"Il faut sensibiliser par rapport à ce risque qui existe. Il y a beaucoup de cas de leptospirose en Hexagone, mais surtout en Outre-mer", explique Mathieu Picardeau, dirigeant du Centre national de référence de la leptospirose à l’Institut Pasteur. Avec les fortes pluies, la maladie du rat touche de plus en plus de personnes, amenant à des hospitalisations, des prises en charge en réanimation, et même jusqu’à la mort.
Pourtant, ce n’est pas une maladie inconnue, notamment dans les Outre-mer : "Dans tous les territoires ultramarins, l’incidence est beaucoup plus importante que dans l’Hexagone, et c’est vrai tous les ans", rapporte Mathieu Picardeau, avant d’ajouter, "il y a à peu près 150 cas par an en Guadeloupe et en Martinique."
De plus en plus de cas
Depuis 2021, les cas se multiplient en Nouvelle-Calédonie : "En 2021, il n’y a jamais eu autant de cas de leptospirose, sur le caillou rapporte M. Picardeau, ajoutant, il y a une augmentation et c’est très probablement dû au changement climatique. À l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie, ils avaient modélisé les nombres de cas en fonction des années qui sont plus ou moins pluvieuses, l’exposition à l’eau contaminée est un facteur important."
Une augmentation qui se constate aussi en Guyane, mais, qui doit être nuancée selon le scientifique : "Il y a un peu plus de cas, parce qu’avant, il n’y avait quasiment pas de surveillance de la maladie. Depuis quelques années maintenant, ils sont assez sensibilisés, et donc, il y a plus de cas qui sont diagnostiqués, parce qu’il y a plus d’échantillons qui sont envoyés pour un diagnostic."
Un diagnostic important
Un des problèmes de la maladie du rat, c’est de l’identifier. Ses symptômes s’apparentent énormément à ceux d’autres maladies tropicales.
Au niveau clinique, il n’y a pas de symptômes spécifiques, ça ressemble beaucoup aux maladies que vous pouvez trouver comme la dengue ou le paludisme. Donc dès qu’on a une forte fièvre et qu’on a été exposé à l’eau et/ou à des animaux, il faut penser Leptospirose.
Mathieu Picardeau, dirigeant du Centre national de référence de la leptospirose à l’Institut Pasteur
Il faut se rassurer, c’est une maladie qui se soigne très bien. Mais comme pour de nombreuses autres infections, un diagnostic précoce permet de mettre toutes les chances de son côté. Pour Mathieu Picardeau, il est primordial de le savoir : "C’est une maladie qui se guérit très bien si elle est diagnostiquée à temps. Donc on peut vraiment traiter et guérir de la leptospirose, il faut juste y penser."
Lorsqu’on a une exposition avec l’environnement et les animaux et qu’on a une forte fièvre une semaine après, il faut consulter et dire à son médecin qu’on a été en contact avec de l’eau douce ou des animaux, et là, on fait un diagnostic.
Mathieu Picardeau
Une fois diagnostiquée à temps, cette maladie à un gros "avantage", elle se soigne très bien rappel le dirigeant du Centre national de référence de la leptospirose : "Une antibiothérapie marche très bien, on sait qu’il n’y a aucune résistance connue aux antibiotiques chez ces bactéries."
Un vaccin, mais
Pour prévenir cette maladie, il existe bel et bien un vaccin, et ce, depuis les années 1970, pourtant, il n’est pas massivement appliqué aux habitants des zones à risque, et ce n’est pas un hasard. "Il a été fait à l’époque pour les égoutiers de la ville de Paris qui étaient très exposés aux rongeurs. Ce vaccin existe, mais c’est vraiment pour les professions à risque, on ne peut pas vacciner tout le monde en cas d’inondation par exemple, c’est un vaccin assez lourd, il y a trois rappels, puis c’est tous les deux ans. C’est vraiment plus pour les professions à risque, les gens exposés aux animaux ou à l’eau douce", détaille Mathieu Picardeau.
Aucun autre vaccin n’est en développement pour l’heure. Là encore, ce n’est pas un hasard comme l’explique le scientifique : "C’est une maladie qui touche principalement les pays tropicaux ou les pays pauvres, c’est pour ça qu’il n’y a pas de grosses entreprises pharmaceutiques qui veulent investir dans ce genre de vaccins."
La maladie du rat
Si la leptospirose est surnommée la maladie du rat, ce n’est pas pour rien. Cette maladie bactérienne est présente chez les rongeurs et en particulier chez les rats qui excrètent la bactérie dans leur urine. Le scientifique rappel que "la transmission, c’est principalement chez des gens qui vont se baigner dans des rivières contaminées par de l’urine de rongeurs, soit, suite à des inondations et des gens qui marchent pieds nus dans de l’eau qui est contaminée."
Il faut néanmoins être rassuré, chez l’Homme, la maladie est souvent bénigne, la mort survenant dans 5 à 20% des cas. Mais c’est pour éviter ces derniers cas qu’il "faut sensibiliser par rapport à ce risque qui existe, (…) si on y pense suffisamment à temps et que c’est diagnostiqué, ça se traite très bien", insiste Mathieu Picardeau.