Ketty Cham, patronne de l’athlétisme guadeloupéen : "Le confinement, un arrêt ? Non, une réinvention."

La Guadeloupéenne Ketty Cham, réinventée chez elle à Baie-Mahault
Les mois qui viennent de s’écouler n’ont rien changé à sa détermination. La Guadeloupéenne Ketty Cham entraîne les meilleurs sprinteurs de l’île. Objectifs et ambitions intacts. Le confinement lui a juste donné l’occasion de se réinventer.

 
Vous voulez savoir ce qui a changé chez Ketty Cham au cours des trois derniers mois ? La couleur de ses cheveux ! Avant, la Guadeloupéenne pouvait passer du rose au bleu sans prévenir. Au gré de ses humeurs, le vert ou le jaune étaient aussi envisageables. Avec le confinement et la fermeture des salons de coiffure, la CTN (Conseillère Technique Nationale) d’athlétisme a été privée de couleurs flashy. Retour à la teinte naturelle.

Des cheveux de nouveau bruns. Sombres. Un peu comme l’ambiance à la mi-mars chez elle à Baie-Mahault. Pour celle qui entraîne notamment Wilhem Belocian, la star internationale du 110 mètres haies, le tout début du confinement a eu la couleur de l’angoisse : "On essayait de survivre. Comment faire quand tu n’as plus accès aux installations ? Se cacher pour s’entraîner ? Mais où ? C’était compliqué."

Drôle de période. L’agenda des compétitions à venir connaît un bug inquiétant. Le rendez-vous olympique est reporté d’un an. Et les Championnats d’Europe à Paris sont carrément annulés : "L’annulation des Europe à la maison… un vrai choc. Psychologiquement, il fallait encaisser une telle annonce. J’ai donc proposé une pause de trois semaines aux athlètes du groupe. Une vraie coupure pour mieux repartir."
Choix gagnant. À la reprise (qui correspondait également à la fin du confinement), Ketty Cham retrouve des athlètes détendus et prêts à livrer bataille : "Ils n’avaient rien perdu ou presque. Bien sûr il leur a manqué des entraînements spécifiques. Mais leur permettre de couper, de faire un break leur a aussi redonné une belle fraîcheur. Psychologiquement, ils ont retrouvé l’envie de courir après une période inédite et forcément anxiogène."
 
Ketty Cham supervise le retour aux affaires du hurdleur Wilhem Belocian

Sauf contrordre, les athlètes français reprennent en septembre

Si l’horizon sanitaire continue à s’éclaircir, la Fédération Française a prévu de dérouler un calendrier de compétitions nationales de début septembre à fin octobre 2020. Histoire de ne pas devoir subir une saison blanche. En Guadeloupe, Ketty Cham a laissé le choix à ses athlètes. Participer ou non à ces épreuves. Que ce soient la hurdleuse Fanny Quenot, le junior Kenny Fletcher ou encore Maître Belocian, tous sont partants : "Ils ont d’autant plus envie d’y aller qu’ils n’ont pas fait de compétitions l’hiver dernier, confirme Ketty. Aujourd’hui, ils ont besoin de concrétiser tout le travail accompli à l’entraînement. Et dans la foulée, ils devraient enchaîner avec la prochaine saison en salle, début 2021."

Notez bien que la Guadeloupéenne utilise le conditionnel. Ses athlètes "devraient" enchaîner avec la prochaine saison en salle. Car tant que la menace Covid-19 ne sera pas totalement écartée, un doute subsiste pour la suite. Un doute notamment pour les JO de Tokyo en 2021 : "Le report des JO, c’était mieux que l’annulation. Mais il ne faudrait pas que le nouveau rendez-vous japonais de 2021 soit annulé à son tour. Ce serait terrible pour un athlète comme Wilhem par exemple."

Tant que les laboratoires ne seront pas parvenus à concevoir un vaccin, le monde de l’athlétisme semble au mieux condamné à se produire à huis clos. Une réalité qui n’effraie pas vraiment Ketty Cham : "Je vous l’accorde : c’est bizarre à imaginer. Mais l’athlétisme ne ressemble pas au foot. Certaines ou certains seront juste moins galvanisés. Et puis aux Antilles, nous sommes habitués à courir dans des stades d’athlétisme vides ou presque. Donc le huis clos, s’il n’y a que ça…"
 
Fanny Quenot, Ketty Cham et Wilhem Belocian... avant le confinement !
 

L’occasion de prendre du recul

L’heure n’est pas encore au bilan mais Ketty retient beaucoup de positif des trois derniers mois. Cette période totalement unique lui a appris à relativiser les choses. Un peu comme si Ketty avait réinventé Cham : "J’ai pris conscience que j’étais entrée petit à petit dans une forme de routine d’entraînement. Alors j’ai décidé de changer ma façon de coacher. Aujourd’hui, je prends du plaisir à varier les lieux d’entraînement. Je me réinvente au quotidien. Ça me rend plus sereine. Je vous dis ça aujourd’hui. Peut-être que ce sera différent en 2021 à la veille des JO mais pour l’instant, je me sens en paix…"

Positive attitude. Moins de stress. Plus zen. Avec le même sourire. Sans oublier cette envie toute nouvelle de profiter de l’instant présent… et de son cadre de vie : "J’ai simplement hâte de profiter de la Guadeloupe en juin et en juillet. À cette époque de l’année, je me trouve généralement dans l’Hexagone pour la saison classique. Cette année, je vais pouvoir redécouvrir mon île. L’apprécier pleinement et différemment."

Ketty Cham se réinvente. Sereine. Zen. Mais toujours pleine de couleurs. La jeune cinquantenaire doit bientôt retrouver son coiffeur déconfiné pour une nouvelle teinture dont elle a le secret. Sereine. Zen. Colorée. Unique.
 
La Guadeloupéenne Ketty Cham filme les athlètes de son groupe juste après... une bonne séance !