Sa vie bascule en 2013. Un jour de printemps. À cause d'une maladie cardiaque incompatible avec le sport de haut-niveau. La pratique du basket professionnel lui devient interdite. Ludovic Vaty encaisse tant bien que mal. "Les premiers temps ont été compliqués. J'ai dû prendre quelque chose comme trente kilos." Puis l'homme se relève. Le Guadeloupéen obtient le droit de rejouer au niveau national. En amateur. Dès 2014. Il évoluera sous les couleurs de Pau Nord-Est, Tarbes-Lourdes, Bordeaux, Coteaux du Luy et enfin, Toulouse. Ludovic regoûte au plaisir simple du jeu. Première victoire.
Reste à gagner de quoi vivre. "Je ne me voyais pas dans un bureau, c'est une certitude mais je n'avais pas d'idées précises." Les conseils de ses proches seront salvateurs. "J'ai toujours adoré bricoler mes appareils électroniques. Des amis m'ont dit : pourquoi n'en ferais-tu pas ton métier ?" Le Guadeloupéen se lance. "Je me suis formé tout seul." En 2020, il monte sa boîte de réparation de téléphone et de tablettes. "Il y a tout le temps des choses nouvelles à apprendre. Je bosse la journée pour mes clients et le soir, je m'entraîne. J'ai trouvé mon équilibre."
Le tic de la gagne au TOAC
En septembre 2021, Ludovic Vaty déménage. Nouveau défi en Nationale 3. Nouveau club à Toulouse. L'historique TOAC, Toulouse Olympique Aviation Club. La saison régulière va friser la perfection. 21 matchs. 19 victoires. "Notre groupe est expérimenté. La mayonnaise a bien pris. Tous les joueurs ont un potentiel de titulaires. C'est top." Le TOAC a déjà son billet pour la N2, l'an prochain. Avec ou sans le Guadeloupéen ? "Je vais en discuter avec mes dirigeants mais ça ne me dérangerait pas. Je suis autorisé à jouer jusqu'en N1. Donc oui, pourquoi pas ?"
Sourire heureux. Ludovic profite de chaque instant de cette saison exceptionnelle. Car Toulouse s'illustre également en Coupe de France amateur. Le TOAC est qualifié pour la grande finale à Bercy, le vendredi 22 avril 2022. "Je suis surtout content pour mes coéquipiers. Ils ont tellement bossé pour réaliser ce parcours." Ludovic compte déjà deux Coupes de France à son palmarès : en 2007 avec Pau-Orthez et en 2010 avec Orléans. Mais ça, c'était avant. "Je ne pensais pas retourner un jour à Bercy. Pays de Fougères, notre adversaire évolue en N2. Donc, a priori supérieur. Mais on sait qu'on peut les battre. On va tout donner."
Ludovic a toujours bon cœur
Depuis 2014 et son autorisation de rejouer au basket, Ludovic a toujours les mêmes contraintes. Les mêmes restrictions. Trois entraînements par semaine. Et un match, le week-end avec un temps de jeu de vingt-cinq minutes maximum. "J'ai changé de médecin. On va dire qu'il est un moins peureux que le précédent. Mais les consignes restent les mêmes." Une préparation spécifique avant chaque match. Un suivi tout au long de l'année. Et pas la moindre alerte. "Je n'ai jamais ressenti une quelconque douleur ou emballement cardiaque. Absolument jamais. Je me sens très bien. Je joue sans appréhension."
Le pivot guadeloupéen continue son aventure dans le monde du basket amateur pour deux raisons : "Le plaisir de jouer et l'esprit de groupe. Voilà ce qui m'a le plus manqué quand les médecins ont stoppé ma carrière." L'ancien membre de l'équipe de France a retrouvé tout ça. Seule nuance désormais : il n'a plus vingt ans. "On récupère moins vite à mon âge. Il faut plus de temps pour s'échauffer. Et les lendemains de match, quand je me lève, je sens que mon corps ne réagit plus aussi bien qu'avant…"
Dans sa bulle
Ludovic Vaty n'aura finalement quitté le monde du basket qu'une année. En 2013. Avant d'échanger son étiquette de pro incontournable contre celle d'amateur redoutable. Sans jamais couper avec son milieu d'origine. "Je suis toujours en contact avec mes anciens coéquipiers." Sans jamais non plus jouer les nostalgiques. "Je ne m'intéresse pas vraiment à l'actualité du basket pro. Je reste dans ma bulle. Maintenant, pour un événement du type Jeux Olympiques, c'est différent. Là, je vais suivre."
Bien dans sa bulle. Bien dans son corps. Bien dans son cœur. Ludovic Vaty s'apprête à disputer une finale de Coupe de France avec une agréable sensation d'équilibre intérieur. Et un seul maître-mot : "Le plaisir." Un plaisir qui devrait lui permettre de continuer à jouer encore quelques années. "Tant que mon corps me laisse en profiter, tant que je peux aider, ça me va. Le jour où j'en aurai marre, ce sera autre chose. Mais pour l'instant, c'est parfait. Ça me permet de dégourdir les jambes…"