Les prix du nickel ont atteint mardi des sommets pluriannuels après que la Russie a envoyé des troupes dans deux régions séparatistes de l'est de l'Ukraine, faisant craindre une guerre et des sanctions contre Moscou qui pourraient interrompre les exportations russes de métal et de minerais.
Du nickel calédonien
En matinée à Londres, les traders du marché du nickel ne savaient plus quelle entreprise appeler pour se faire livrer du nickel. Un analyste a précisé à la 1ère : "Nous allons aussi appeler Eramet, Glencore et Trafigura pour les trois usines de Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique Sud." À la Bourse de Paris, Eramet, le groupe français de la transition énergétique progresse de 5,56 %. Sa filiale calédonienne, la SLN, est l’un des principaux producteurs mondiaux de nickel.
Crainte pour les exportations russes
À ce prix-là, dans un marché spéculatif qui craint une rupture des livraisons du russe Norilsk, le premier producteur mondial de nickel, et avec des fondamentaux orientés à la hausse pour la demande des batteries électriques, "la vraie question, c'est, est-ce que la Nouvelle-Calédonie va pouvoir répondre à la demande ? Ce qui est vrai, c'est que ce prix du nickel de plus de 25 000 dollars est une vraie bouffée d’oxygène pour les trois usines du territoire dont la production repart à la hausse", précise un industriel du Territoire, sous couvert d’anonymat.
Sanctions contre Nornickel ?
Les États-Unis et leurs alliés européens sont en effet sur le point d'annoncer de nouvelles sanctions contre la Russie après que le président Vladimir Poutine a officiellement reconnu deux régions séparatistes dans l'est de l'Ukraine. "La menace de nouvelles sanctions contre la Russie augmente le risque que les flux commerciaux de matières premières soient perturbés entre la Russie et ses partenaires commerciaux", a déclaré le responsable des métaux de base de Fastmarkets.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a affirmé que Londres et Washington empêcheraient les entreprises russes de "commercer en livres et en dollars" en cas d'invasion russe en Ukraine, dans une interview diffusée dimanche par la BBC. Or, toutes les transactions des producteurs russes de métaux industriels se font en dollars depuis la Bourse des métaux de Londres (LME).
L’industriel et chimiste allemand BASF a choisi Harjavalta, en Finlande, comme premier site de production de matériaux pour batteries destinés au marché automobile européen. L'usine sera construite à côté de la raffinerie de nickel et de cobalt appartenant au producteur russe Norilsk Nickel (Nornickel). La situation de crise en Ukraine pourrait remettre en cause ce partenariat en cas de sanctions visant Nornickel.
Le démarrage est prévu pour la fin de 2023, permettant la fourniture d'environ 300 000 véhicules entièrement électriques par an avec les matériaux de batterie BASF contenant du nickel russe.
Le nickel atteint des records
Le métal industriel a atteint 25 230 dollars la tonne – le niveau le plus élevé depuis 2010 – lors de transactions mardi en fin de matinée à la Bourse des métaux de Londres. Le courtier de Marex Spectron, Al Munro, a déclaré que le nickel "bénéficiait de la menace pesant sur les exportations russes" sur un marché déjà tendu avec une demande en hausse alors que les économies rouvrent après les fermetures pandémiques.
Le prix du métal industriel, matière première clé dans la fabrication de l'acier inoxydable et des batteries électriques, s'est envolé de près de 22% depuis le début de l'année. "La crise ukrainienne continue de peser sur les prix des métaux", a déclaré l'analyste de la Commerzbank Daniel Briesemann.
La Russie est l'un des plus grands producteurs mondiaux de nickel, le géant russe Nornickel (Norislk) produit plus de 10% des capacités mondiales.
LME-Nickel 25 306 dollars/tonne + 8,64% depuis lundi 21/02