Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle sait créer une ambiance. Dans sa dernière production théâtrale, Françoise Dô nous replonge dans l’année 1961, dans une ville des Etats-Unis avec en toile de fond les revendications des Afro-américains pour leurs droits civiques et les tensions qui vont avec. Une inspiration née d’un exercice d’écriture, une forme d'improvisation à partir uniquement de photographies de l'américain Garry Winogrand qui ont plongé l’autrice dans une multitude de directions, toujours au cœur de ces Etats-Unis et autour de cette période des années 1960, riches en histoires à raconter.
Une ville, deux femmes
Au centre de la pièce Juillet 1961, deux femmes, Cloë et Clarisse, l’une Blanche, l’autre Noire ; l’une se prostitue pour s’en sortir, l’autre multiplie les petits boulots. Des points communs : leurs petites filles sont amies et elles partagent le même déclassement social, pauvres toutes les deux. C’est ce que l’une et l’autre donnent à entendre dans les tableaux qui se succèdent.
Un autre récit se fait également entendre quand elles évoquent leurs deux filles parties jouer ensemble. Là, un décor et un contexte se dessinent puisque la ville est finalement au centre de tout. Et des tensions qui baissent tout au long de la pièce. À noter que Chloë est interprétée par Rosalie Comby et Clarisse par Françoise Dô elle-même, pour les besoins des premières représentations (une autre comédienne, Wanjiru Kamuyu, devrait prendre le relais).
Deux comédiennes, deux musiciens
Sur scène, les deux comédiennes déclament finalement plus qu’elles n’interprètent leur partition. Un peu comme une sorte de chant, de psalmodie sur une musique qui a été conçue de toutes pièces au fur et à mesure que le texte s'est élaboré. C’est l’une des particularités dont parle Françoise Dô dans l’Oreille est hardie : contrairement à ses précédents projets, elle a souhaité être entourée dès le début du processus de création. Si elle s’est retrouvée seule, en résidences d’écriture pour concevoir le texte, tout le spectacle, lui, s’est conçu de façon collaborative, grâce à un travail étroit avec les musiciens Roberto Negro et Sylvain Darrifourcq que l’on retrouve également sur scène armés de leurs pianos et autres instruments de percussions acoustiques ou électroniques.
Au gré du texte qui prenait forme, le tissu musical se confectionnait, collant aux mots et aux ambiances voulues par Françoise Dô. À l’arrivée un spectacle au texte fort et aux ambiances sonores quelque peu étranges mais jamais en dissonance par rapport au récit. Un voyage parfois âpre mais toujours intriguant vers cette Amérique des années 1960 où il ne faisait pas toujours bon être Noir.
Écoutez l’Oreille est hardie…
…Et faites plus ample connaissance avec Françoise Dô, ses conceptions artistiques, son parcours, ses envies, ses appréhensions, ses ambitions, son regard sur la création du côté de sa Martinique, des Caraïbes et ailleurs…
Retrouvez l'autrice, metteuse en scène et comédienne Françoise Dô dans l’Oreille est hardie : c’est par ICI.
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"L'Oreille est hardie" avec Françoise Dô
"Juillet 1961" de Françoise Dô, les 18 et 19 mars à Tropique Atrium (Fort-de-France, Martinique) puis à venir : Théâtre Ouvert (Paris) et Comédie de Saint-Etienne.