"Notre Dame d'Haïti", au théâtre de Belleville : révolutions sur scène

Le spectacle « Notre Dame d’Haïti » de la compagnie réunionnaise Lolita Monga, au Théâtre de Belleville jusqu’au 26 novembre, raconte trois expériences vécues en trois lieux qui ont connu leur lot de petites et grandes révolutions : Haïti, Notre Dame des Landes et La Réunion.
Sur scène, le décor évoque ces ZAD, ces zones à défendre, comme celle que l’on a largement aperçu dans les medias du côté de Notre Dame des Landes, quand plusieurs opposants tentaient d’y empêcher l’implantation d’un nouvel aéroport, et n’est évidemment pas un hasard… Ce pourrait aussi être un campement de guérilleros comme ceux que l’on imagine en Amérique du Sud ou ailleurs… Ou le bout d’un quartier pauvre d’Haïti, pas un hasard non plus.. Sur scène encore, quatre personnages en quête de hauteur, en quête d’un idéal plus haut encore que leurs aspirations personnelles. Quatre personnages prêts à en découdre avec le système, avec la société et à faire voler en éclat les carcans qui nous emprisonnent. Bref, prêts à faire la révolution.

Regardez la Bande-Annonce :


La révolution pour quoi faire ?

Qu’est-ce qui poussent certains d’entre nous à se révolter ? A mener, par exemple dans la rue, ces combats politiques, idéologiques qui mènent parfois à l’affrontement ? Qu’est-ce qui entraîne les uns à agir et les autres à subir ? Jusqu’où l’idéal d’un monde meilleur, jusqu’où l’utopie peuvent –ils nous faire rêver ? Le rêve pour le rêve ? Le rêve jusqu’à sa concrétisation et à quel prix ?

Ce sont là quelques-unes des questions que Lolita Monga, auteur et metteur en scène nous pousse à nous poser dans ce spectacle. Non contente de convoquer le vent de la révolte haïtienne ou de convier l’actualité brûlante liée à Notre Dame des Landes,elle y intègre en plus l’Histoire de la Réunion, le marronnage. Trois dimensions qui s’allient parfaitement, se répondent tantôt par les chants de maloya magnifiquement interprétés par Judith Profil – connue aussi sous le pseudonyme de Kaloune, tantôt par les chansons et la poésie créole venues d’Haïti dans la voix de Sachernka Anacassis. Campant les figures masculines des révolutionnaires-type, Laurent Robert et Olivier Corista complètent ce quatuor d’acteurs tous excellents. Généreux, investis, incarnant avec une belle énergie ces aspirants à la liberté, ces révoltés parfois en quête de convictions, ces révolutionnaires agissant au nom des peuples et des sociétés et parfois aussi en leur propre nom.

Un spectacle total et universel

Chants, masques, poésie, textes, percussions, musique, vidéos… Notre Dame d’Haïti brasse toutes les ficelles qu’offre le théâtre. C’est une synthèse, un collage, un spectacle total et universel… Seule vraie critique à lui opposer : l’absence d’histoire formelle. Le spectacle est parfois si puissant avec ses évocations tantôt drôles, tantôt émouvantes des petites et grandes révolutions et l’interprétation, l’incarnation des figures si bien réussies qu’il est un peu dommage de ne pas davantage avoir inscrit ces personnages dans un récit, dans une histoire, dans une narration. Sans doute un excès de gourmandise de la part du spectateur et une envie inassouvie de voir comment les uns et les autres trouveraient, chacun à sa façon, la résolution de ses doutes, de ses questionnements, de ses engagements.

Il n’en demeure pas moins que ce spectacle « Notre Dame d’Haïti » nous montre, aussi bien par les choix des textes qui le composent que par sa mise en scène ou le jeu des comédiens, la force de la croyance de l’être humain en ses utopies. Illustration qui fait du bien, par les temps qui courent… 

Bonus : le reportage de France Ô

Regardez le reportage de Nathalie Sarfati et Mourad Bouretima (France Ô/Outre-mer 1ère) :
©la1ere

 

Notre Dame d’Haïti
Texte et mise en scène Lolita Monga. Au Théâtre de Belleville (Paris 11ème), jusqu’au dimanche 26 novembre.