Les images sont difficiles à regarder. Dans le salon, un homme s'en prend violemment à sa compagne. Il tente de l'étrangler. Il la jette au sol. Et s'empare même d'un fer à repasser pour la frapper. Tout ça sous les yeux de leur enfant, un bambin. La scène se déroule en Guadeloupe, au mois d'octobre, et a été filmée par une caméra de vidéosurveillance. La procureure de la République Caroline Calbot l'a diffusée lors d'audiences au tribunal de Pointe-à-Pitre pour sensibiliser sur la réalité des violences intrafamiliales. Un fléau qui frappe de plein fouet les territoires d'outre-mer.
Lundi 25 novembre, à l'occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le Premier ministre Michel Barnier a annoncé un ensemble de mesures pour accélérer la lutte contre ce phénomène de société dont Emmanuel Macron avait fait une grande cause de son quinquennat.
Parmi les annonces du chef du gouvernement, une est censée permettre aux victimes de signaler plus facilement les faits de violence conjugale. D'ici à la fin de l'année 2025, le dépôt de plainte dans les hôpitaux disposant de services d'urgence ou gynécologique sera étendu sur tout le territoire, comme l'a avancé la secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes lundi matin sur Franceinfo.
"N'hésitez pas. N'hésitez pas à franchir la porte d'un hôpital. N'hésitez pas à franchir non plus la porte d'une gendarmerie, la porte d'un commissariat", a intimé Salima Saa aux femmes victimes de violences.
La secrétaire d'État en a profité pour répéter que le numéro d'urgence 3919 était accessible dans l'Hexagone comme dans les départements d'outre-mer. Le dispositif a été étendu en 2021 et est désormais ouvert 24h/24, 7j/7, ce qui permet aux femmes ultramarines d'y accéder plus facilement, sans être dépendante du décalage horaire. "Nous avons l'intention de le déployer encore plus", a précisé Salima Saa. Le gouvernement lancera une campagne de communication dans les Outre-mer en 2025 pour faire connaître ce dispositif.
Une Maison des femmes dans tous les départements
En déplacement à l'Hôtel-Dieu à Paris, lundi après-midi, Michel Barnier a par ailleurs annoncé que "chaque département sera dotée d'une Maison des femmes avant la fin 2025". Ces structures prennent en charge les femmes qui fuient la violence de leur conjoint. Une nouvelle structure a été inaugurée à Saint-Denis, sur l'île de La Réunion, en octobre dernier. Mais le maillage territorial de ces Maisons n'est pas encore suffisant pour permettre la prise en charge de toutes les victimes.
Ce dispositif est agrémenté d'une hausse de l'aide universelle d'urgence, aide pécuniaire allant de 300 à 1.400 euros versée par la Caf pour soutenir les femmes qui quittent leur foyer. Plus de 33.000 personnes ont bénéficié de ce dispositif mis en place en décembre 2023. Le Premier ministre a indiqué que les moyens mobilisés par l'État allaient augmenter de 7 millions d'euros l'année prochaine, passant de 13 à 20 millions d'euros.
Enfin, dans la lignée du procès des viols de Mazan, qui a mis en lumière les agressions sexuelles qu'a fait subir Dominique Pelicot à sa femme, Gisèle, le gouvernement va "expérimenter le remboursement par l'Assurance maladie des kits pour détecter la soumission chimique des potentielles victimes", a annoncé le chef du gouvernement.
"C'est un enjeu de société, un combat juste et nécessaire", a conclu le Premier ministre à l'issue de son déplacement à l'Hôtel-Dieux, à Paris, indiquant qu'"il n'y aura aucune forme de tolérance" sur les violences faites aux femmes. Mais beaucoup reste à faire : en 2023, les forces de l'ordre ont enregistré 271.000 femmes victimes de violences de la part de leur partenaire ou ex-partenaire, soit une hausse de 10 % sur un an, selon le ministère de l'Intérieur. En Outre-mer, 5 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint entre le 1ᵉʳ janvier et le 31 décembre 2023.