Toujours plus de naissances et pas assez de médecins : Mayotte fait face à de lourds défis sur le plan de la santé. Un constat alarmant, confirmé par les chiffres du bilan statistiques 2015 Mayotte-Réunion qui vient d'être publié par l'Agence Régionale de Santé (ARS) Océan Indien.
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Le 101e département français détient toujours le taux de natalité le plus élevé de France, avec 40% estimés pour l'année 2007 contre 16,6% dans le département de La Réunion et 12,2% en métropole en 2013.
Cinq maternités pour plus de 212.000 habitants
Un nouveau record de "9.000 naissances" a même été atteint en 2015, selon les chiffres communiqués par le centre hospitalier de Mayotte en début d'année. Le taux de natalité devrait donc être revu à la hausse dans les prochaines publications. Un phénomène qui tient largement à la pression migratoire exercée par les îles voisines des Comores - de très nombreuses femmes venant accoucher à Mayotte chaque année. En conséquence, le département compte cinq maternités pour plus de 212.000 habitants alors que La Réunion voisine n'en compte que sept pour une population plus de quatre fois plus élevée.
Le plus grand désert médical de France
Mais le jeune département est aussi le plus grand désert médical de France. Au 1er janvier, l'île ne comptait que 98 médecins (généralistes et spécialistes) pour 100.000 habitants, quand la métropole en compte 339. Mayotte est le moins bien doté des territoires ultramarins, loin derrière la Guyane (201) et même Wallis et Futuna (111) selon le bilan 2013 du Conseil national de l'ordre national de médecins. Certaines spécialités demeurent existantes comme les audio-prothésistes, la dermatologie, la vénérologie (maladies vénériennes, ndlr), la rhumatologie ou la stomatologie et la chirurgie maxilo-faciale.
L'accès aux soins reste aussi limité puisqu'il n'y a sur le département qu'un seul centre hospitalier situé à Mamoudzou (chef-lieu). Il concentre à lui seul la grande majorité des patients. Pour les accueils en urgence 24h/24 sur le reste du territoire, il n'existe que 4 centres de référence, rattachés à l'hôpital public.
Prise en charge spécialisée quasi inexistante
Une situation dénoncée par le personnel qui a mené une grève de plusieurs jours en mai dernier, déplorant "la saturation des services". Le centre hospitalier accueillait alors "900 malades pour 300 lits" selon la CGT Mayotte-Santé. Etienne Morel, le directeur du Centre hospitalier de Mayotte, avait lui-même confirmé à l'AFP que le centre hospitalier faisait "face à une suractivité depuis septembre 2014. Il est hors norme suite à une immigration massive. Il y a un problème de sous dimensionnement tant au niveau des structures architecturales que du personnel", avait-il dit.
Dans les domaines de la psychiatrie, du handicap et de la vieillesse, Mayotte accuse un retard tout aussi important. L'Agence Régionale de Santé rapporte qu'il n'existe aucune place en psychiatrie infanto-juvénile et en hébergement permanent pour personnes âgées. Pour l'accueil d'adultes handicapés, seules 6 places sont disponibles en maison d'accueil spécialisée. Le taux d'équipement global pour les enfants souffrant de handicap s'élève à 1,4 pour 1.000 jeunes de moins de 20 ans, contre 2,8 à La Réunion et 3 en France métropolitaine.
110 recrutements supplémentaires et le déblocage de 14 millions d'euros pour le département
Suite à la grève du personnel hospitalier en mai dernier et la revendication d'un "Plan Marshall" pour le centre hospitalier, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé 110 recrutements supplémentaires et le déblocage de 14 millions d'euros pour le département, sur le milliard prévu par la Stratégie de santé pour les Outre-mer. Un plan qui comprend 5 axes et 62 actions pour "l'amélioration des conditions d'accès aux soins et de prises en charge".
La ministre des Outre-mer George Pau-Langevin a aussi souligné le problème de l'attractivité du territoire qui peine à susciter l'intérêt des médecins hexagonaux. Elle a aussi insisté sur la nécessité de travailler, "dans le cadre de la coopération", avec les Comores, pour améliorer la situation sanitaire sur place, afin de ralentir le flux migratoire.