Sur le plan juridique, l'accord de Nouméa signé en 1998 sous l'égide du Premier ministre d'alors Lionel Jospin, et qui organise la décolonisation de la Nouvelle-Calédonie par étapes, est terminé.
"Une période de transition de 18 mois" doit s'ouvrir pour élaborer un nouveau statut dans la République.
L'objectif invoqué : "se libérer de l'alternative binaire entre le oui et le non" et "bâtir un projet commun" dans cette "nouvelle étape", a expliqué Emmanuel Macron dans une allocution télévisée après la proclamation des résultats.
Deux phases sont prévues : le "bilan" de l'accord de Nouméa, avant des discussions qui devront "aboutir à une nouvelle révision constitutionnelle", une révision de la Loi organique et une "consultation de projet".
"L'État n'entend pas confondre vitesse et précipitation dans cette phase importante", a affirmé dimanche à l'AFP le ministre des Outre-mer Sébastien
Lecornu, soulignant toutefois que "certains sujets d'actualité sont urgents".
C'est ensemble que les Calédoniens devront bâtir le projet pour leur territoire, avec toute sa place, singulière, spécifique, et respectueuse de toutes les communautés, au sein de notre République.https://t.co/5DSVxznYgE
— Jean Castex (@JeanCASTEX) December 12, 2021
Emmanuel Macron a notamment évoqué dimanche "la situation économique (et) sanitaire, la relance, l'équilibre des comptes publics", ou encore "les inégalités qui fragilisent l'unité de l'archipel, la stratégie nickel, l'autonomie alimentaire et énergétique, le foncier, la fiscalité".
Dialogue compliqué
Alors que M. Lecornu est arrivé sur place vendredi, le dialogue entre tous les acteurs s'annonce pour autant compliqué.
"Il y a certainement du côté indépendantiste un sentiment de rupture de confiance, de rupture de la parole donnée, que ce soit de la part de l'État, mais également des partenaires, puisqu'il aurait fallu un consensus sur la date de ce troisième référendum", a commenté sur franceinfo Carine David, professeure de droit public à l'université des Antilles, spécialiste des institutions d'Outre-mer.
Le FLNKS et les nationalistes, qui ont boudé dimanche le scrutin qu'ils espéraient voir repoussé en 2022, ont d'ores et déjà annoncé ne pas reconnaître son résultat, qui "ne pourra pas constituer une base de discussion". Ils ne souhaitent pas non plus discuter "avant la présidentielle" d'avril 2022.
Référendum en Nouvelle-Calédonie : "Pour nous, ce n'est pas le troisième référendum", réagit le président du congrès localhttps://t.co/rUY3DOOxMw pic.twitter.com/TIL3KZUXkp
— franceinfo (@franceinfo) December 12, 2021
Bien que "la forte abstention" soit "une donnée politique à prendre en compte", "la légitimité juridique" du scrutin "ne fait pas de doute", a répondu de son côté l'entourage de Sébastien Lecornu.
Emmanuel Macron a, lui, appelé à accueillir avec "respect et humilité" le résultat, notant que "le corps électoral est resté profondément divisé".
Pour anticiper les crispations, le ministère des Outre-mer a tenu à rassurer que "la réconciliation des mémoires, la préservation et la valorisation de la culture kanak restaient plus que jamais d'actualité".
"Horizon incertain"
La France ne devrait "pas introduire de manière unilatérale auprès de l'ONU de demande de retrait de la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires non-autonomes", précisait un document de juillet 2021 qui sert depuis de feuille de route.
Arguant qu'il est "à charge contre l'indépendance", le FLNKS rejette ce document et fait plus volontiers référence comme socle de discussion au rapport rédigé en 2013 par Ferdinand Mélin-Soucramanien, agrégé de droit public, et Jean Courtial, conseiller d'État.
Ces derniers avaient exploré quatre hypothèses "d'aboutissement de l'accord de Nouméa", dont l'une était "la pleine souveraineté avec partenariat", qui fait écho au projet des indépendantistes, opposés à "une rupture avec la France".
Pour Isabelle Merle, historienne, directrice de recherche au CNRS, la Nouvelle-Calédonie a surtout "besoin d'être sécurisée" et "que le dialogue soit maintenu avec toutes les composantes de la population".
"Un pacte d'avenir, (...) cela pourrait être un statut qui intégrerait l'idée d'une indépendance-association", a-t-elle envisagé dimanche sur franceinfo.
"Il faudra au gouvernement de la patience, de l'inventivité et beaucoup de respect", "dans un horizon incertain", a jugé auprès d'Ouest-France Jean-Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux et ex-rapporteur de la mission d'information sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.