Trois ultramarins sur dix sont mal-logés. Dans son dernier rapport, la fondation Abbé Pierre estime que sur les 2,2 millions d’habitants des Outre-mer, 600.000 sont mal-logés.
À l’origine des problématiques, "une précarité socio-économique dans un fond de mal-logement" selon l’avis du Haut Comité pour le Droit au Logement (HCDL) qui s'est appuyé sur les chiffres de la fondation. Une situation qui s’accentue notamment en raison d’une trop forte croissante démographique face à une offre trop faible de "logements abordables".
Une situation critique dans les Outre-mer
La crise sociale du logement touche l'ensemble du territoire français. Néanmoins, certains territoires semblent davantage marqués par un ensemble de difficultés. C'est le cas des Départements et Régions d’Outre-Mer (DROM) qui, pour un ensemble de facteurs, limitent l'accès à un logement décent à ses habitants.
Isolement géographique, pénurie de logements abordables, prix élevés de l'immobilier ou encore précarité socio-économique sont les causes principales de ce mal-logement.
Les écarts de niveau de vie avec la France hexagonale et la pauvreté multiforme s’en trouvent renforcés, comme en témoigne les taux de chômage (12,6-30 % en Outre-mer contre 7,8 % en Hexagone) et de population couverte par le RSA (de 3,9 à 25,3 % en Outre-mer contre 5,2 % en Hexagone).
Haut Comité pour le Droit au Logementavis relatif à l'application du DALO dans les DROM
110.100 logements indignes et précaires dans les Outre-mer
La précarité socio-économique, mise en exergue par le rapport, entraine donc un parc social saturé dans les Outre-mer. Le HCDL rapporte, pour l'année 2020, que 67 820 demandes de logement social (hors Mayotte) ont été comptabilisées, dont 49 % uniquement à La Réunion.
Les habitats indignes et précaires se chiffrent quant à eux à 110.000 dans les Outre-mer. Avec 45 % des Guyanais qui n’ont pas accès à l’eau chaude courante ou encore que 53 % des Martiniquais et 49 % des Réunionnais vivent dans des logements trop humides, tous les feux sont au rouge et mettent en avant la détresse de la situation actuelle.
De plus, le rapport, publié le 5 février par le HCDL, essaie de déterminer si les dispositifs mis en place par l'État sont efficaces, notamment avec la loi DALO (Droit Au Logement Opposable) qui permet à une personne en situation de détresse d'être placé en priorité dans les logements sociaux disponibles. Un échec pour le HCDL qui formule "plusieurs préconisations pour un recours DALO effectif dans les DROM".
La loi DALO contestée
Mise en place en 2007, la loi DALO (Droit Au Logement Opposable) désigne" l'ultime droit de recours pour demander un logement décent et adapté à ses moyens quand tous les dispositifs classiques n’ont pas réussi à trouver un logement" résume Matthieu Hoarau, directeur de la Fondation Abbé Pierre Île de la Réunion et de l'Océan Indien.
Cet ultime recours au logement qui concerne les personnes dépourvues de logement personnel, menacées d'expulsion, qui vivent dans un "local impropre à l'habitation" (cave, garage...) est donc directement remis en cause par le Haut Comité, qui a construit ce rapport avec la Fondation Abbé Pierre.
Le droit au logement décent est donc loin d’être effectif dans les DROM. Et en dépit des efforts budgétaires récents de l'État, le Haut Comité s’inquiète du manque d’efficience et de la faiblesse de la politique du logement menée dans les territoires d’Outre-mer.
Haut Comité pour le Droit au Logementavis relatif à l’application du DALO dans les DROM
Le Haut Comité rapporte qu'en 2022, 2 456 recours DALO ont été déposés auprès des commissions de médiation (COMED) d’Outremer. Parmi ces recours, 2 151 ont donné lieu à une décision et moins de la moitié, soit 1 029, ont abouti à une décision favorable (49,65 %).
Plus encore, 7 485 ménages ont été reconnus prioritaires au titre du DALO entre
2008 et 2022 dans les DOM. Aujourd'hui, ce sont 30 % de ces ménages ne sont toujours pas relogés.
La situation semble particulièrement alarmante en Guyane ainsi qu'en Guadeloupe où dans la région sud-américaine, près de 47 % des ménages restants à reloger depuis 2008 sont hors délais. En Guadeloupe, cette situation concerne 52,3 % des ménages reconnus prioritaires DALO.
Par conséquent, le HCDL a exprimé quatre grandes préconisations : l'amélioration des outils de suivi des relogements, la prise en compte de Mayotte, la réduction du délai de relogement du Préfet ou encore des logements sociaux plus adaptés aux territoires ultramarins.