Avec ses trois casquettes, on la voit sur tous les fronts. Depuis près de deux mois, de Paris à Nouméa, Sonia Backès enchaîne visites sur le terrain, inaugurations et représentations. En tant que secrétaire d’Etat chargée de la Citoyenneté dans le gouvernement national, comme présidente de la province Sud ou en coordinatrice de la confédération loyaliste Ensemble.
Démonstration avec ce sujet de Dave Waheo-Hnasson :
Dimanche 21 août, elle évoquait sur le plateau de NC la 1ère cette triple activité, et une actualité politique chargée. Voici ce qu’on peut en retenir.
Perchoir du Congrès : pour la candidature loyaliste unique de Gil Brial
Mardi 30 août, le Congrès renouvelle son bureau, et sa présidence. "L'année dernière, les loyalistes ont été en dessous de ce qu'ils auraient dû faire. Deux candidats se sont affrontés. Le candidat indépendantiste a été élu parce qu’on n’a pas été capable de se mettre d’accord", dépeint l'invitée du JT en faisant référence à Annie Qaeze et Virginie Ruffenach - candidate AEC qu’elle-même n’avait pas soutenue - face à Roch Wamytan. Or, cette année, "j’ai eu l'occasion de rencontrer mes partenaires loyalistes, Thierry Santa, Philippe Dunoyer et Nicolas Metzdorf, pour proposer la candidature unique de Gil Brial à la présidence du Congrès. Il a toujours été celui qui pousse pour que nous réalisions l'union la plus large possible", défend Sonia Backès.
Quant au positionnement des trois élus Eveil océanien, qui peut faire pencher la majorité de l’hémicycle : "On les a approchés, reconnaît-elle. Il y a eu des discussions entre un certain nombre d'élus de chez nous et l'Eveil océanien. Ils ont eu un comité directeur [ce dimanche]. Ils verront ce qu'ils font. Mais M. Tukumuli a dit ici qu'il voulait la stabilité des institutions. Ça veut sans doute dire qu’il ne veut pas bouger les choses. »
Il y a quatre institutions à l'échelle de la Calédonie : le Congrès, le gouvernement, le Sénat coutumier et le Cese. Les quatre sont dirigées par des indépendantistes. Ça n'a pas de sens. Les indépendantistes devraient comprendre qu'il doit y avoir un partage des responsabilités, parce que les Calédoniens qui ont voté pour la France doivent être représentés.
Sonia Backès
L'action du gouvernement "n'est pas à la hauteur"
Est-ce que la confédération Ensemble souhaite la chute de l’exécutif ? "Ce qui a été fait par le gouvernement Mapou n'est pas à la hauteur de ce que les Calédoniens attendent", déclare en tout cas l'invitée. "Malheureusement, il y a de moins en moins de collégialité. Des décisions ont été prises sans forcément les partager avec nous. Nous rentrons dans une phase où on va engager des discussions pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie. Personne n'est parfait, personne ne sait tout faire tout seul. Nous, quand nous sommes aux responsabilités, nous interrogeons, dit-elle. Je pose des questions au groupe FLNKS à la province et je pense que nous avons intérêt à gouverner ensemble. Je regrette que le gouvernement indépendantiste ne le fasse pas."
Cela étant dit, "les cartes sont dans les mains de l'Eveil océanien. Il y a au Congrès 25 loyalistes, 26 indépendantistes et trois Eveil océanien. Le gouvernement ne peut tomber que si l'Eveil océanien le décide."
"On ne refuse pas" d’être secrétaire d'Etat
Pourquoi avoir accepté de devenir secrétaire d’Etat, début juillet ? Sonia Backès le répète : "Quand on nous propose quelque chose comme ça, on ne refuse pas." Et d'ajouter, en évoquant les trois référendums inscrits dans l’Accord de Nouméa : "C'est bien, après que les Calédoniens se [sont] exprimés trois fois pour rester dans la France, que la Nouvelle-Calédonie soit représentée au sein du gouvernement national."
C’est un moment où c'est important que l'ensemble des ministres, l'ensemble des membres du gouvernement, connaissent la Nouvelle-Calédonie. Je peux jouer ce rôle, d'information et de réponse aux questions.
Sonia Backès, secrétaire d'Etat en charge de la Citoyenneté et présidente de la province Sud
Deux casquettes "compatibles"
Une fonction qui s'ajoute au mandat de présidente provinciale. Est-ce que ça peut durer ? "On verra bien mais j'ai eu l'occasion de tester, au cours des deux derniers mois, ces deux casquettes. Elles sont compatibles", assure l’intéressée, en le redisant : "Il y a beaucoup de choses que je peux faire à distance. J'ai également une équipe, dans mon exécutif à la province, parfaitement capable d'assumer les fonctions, une administration qui fonctionne bien, en dématérialisé depuis très longtemps. Je suis très présente sur le terrain quand je viens en Nouvelle-Calédonie, pour voir les citoyens de la province Sud. Le reste peut se gérer avec les personnes qui sont à Nouméa."
Pourquoi ne pas laisser à un(e) autre les rênes de la province ?, insiste un internaute. Après avoir invité "ces jeunes qui veulent faire fonctionner le pays à se présenter aux élections", Sonia Backès tient sa position : "Les Calédoniens m’ont fait confiance en 2019 pour être présidente de la province Sud (…), pour que j’aille au bout de ce mandat. Il se trouve que le président de la République m’a proposé d’être secrétaire d’Etat. C’est sans doute une période. Mais mon engagement premier, c’est celui de présidente de la province Sud."
Si j’avais à choisir entre les deux mandats, je resterais présidente de la province parce que c’est mon engagement, c’est mon combat, c’est la Calédonie.
Sonia Backès
"Je fais la part des choses"
Des voix comme celles du Rassemblement-LR ont déploré son cumul de fonctions. Et les indépendantistes ont estimé que les dés en étaient pipés, avant les discussions institutionnelles. "C'était au moment de ma nomination", rétorque Sonia Backès. "Les choses évoluent évidemment. Chacun constate que je fais bien la part des choses entre ce que je fais au niveau national, au niveau du gouvernement de la République, au titre de la citoyenneté, et ce que je fais localement." Et elle répète : "En ce qui concerne les discussions sur l'avenir, j'ai été très claire. Les indépendantistes ont dit qu'ils ne voulaient pas que je sois 'en face d'eux' pour les bilatérales, au titre de l'Etat. Je suis complètement d'accord. Cela ne serait pas correct."
Je suis un partenaire local. Je mènerai la délégation loyaliste et je ne suis pas l'Etat pour ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie.
Sonia Backès
Jean-François Carenco en septembre pour préparer le comité des signataires
Le ministre délégué aux Outre-mer se rendra courant septembre en Nouvelle-Calédonie, a évoqué l’invitée de notre JT. "L'idée, c'est qu'il puisse avoir des discussions avec tout le monde pour préparer le comité des signataires qui doit avoir lieu à la fin du mois. (…) Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, qui est en charge du dossier calédonien, a souhaité qu'il puisse y avoir cette écoute faite par (…) Jean-François Carenco, et d'autres qui viendront en Nouvelle-Calédonie pour préparer au mieux, pour que les discussions reprennent. »
Au-delà des postures, les indépendantistes et les loyalistes savent qu'un accord se passera, sera à trouver, avec tout le monde. Il n'y aura pas un accord entre les indépendantistes et l'Etat ou un accord entre les loyalistes et l'Etat. Il y aura un accord entre les indépendantistes, les loyalistes et l'Etat.
Sonia Backès
A propos du calendrier
Les résultats d’un audit confié par l’Etat à un cabinet doivent être rendus dans plusieurs mois, sur la période couverte par l'Accord de Nouméa. Or, le fameux référendum de projet a été annoncé pour la mi-2023. Un tel calendrier paraît bien serré. "Non, parce que cet audit, qui avait été demandé depuis plusieurs années, est utile, mais il n'est pas exigé pour le début des discussions", assure Sonia Backès. "Ce sera bien de l'avoir pour finaliser (…) Cela nous laisse neuf mois de discussions. Avec cet audit qui va arriver en fin d'année ou en début d'année prochaine, ça nous laisse tout le temps (…) pour savoir ce qui ne fonctionnait pas, ce qui a bien fonctionné et ce qui reste à faire. Et de construire un modèle où tout le monde se retrouve."
On doit sortir des postures. Il y a eu trois référendums extrêmement clivants, extrêmement durs. Maintenant, je crois que la nouvelle génération aspire à autre chose : que l'on construise une Nouvelle-Calédonie où l'on peut vivre tous ensemble et où tout le monde se retrouve.
Sonia Backès
Citoyenneté et corps électoral
Interrogée sur sa vision de la citoyenneté calédonienne, Sonia Backès s’attarde sur sa "particularité" : "elle est liée au corps électoral, et au corps électoral gelé". D’enchaîner : "Ce corps électoral gelé n'était que transitoire. Il n'est plus acceptable qu'il reste gelé (…). On a aujourd'hui des personnes nées en Nouvelle-Calédonie qui n'ont pas le droit de vote. Des personnes qui sont là depuis plus de vingt ans, mariées avec des Calédoniens, qui n'ont pas le droit de vote… Tout cela est inacceptable sur le long terme." Bref, la citoyenneté calédonienne "doit évoluer".
La citoyenneté, c'est la capacité qu'ont les habitants d'un pays à avoir des droits, des devoirs et à se sentir fiers d'appartenir à un pays. On a des choses à faire en Calédonie pour se sentir fier d'être Français, fier d'être Calédonien.
Sonia Backès
Collaborateurs
Brieuc Frogier, conseiller aux affaires réservées au sein du secrétariat de Sonia Backès ? "Je n'ai pas de conseiller aux affaires réservées, répond celle-ci. J'ai un conseiller parlementaire, deux conseillers techniques, un conseiller spécial, un conseiller en communication… Dans mes huit collaborateurs, j'ai deux Calédoniens, dont Brieuc Frogier. Brieuc m'accompagne, depuis trois ans maintenant, sur tous les sujets politiques. Il a été avec moi pour l'usine du Sud, pour la date du référendum et il continuera d'être à mes côtés, à Paris, puisque je le lui ai demandé."
Pour un service minimal en cas de grève
Citons encore cette question d'internaute : dans le contexte de grèves paralysantes et récurrentes, à quand la mise en place d’un service minimum obligatoire dans les secteurs publics stratégiques ? "Ça relève du Congrès, dans lequel nous n’avons pas de majorité, réagit l'élue. "Je crois qu’effectivement c’est utile. Des Calédoniens, des touristes, sont restés cinq jours bloqués [avec les perturbations sur Aircal]. On a eu des gens bloqués à l’île des Pins qui n’avaient aucun moyen de revenir. Des gens qui avaient des avions pour repartir en Métropole, qui n’ont pas pu. C’est absolument inacceptable, ça existe ailleurs : on doit avoir un minimum pour que les gens qui ont des urgences aient des solutions pour rentrer à Nouméa."
Un entretien avec Steeven Gnipate à retrouver en entier :
Et Sonia Backès était quelques jours plus tôt invitée de la matinale radio.