Effectifs en baisse, pouvoir d’achat en berne, reconstruction… la Nouvelle-Calédonie énonce ses priorités pour l’année scolaire 2025

Conférence de presse de rentrée, à Nouméa, dans les locaux du gouvernement, le 14 février 2025.
À partir du 17 février, 62 660 élèves doivent faire leur retour en classe et en cours. Une rentrée très particulière, après les violences de 2024 et leurs conséquences en cascade. Elles donnent le ton des axes prioritaires fixés par les instances de la Nouvelle-Calédonie pour cette année scolaire.

“C’est une rentrée qui a été particulièrement complexe à préparer.” Déclaration du vice-recteur, Didier Vin-Datiche, ce vendredi 14 février, à Nouméa, lors d'une conférence de presse à Nouméa. Les acteurs calédoniens de l’enseignement y ont énuméré les priorités propres à cette année scolaire 2025 post-émeutes, au-delà des grands classiques comme le travail sur les fondamentaux. Une année de retour à un régime normal d'examens, au lieu du contrôle continu intégral qui a été de mise l’an dernier. 

À la question "est-ce que dès lundi il y aura, pour accueillir les élèves, suffisamment de salles de classe et d'enseignants ?", la réponse est positive.

Didier Vin-Datiche, vice-recteur et directeur général des enseignements

Accueillir 62 660 inscrits

En début d'année dernière, selon les statistiques, la population scolaire comptait 63 523 inscrits. Or, à l'approche de la rentrée 2025, il est question de 62 660 élèves attendus.

  • 24 900 dans le premier degré public. 
  • 22 270 dans le second degré public.
  • 7 240 dans le premier degré privé. 
  • 8 245 dans le second degré privé. 

Composer avec des élèves de moins en moins nombreux

"Il y a une baisse importante des effectifs", confirme d'entrée Isabelle Champmoreau, membre du gouvernement en charge de l'enseignement. Quelques chiffres donnent le ton.

  • Concernant le secondaire, depuis les émeutes de mai, un millier de collégiens et lycéens a quitté le Caillou.
  • Dans le primaire, le Sud a perdu environ deux mille écoliers, soit partis hors du pays, soit transférés dans les autres provinces.
  • Mais même sans la crise insurrectionnelle, il y avait l'an dernier 8 700 places de collège qui n'étaient pas occupées, dont trois mille uniquement sur Nouméa. 

De fait, le nombre d'élèves en Calédonie recule depuis 2012. D'abord, "on est dans un mouvement de repli démographique", rappelle Didier Vin-Datiche. Ensuite, le phénomène des départs, enclenché depuis quelques années, s'est accentué à partir de mai.  

Intégrer les mouvements de population

Au-delà des départs définitifs, le système éducatif fait face à des flux importants en interne. Conséquents vers juillet-août, ils se sont stabilisés, puis ont repris en fin d'année et ne semblent pas terminés. "À l'heure où je parle, il n'y a pas eu de reflux" vers la province Sud, estime le vice-recteur. "Donc, il y a eu 're sédentarisation' d'une frange importante de la population. Dans les îles, ce qui nous a conduits à ouvrir des classes au lycée des Îles, à Lifou. Et aussi des formes de 're sédentarisation' de la population scolaire en collège sur la côte Est, notamment Canala et Houaïlou où nous avons ouvert des classes." 

De la même façon qu'une rentrée se prépare six mois avant, je pense que la rentrée va durer au moins un mois, parce qu'il y aura encore des ajustements d'ordre démographique à faire. 

Didier Vin-Datiche, vice-recteur et directeur général des enseignements

Maintenir des aides

Autre enjeu majeur de cette rentrée, le pouvoir d'achat en berne pour les familles affectées par la crise. Dans ce contexte, les allocations Cafat de rentrée sont maintenues, souligne Isabelle Champmoreau. "Un arrêté du gouvernement est passé mercredi pour officialiser cette décision." Une aide du même montant que l'année dernière, qui s'applique à la fois pour les salariés en général et pour les foyers les plus démunis. Montant de la dépense, environ 400 millions de francs CFP. 

Éviter certaines hausses de tarif

"Sur la question de la vie chère, poursuit la membre de l'exécutif, il nous est paru important de maintenir les tarifs de cantine et d'internat [dans le secondaire public] au même niveau que l'année dernière". Pourtant, l'augmentation du coût des matières premières poussait à faire monter les prix. "Ce qu'on va faire, c'est qu'on va prévoir au budget 2025 une subvention pour les 27 établissements concernés" - collèges et lycées. "Les familles ne subiront pas d'augmentation."

Autre façon de préserver leur portefeuille : "Sur les fournitures scolaires, depuis 2023, nous avons demandé à nos équipes de fournir des listes scolaires le plus limitées afin de limiter les coûts pour les familles. Ça prend une importance encore plus particulière cette année." 

Sécuriser le jour J

Sur le sujet, sensible, de la sécurité, "il n'y a pas d'alerte particulière sur la rentrée, rassure Isabelle Champmoreau. Il n'y a pas de remontée de problématique particulière sur le 17 février." Reste que les forces de l'ordre seront déployées, en statique comme en patrouilles, "pour rassurer les équipes, pour rassurer les familles et être en vigilance". Didier Vin-Datiche renchérit : "un des enseignements de l'année 2024 a été de renforcer notre partenariat avec les forces de police et de gendarmerie. Nous allons prolonger cette coopération." 

Reconstruire en partie Petro-Attiti

Parmi les priorités affichées, la reconstruction des établissements détruits ou endommagés par les violences. En particulier Petro-Attiti. "L'État nous a confirmé une aide à 100 % sur la partie que nous allons reconstruire", détaille Isabelle Champmoreau. Car le lycée pro situé à Rivière-Salée serait rebâti en diminuant la voilure. "Maintenant que les sommes ont été confirmées, c'est important pour nous d'avoir un calendrier. On est déjà sur des travaux qui se termineraient en 2026 et donc sur une rentrée 2027."

Notre projet est de ramener le lycée Petro-Attiti, qui avait à peu près 800 élèves, à une taille humaine. Ça nous permettra d'avoir une organisation beaucoup plus fluide en termes de sécurité, de vie scolaire et de qualité de vie, des élèves et des personnels. 

Isabelle Champmoreau, membre du gouvernement en charge de l'enseignement

Réfléchir au transport scolaire

Malgré les critiques sur le nouveau réseau Tanéo, "nous sommes satisfaits que pour cette rentrée, il y ait eu un travail du SMTU qui permet a minima d'avoir des lignes et des fréquences près de nos collèges et de nos lycées sur l'agglomération", observe-t-elle. "L'année dernière, il nous était annoncé le risque de n'avoir aucun transport à la rentrée de février. Ce n'est pas le service optimal, mais c'est un service minimum." Au-delà, "je propose cette année une réflexion globale sur le transport scolaire, avec une prise en charge pour l'instant sur des problèmes bien spécifiques". Comme la prise en charge temporaire du transport pour environ 500 internes dans le Nord. 

Autres annonces, du harcèlement au téléphone

  • "Des priorités anciennes vont demeurer, indique le vice-recteur. Je pense à toutes ces formes de microviolences qui existent dans nos établissements. Notamment la lutte contre le harcèlement. Les événements nous ont empêchés d'atteindre l'objectif fixé en 2024. Il sera atteint en 2025 : doter tous les établissements publics, collèges et lycées, d'un protocole de lutte contre le harcèlement." 
  • Des expérimentations vont être menées, dans certains établissements volontaires, pour encadrer l'usage des téléphones portables.
  • D'autres annonces ont été faites par la directrice de l’enseignement en Nouvelle-Calédonie, Christelle Varney. "Un axe sur lequel nous avons commencé à travailler en fin d'année dernière et que nous allons mettre en œuvre cette année, notamment auprès des enseignants c'est le numérique et l'utilisation de l'intelligence artificielle. Des formations seront proposées aux enseignants pour en avoir un usage raisonné."
  • Par ailleurs, "pour lutter contre les inégalités au niveau de l'école primaire, nous mettons l'accent sur l'aide aux devoirs, que ce soit fait sur le temps d'apprentissage". 
  • Enfin, une "Journée de l'école" est prévue, même si le nom n'est pas définitif. Un événement placé sous le signe "de la cohésion et de la fraternité"

Voyez aussi la synthèse de Natacha-Lassauce-Cognard et Claude Lindor

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