Joséphine Baker au Panthéon : "Ma France, c'est Joséphine" déclare Emmanuel Macron

Panthéonisation de Joséphine Baker
Quarante-six ans après sa mort en 1975, Joséphine Baker a fait son entrée au Panthéon. Le président de la République a rendu hommage à son talent et à son courage. Son cénotaphe repose désormais dans la crypte à côté de l’écrivain Maurice Genevoix.

La cérémonie a commencé en chanson par Me revoilà Paris qui a retenti à 17h50 (heure de Paris). Depuis le bas de la rue Soufflot, le cénotaphe (un tombeau ne contenant pas le corps) porté par des militaires de l’armée de l’air, l'arme de Joséphine Baker pendant sa période dans la résistance, a remonté la rue jusqu’au Panthéon.  

Panthéonisation de Joséphine Baker

De sa belle voix, Séphora Pondi de la Comédie française a retracé son parcours. Son enfance à Saint-Louis en pleine période ségrégationniste aux Etats-Unis, son envie de s’enfuir, ses premiers pas à Brodway, son arrivée à Paris et son triomphe. Elle s’est imposée comme la nouvelle égérie des années folles fascinant des artistes comme Picasso, Calder et Man Ray. En 1937, elle a acquis la nationalité française. En septembre 1939, à la déclaration de la guerre, Joséphine Baker avait choisi la résistance et avait commencé sa nouvelle carrière d’espionne. Des activités qui lui vaudront la médaille de la résistance et les insignes de chevalier de la légion d’honneur projetés sur le Panthéon.

A l’approche du Panthéon, le cénotaphe a chaudement été applaudi par un public assez jeune. Des militaires ont entonné le chant des partisans. Séphora Pondi a continué à retracer le parcours de Joséphine Baker marqué par la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis et son combat contre le racisme au château des Milandes avec sa tribu arc-en-ciel composée des douze enfants du monde entier qu’elle avait adopté.   

La maitrise populaire de l’Opéra comique a ensuite chanté Dans mon village, écrit par Francis Lopez pour Joséphine Baker en 1953 en hommage au château des Milandes et à sa tribu. Puis, J’ai deux amours a retenti à l’approche du Panthéon. Le Panthéon a alors été le théâtre d’un spectacle son et lumière absolument magique, retraçant encore une fois le parcours exceptionnel de Joséphine Baker. Les dates et les affiches de ses spectacles ont défilé ainsi que les innombrables noms des villes où elle s’est produite.

Puis sont apparus les Unes des articles évoquant sa carrière de résistante. Sur le Panthéon on a pu lire cette phrase : "Antiracistes de tous les pays, unissez-vous". La voix de Martin Luther King a résonné. Lui qui lui avait fait vivre "le plus beau jour de sa vie" lors de la marche de Washington à l’issue de laquelle elle avait été la seule femme à prendre la parole le 28 août 1963. Ce fameux jour où le pasteur prononça son discours commençant par "I have a dream".

"Un vent de fantaisie et d'audace"

"Joséphine Baker, vous entrez dans un Panthéon où s'engouffre un vent de fantaisie et d'audace" a ensuite déclaré Emmanuel Macron. "Au fond il n'y a pas plus française que vous", a ajouté le président avant de conclure "ma France, c'est Joséphine". 

La dépouille de Joséphine Baker restera dans le cimetière marin de Monaco, aux côtés de son dernier mari et de l'un de ses enfants. Sa tombe se trouve non loin de la princesse Grace qui l'avait soutenue dans les dernières années de sa vie. Le prince Albert, son fils, était d'ailleurs présent à cette cérémonie de panthéonisation. 

Réactions du public

Sur place, des centaines de personnes ont choisi de braver le froid pour venir spécialement assister à l'hommage. "J’ai fait garder les enfants pour la journée. J’en aurais été malade si je n’avais pas pu venir. Pour moi c’était vraiment important, explique Nathalie, une Martiniquaise d’une cinquantaine d’années. C’est une grande dame qui a lutté contre l’antisémitisme, contre le racisme. Ça me parle, chez moi on est métis."

Elle n’est pas la seule à avoir bousculé son emploi du temps pour assister à l'évènement. André, Martiniquais lui aussi, évoque "une très très grande dame", à la vie "digne d'un film". Il s'est organisé pour venir : "J'avais loupé Césaire, alors je me suis dit celui-là, quoi qu'il arrive, je serai là. Qu'il neige ou qu'il vente je serai là".

Kathy, 22 ans, avoue dans un grand éclat de rire qu’elle sèche les cours pour être là. Joséphine Baker est une légende à double titre pour la jeune femme, professionnelle de la danse. "C’était une grande dame qui a beaucoup fait avancer les choses, et en tant qu’artiste c’est vraiment une référence pour moi. Sur le plan de la danse et sur le plan des droits civiques." Venue avec une amie, elle a eu du mal à trouver une place : "Pour le coup je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de monde, mais c’est trop chouette, c’est trop bien! Ça fait plaisir, tous âges, toutes couleurs, toutes nationalités... Enfin c’est Joséphine Baker je pense !"

 

"Pour moi c’est vraiment une journée de fête, je viens célébrer une tante, une mère une grand-mère." Shana est belge, mais a fait sa vie en Angleterre. "C’est important de reconnaître ces gens qui ont fait la République. Et pas seulement la République française, c’est vraiment un exemple d’une façon internationale. Et je pense qu’elle a voulu sa vie comme ça. Elle aurait pu se contenter d’être une danseuse avec des bananes, se jouer un peu des stéréotypes etc. Mais elle a compris que le sens de sa vie pouvait être beaucoup plus grand que juste une carrière artistique et je pense que c’est pour ça qu’on l’admire."