Lecture, théâtre, musique, danse... Carte Blanche à Maryse Condé au MUCEM de Marseille

Maryse Condé, entourée de ses invités, émue aux larmes à la fin de la Carte Blanche qui lui était dédiée au MUCEM de Marseille, le 26 novembre.
Deux journées ont été consacrées à l'icône de la littérature antillaise au Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée de Marseille, vendredi 25 et samedi 26 novembre. Pour l'occasion, l’écrivaine a invité ses amis artistes devant un public nombreux.

"Fatigante, mais belle". C’est par ces mots que Maryse Condé décrit les deux jours qu'elle a organisés au MUCEM – le Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée situé à Marseille –, les vendredi 25 et samedi 26 novembre. Pour sa Carte Blanche, l’écrivaine guadeloupéenne a rassemblé ses amis artistes venus lui rendre hommage dans une ambiance remplie d’amour et d’émotions. Avec l'aide du Comité Mam Ega, de la Collective, de l’association Mamanthé et du festival Kadans Caraïbe, la lauréate du Booker Prize à la renommée internationale a orchestré de A à Z la programmation de l'évènement, et a assisté à toutes les lectures, représentations, concerts et rencontres qu'elle avait prévues.

Nourrir de vieilles amitiés

Certains artistes qui ont fait le déplacement à Marseille sont des amis de longue date, comme Christiane Taubira ou la comédienne Nathalie Coualy. Cette dernière, originaire de Guadeloupe, est venue interpréter Désirada, l’adaptation du roman de Maryse Condé, par Maryse Condé. Accompagnée en musique, elle y joue seule les trois rôles féminins de la pièce. Son amitié avec Maryse, "c’est de l’ordre de la magie", glisse-t-elle, émue. "C’est comme une deuxième maman. Ses filles sont mes sœurs, mes amies. C’est ma famille."

Christiane Taubira a, elle aussi, tenu à être présente après avoir reçu l’invitation de sa grande amie : "Maryse a d’abord été mon professeur. Puis, nous nous sommes retrouvées quelques années après, en Guadeloupe", raconte la femme politique guyanaise. "C’est une amitié qui s’est nourrie de rencontres à Paris, en Guyane. Nous nous revoyons très volontiers. Je lui ai promis quand je reviendrai le mois prochain d’aller l’embrasser à Gordes." Gordes, dans le Vaucluse, est le petit village provençal où Maryse Condé a posé ses valises avec son mari et traducteur Richard Philcox.

Une nouvelle génération inspirée

Au programme de la Carte Blanche de Maryse Condé également : toute une nouvelle génération d’artistes inspirée par l’autrice. "Maryse Condé était dans la bibliothèque de mes parents", raconte Gaël Octavia, dramaturge et romancière martiniquaise. Aujourd’hui encore, elle a du mal à réaliser que son icône littéraire de jeunesse admire son travail à elle : "C’est un grand honneur, ça me touche énormément la générosité qu’a Maryse de prêter sa lumière à d’autres auteurs, autrices ou créateurs, créatrices des générations postérieures à la sienne."

Inconsciemment, je pense qu’il a fallu cette rencontre dans ma jeunesse pour que je m’autorise à considérer que ce que je peux avoir à raconter est parfaitement légitime.

Gaël Octavia, dramaturge martiniquaise

Table ronde lors de la Carte Blanche à Maryse Condé au MUCEM, le 26 novembre.


L’autrice de Moi, Tituba sorcière, aujourd'hui âgée de 85 ans, a aussi accompagné le slammeur Blade dans son enfance. Lors du festival d’Avignon de 2009, elle le repère sur scène. C'est le début de leur histoire d’amitié. Au MUCEM, celui qui se considère comme le fils adoptif de Maryse Condé monte sur scène pour interpréter Mots et Merveilles, Tribute to Maryse, œuvre originale mêlant slam, cuivres et extraits audio de femmes racontant leur lien à la littérature de Maryse Condé : "J’ai essayé de lui rendre hommage, à la hauteur de la considération que j’ai pour elle", dit-il.

La Carte Blanche se termine par un long moment sur scène. Maryse Condé ne s’exprime pas, c’est la comédienne Eva Doumbia qui parle pour elle. "C’est intéressant de rencontrer d’autres personnes", explique Gaël Octavia. "Ça fait une petite communauté autour de Maryse. C’est très riche."

Hommage et émotion

"Ce qui nous a motivés, c’est la personne, l’œuvre et tous ses liens qui se sont créés au fil des années", détaille Mona Georgelin, de l’association Mamanthé, co-organisatrice de la Carte Blanche.

Si on l’organise au MUCEM, c’est pour que cet événement parle à des personnes de toutes les cultures. On ne veut pas rester entre Antillais pour rendre un hommage à Maryse Condé.

Mona Georgelin, de l’association Mamanthé

Quand on lui présente la nouvelle génération, comme la jeune Solène Gomez Correia, 26 ans, qui lui a consacré un mémoire de recherche, Maryse Condé s’exclame : "C’est magnifique, c’est la vie quoi !" 

Également de la fête, son ami Laurent Voulzy entonne Belle île en mer… Marie Galante… avec le public. Entourée de ses amis sur scène, Maryse Condé tire un mouchoir de sa poche. Elle ne peut retenir son émotion, émue de voir que la Carte n'est plus si blanche, désormais. Son visage disparaît entre ses mains.