Le 18 janvier prochain, l'Assemblée nationale examine un accord de cogestion entre la France et l'île Maurice concernant Tromelin, un îlot minuscule de l'océan Indien. L'affaire déchaîne les passions. Avec des arrières-pensées très politiques. Décryptage.
C'est un minuscule îlot inhabité, perdu dans l'océan Indien. Pourtant, Tromelin, 1km2 à peine, déchaine les passions depuis quelques jours sur les réseaux sociaux, après une tribune libre dans Le Figaro du député Philippe Folliot et de l'écrivain Irène Frain. La raison : le 18 janvier 2017, l'Assemblée nationale va examiner un projet de loi qui doit sceller un accord de cogestion économique, scientifique et environnementale entre la France et l'île Maurice. Jusqu'à aujourd'hui, Tromelin est une île française, administrée par les Terres Australes et Antarctiques Françaises. Mais Maurice revendique cette île depuis 1976. Au delà de la portée symbolique de ce petit caillou isolé, ce sont surtout les eaux territoriales qui l'entourent, incluant des zones de pêches ou potentiellement riches en pétrole, qui attisent les convoitises des uns et des autres.
A l'époque, en avril 2013, pour tenter de faire taire les critiques, le ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, se rend sur Tromelin pour expliquer cet accord-cadre et réaffirmer que l'îlot est et restera un territoire français en des termes qui ne laisse pas place à l'interprétation : "C'est un accord de cogestion, pas un partage de souveraineté !"
Regardez le reportage réalisé sur place en avril 2013 par Réunion 1ère :
Ce mercredi 11 janvier 2017, Philippe Folliot a interrogé le gouvernement sur ce dossier lors des questions d'actualité. Regardez la question et la réponse :
Une position strictement identique à celle défendue en janvier 2012 par Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, signataire de l'accord, lors du dépôt du projet de loi au Sénat, il s'agit d'une "cogestion économique, scientifique et environnementale". "Ce dispositif ne préjuge pas de la position respective des deux parties en ce qui concerne leur souveraineté ou leurs revendications territoriales sur l'île de Tromelin et ses espaces maritimes environnants. Ils s'inscrivent dans une démarche pragmatique et novatrice visant à dépasser le différend territorial qui oppose la France et Maurice sur Tromelin, en établissant un partenariat actif qui doit permettre le renforcement des liens d'amitié et de bon voisinage entre les deux pays."
Ecoutez un magazine radio réalisé en 2009 sur l'île :
Une longue histoire politique
En 1999 c'est Jacques Chirac, alors président de la République, qui évoque le premier l'idée d'une cogestion sur Tromelin avec Maurice. Il faudra ensuite des années pour faire aboutir le projet. En juin 2010, alors que Nicolas Sarkozy est le chef de l'Etat, l'accord cadre est signé entre la France et Maurice. Mais ce n'est qu'en décembre 2012 que débute le processus de ratification de l'accord par le Parlement français. C'est d'abord le Sénat, le 18 décembre 2012, qui ratifie le texte sans difficulté. Un projet de loi qui avait été déposé par le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé en janvier 2012, avant l'élection de François Hollande à la présidence de la République.Levée de bouclier en 2013
Mais le passage devant l'Assemblée nationale, prévu en avril 2013, suscite une première levée de bouclier, menée par le député UDI du Tarn, Philippe Folliot. Il estime que c'est "Le détricotage de la France, de son intégrité et de sa puissance maritime qui se joue dans cette affaire".A l'époque, en avril 2013, pour tenter de faire taire les critiques, le ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, se rend sur Tromelin pour expliquer cet accord-cadre et réaffirmer que l'îlot est et restera un territoire français en des termes qui ne laisse pas place à l'interprétation : "C'est un accord de cogestion, pas un partage de souveraineté !"
Regardez le reportage réalisé sur place en avril 2013 par Réunion 1ère :
Mais devant la grogne parlementaire, le gouvernement choisit finalement de retirer le projet de loi de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, début 2017, c'est ce même texte qui ressurgit et qui doit à nouveau être examiné par les députés le 18 janvier 2017, alors que le quinquennat de François Hollande s'achève au mois de mai.
Philippe Folliot remonte au front
Cette fois encore, le député (UDI) du Tarn Philippe Folliot, remonte au front. Dans la tribune libre parue dans Le Figaro le 9 janvier 2017, il dénonce en compagnie de l'écrivain Irène Frain, auteure d'un livre qui a fait connaître au grand public la terrible histoire des "Naufragés de l'île de Tromelin", ce traité de cogestion qualifié de "Scandaleux, dangereux, unilatéral et déséquilibré". Avec deux autres députés, Philippe Folliot a également lancé une pétition en ligne, "Lîle de Tromelin doit rester Française". A ce jour, mercredi 11 janvier, la pétition a recueilli 841 signatures.Ce mercredi 11 janvier 2017, Philippe Folliot a interrogé le gouvernement sur ce dossier lors des questions d'actualité. Regardez la question et la réponse :
Le front National aussi
Le Front National était déjà monté au créneau contre cet accord en 2013, et vient de persister via un communiqué de Marine Le Pen. La présidente du Front National, candidate à la présidentielle, affirme que "La majorité socialiste s'apprète à porter un mauvais coup à la France". Qualifiant ce projet de loi d'anticonstitutionnel, elle "Demande solennellement au président de la République et au Premier ministre de retirer ce projet de ratification de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale".Quid de la souveraineté ?
Au delà des positions politiques des uns et des autres et des arrières-pensées éventuelles à l'approche de l'élection présidentielle de 2017, que dit précisément l'accord de cogestion signé en 2010 ? Lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2017, Mathias Fekl, Secrétaire d'Etat au Commerce extérieur a expliqué. : "Il ne saurait être question de mettre en cause la souveraineté de la France. Rien dans la mise en oeuvre de cet accord ne peut constituer une base de contestation de notre souveraineté. Toutes les garanties juridiques ont été prises".Une position strictement identique à celle défendue en janvier 2012 par Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, signataire de l'accord, lors du dépôt du projet de loi au Sénat, il s'agit d'une "cogestion économique, scientifique et environnementale". "Ce dispositif ne préjuge pas de la position respective des deux parties en ce qui concerne leur souveraineté ou leurs revendications territoriales sur l'île de Tromelin et ses espaces maritimes environnants. Ils s'inscrivent dans une démarche pragmatique et novatrice visant à dépasser le différend territorial qui oppose la France et Maurice sur Tromelin, en établissant un partenariat actif qui doit permettre le renforcement des liens d'amitié et de bon voisinage entre les deux pays."
A quoi ressemble Tromelin ?
Voici un diaporama réalisé en 2009 sur l'îlot lors du passage du Marion Dufresne, le navire ravitailleur des TAAF :Ecoutez un magazine radio réalisé en 2009 sur l'île :