient de loin ?

Elle a ouvert le compteur des médailles ultramarines à Tokyo. La judokate de 26 ans a remporté la médaille d’argent dimanche, après s’être inclinée en finale. Une très belle performance pour l’athlète, qui songeait il y a quelques années encore à tout arrêter.

Larmes de joie pour la Japonaise, sacrée à domicile. Larmes de déception pour la judokate d’origine martiniquaise. "Je suis triste parce que j’étais à deux doigts de réaliser mon rêve", résume Amandine Buchard, juste après sa performance. A 26 ans, l'athlète vient d’être sacrée médaille d’argent des moins de 52 kilos aux JO de Tokyo, après s'être inclinée en finale face à Uta Abe au terme d'un combat de plus de huit minutes.

Les larmes de la judokate sont aussi dédiées à son père mort en 2008. Aux journalistes, elle avoue avoir pensé à lui tout au long de la compétition. "J'aurais voulu réaliser ce rêve pour moi et pour lui", souffle-t-elle. C’est en voyant sa fille briller sur les tatamis qu’il s’est mis au judo. Lors d’une compétition il se blesse, puis sa blessure s’infecte. Il décèdera d’une embolie pulmonaire.

Une championne précoce

Amandine Buchard, qu’on surnomme "Bubuche", est née à Noisy-le-Sec, en région parisienne. Sa mère, Martiniquaise, est originaire de Sainte-Marie. Elle commence le judo à 6 ans, dans un club de sa ville, et intègre l’INSEP, la pépinière des champions français, en septembre 2012. La judokate ne perd pas de temps : à peine un an et demi plus tard, en avril 2014, elle remporte la médaille d’argent lors du Championnat d’Europe à Montpellier.

Sur les tatamis aussi, Amandine Buchard va vite. Très vite. Aux JO de Tokyo, ses deux premiers combats durent à peine plus d’une minute. En demi-finale, elle écrase la Suisse Fabienne Kocher en 16 secondes seulement. Sa spécialité ? Le kataguruma, un mouvement qui consiste à saisir la manche de l’adversaire d’une main, attraper le revers du kimono de l’autre et le faire basculer.

"J’avais pensé à arrêter"

Quelques heures après s’être inclinée en finale des JO de Tokyo, Amandine Buchard retrouve le sourire. Et pour cause, la championne revient de loin. "Je suis vraiment heureuse d’avoir remporté cette belle médaille d’argent qui concrétise tout le travail que j’ai fait, et toutes ces années de travail et d’acharnement, de hauts et de bas et de très bas", déclare-t-elle sur le plateau de Stade 2.

Le "très bas", Amandine Buchard l’a vécu au milieu des années 2010. La judokate, qui concourt avec les moins de 48 kilos, peine à maintenir ce poids. "J’étais une adolescente, je devenais femme. Mon corps a changé. Ça devenait très difficile de rester dans ma catégorie de poids", explique-t-elle.

Si aujourd’hui cette médaille je l’ai autour du cou, c’est parce que je suis passée par ces étapes-là. Je ne les regrette pas. Elles m’ont forgée.

Amandine Buchard, judokate.


La multiplication de régimes draconiens malgré une pratique sportive intensive met en péril sa santé. La jeune femme souffre de troubles alimentaires, de problèmes au niveau des reins, et surtout d'une dépression. La championne songe à tout arrêter. "Quand j’étais sur le tapis ce n’était plus pour faire du Judo, c’était pour perdre du poids. J’avais pensé à arrêter. Trop de souffrance. Trop, trop, trop, de souffrance", souffle-t-elle.

La renaissance

Après plusieurs forfaits pour excès de poids, Amandine Blanchard décide de changer de catégorie. Elle passe en moins de 52 kilos en 2016. Une décision difficile, qui la prive des JO de Rio. La saison 2017 fait office de transition. Mais ses quelques kilos en plus réussissent à la championne. Elle revient fort en 2018 et enchaîne les titres : deuxième au Grand Slam de Paris, elle décroche le bronze aux mondiaux de Bakou. En 2019, c’est à nouveau du bronze pour la championne lors des jeux européens. Lors du Grand Slam d'Osaka en 2019, elle s'impose en finale face à Uta Abe, celle-là même qui lui a ravi la médaille d’or dimanche aux JO de Tokyo. En avril dernier, Amandine Buchard a décroché le titre de championne d’Europe.

La jeune femme, qui regrette que sa "vie privée" soit "plus importante aux yeux des médias" que ses résultats, a pourtant choisi de dévoiler son homosexualité en juin dernier dans un documentaire diffusé sur Canal+. Refus de certains sportifs de partager les douches communes, pressions pour cacher leurs orientations sexuelles… Avec cinq autres athlètes, dans Faut qu’on parle, elle évoque publiquement son expérience pour faire évoluer les mentalités dans le monde sportif.

Un combat qu’elle mène en parallèle de ceux des tatamis. Car l’argent olympique ne suffit pas au cou d'Amandine Buchard. Bien qu'heureuse de sa médaille, elle espère aller "en chercher une plus belle à Paris". Rendez-vous en 2024 donc. Mais d’ici là, un autre espoir de médaille attend la judokate. Samedi 31 juillet, le judo français clôturera l’aventure Tokyoïte, en équipe cette fois.