Opération Wuambushu à Mayotte : l'île comorienne d'Anjouan redoute un afflux "dramatique"

Mutsamudu - Anjouan
Une opération policière, prévue à Mayotte pour y déloger sans doute dans les prochains jours des sans-papiers comoriens, inquiète les autorités d'Anjouan, l'île comorienne la plus proche, qui se disent démunies pour les accueillir.

L'opération "Wuambushu" (reprise, en mahorais) vise à déloger les migrants illégaux des bidonvilles de Mayotte. Ces sans-papiers, dont la plupart sont comoriens, seraient ensuite expulsés vers Anjouan, à 70 km de distance du département français.

Joint par l'AFP, le maire de Mutsamudu, la capitale de l'île, qui compte 30.000 habitants pour 30 km², ne cache pas son inquiétude. "C'est une situation désastreuse décidée à Paris avec la complicité des élus de Mayotte. Nous allons assister impuissants à un drame, nous sommes dépourvus du plus petit centre d'accueil à Mutsamudu", a déploré Zarouki Bouchrane.

Dès la révélation de l'opération en février par le Canard enchaîné, hebdomadaire satirique français, la société civile comorienne a exprimé ses inquiétudes.

Le président comorien s'est entretenu avec Emmanuel Macron

"Nous nous sommes mobilisés pour demander son annulation et prier les autorités françaises et comoriennes de trouver une solution pérenne à Mayotte qui préserve la population des quatre îles" des Comores, a affirmé à l'AFP Nadia Tourqui de "Stop Wuambushu à Mayotte", un collectif d'organisations créé au début du ramadan.

À la Grande-Comore comme à Anjouan, les manifestations sur la voie publique ne sont pas autorisées. "Nous aurions aimé que les pouvoirs publics laissent la population manifester", regrette le maire de Mutsamudu.

Le président Azali Assoumani, rentré aux Comores jeudi de La Mecque, avait déclaré la semaine dernière à l'AFP espérer "que l'opération sera annulée". Selon une source dans son entourage, il s'est entretenu cette semaine depuis La Mecque avec son homologue français Emmanuel Macron. "Je ne connais pas encore le contenu de leurs discussions", a ajouté cette source.

Certains observateurs politiques se demandent pourquoi le président comorien privilégie le bilatéralisme sur cette question avec la France, alors qu'il préside actuellement l'Union africaine.

"Une condamnation de Moussa Faki, président de la Commission de l'organisation panafricaine, aurait eu plus d'impact. Pour cela, il aurait fallu qu'il soit saisi, ce qui n'est pas le cas", a regretté un diplomate comorien sous couvert d'anonymat.