Le Premier ministre Michel Barnier a été clair en arrivant à la tête du gouvernement fin septembre : dès l'année prochaine, il va falloir se serrer la ceinture. Et tout le monde sera mis à contribution. En octobre, les ministres de l'Économie et des Comptes publics ont donc présenté un projet de loi de finances (PLF) placé sous le signe de l'austérité, prévoyant 60 milliards d'euros d'économies (partagées entre une baisse des dépenses de l'État et la hausse de certains impôts).
Le budget dont dispose le ministère des Outre-mer ne fait pas exception à la règle. Les crédits pourraient passer de 2,8 milliards d'euros en 2024 à 2,555 milliards d'euros l'année prochaine. Une baisse non négligeable de 250 millions d'euros.
Il faudra néanmoins attendre l'examen du budget au Parlement pour être fixé sur les moyens dont bénéficieront réellement les départements, régions et collectivités d'Outre-mer en 2025. Les députés devraient débattre des crédits de la mission Outre-mer à l'Assemblée nationale mercredi 13 novembre, et pourront donc, à force d'amendements, renflouer le portefeuille de François-Noël Buffet, le ministre en charge des Outre-mer.
Mais l'examen du volet "dépenses" du budget à l'Assemblée la semaine prochaine n'est pas encore certain. Il se fera si et seulement si, les parlementaires votent la première partie du PLF consacrée aux "recettes" (ou bien si Michel Barnier dégaine le 49-3 pour adopter cette partie sans vote). Si jamais les membres de la chambre basse rejettent les "recettes" du budget, le texte ira directement au Sénat.
Les plus grosses coupes du budget Outre-mer
En attendant, seule la copie fournie par le gouvernement et l'examen des crédits en commission par les députés permettent d'en savoir un peu plus sur la baisse envisagée du budget des Outre-mer. Outre-mer la 1ère s'est procuré le rapport du député Yoann Gillet (Gard, RN), désigné rapporteur de la mission Outre-mer à l'Assemblée nationale. Dans ce document, il détaille programme par programme l'évolution des crédits.
Le budget de la mission Outre-mer est divisé en deux grandes catégories : "Emploi Outre-mer" d'une part, et "Conditions de vie Outre-mer" d'autre part. Ces deux ensembles comprennent plusieurs programmes de dépenses, que gère directement le ministère des Outre-mer. Il y a par exemple des fonds dédiés au soutien aux entreprises ultramarines, d'autres consacrés à la politique du logement, à l'aménagement du territoire... Ou encore le financement de la continuité territoriale, une aide de l'État pour permettre aux plus précaires de financer leur billet d'avion entre leur territoire et l'Hexagone.
Dans le projet de loi de finances 2025, certains programmes subissent la cure d'austérité voulue par le gouvernement de plein fouet. Seul le soutien aux entreprises devrait augmenter, passant de 1,539 milliard d'euros en 2024 à 1,643 milliard l'année prochaine (+6,74 %).
En revanche, tout le reste diminue : le logement (-5 %), la continuité territoriale (-17,59 %), le fonds exceptionnel d'investissement (-18,71 %)... La baisse est encore plus spectaculaire pour l'aide aux collectivités territoriales (-38,41 %, de 328,4 millions d'euros à 202 millions d'euros). Les crédits dédiés au programme "sanitaire, social, culture, jeunesse et sports" fondent eux de moitié (10,15 millions d'euros en 2025, contre 21 millions en 2024). Quant au programme "financement de l'économie", il enregistre une nette diminution de 75,47 %.
Les crédits consacrés à l'aménagement du territoire en Outre-mer accusent la plus grosse coupe budgétaire : de 174,4 millions d'euros en 2024, ils fondent à 41,6 millions d'euros dans le projet de loi de finances de 2025, soit une diminution de 76,15 %.
L'engagement de François-Noël Buffet
Tous les élus ultramarins ont fait savoir leur inquiétude face à ce qui s'annonce comme une baisse drastique de l'aide aux territoires d'Outre-mer qui traversent pourtant crises sur crises. La vie chère, les violences urbaines, la sécheresse, la pauvreté ou encore l'accès au logement sont des problèmes décuplés dans les départements, régions et collectivités ultramarines. Députés et sénateurs réclament a minima un budget équivalent à celui de 2024. Mais ils souhaiteraient surtout une hausse des crédits pour investir dans les infrastructures, aider les entreprises, les ménages et les collectivités locales.
Le ministre chargé des Outre-mer, François-Noël Buffet, a entendu la sonnette d'alarme tirée par les Ultramarins. Mi-octobre, il avait assuré vouloir "améliorer la copie" du budget pour répondre aux nombreux enjeux Outre-mer. "J'ai bon espoir que le budget porté par le ministère puisse être rapidement adapté à ces orientations", a-t-il indiqué devant la délégation sénatoriale aux Outre-mer jeudi 7 novembre, évoquant en particulier les engagements de l'État sur les contrats de convergence et de transformation, et sur la réforme de la continuité territoriale. Ne lui reste plus qu'à convaincre le Premier ministre et les ministres de Bercy de desserrer l'étau sur le portefeuille des Outre-mer.