Présidentielle : les principaux enjeux en Outre-mer et les propositions des candidats

Bulletin de vote glissé dans une urne lors d'élection en Guadeloupe
Ils sont 12 candidats en lice pour accéder à la présidence, 12 candidats à avoir un programme pour gouverner la France. Dans ces programmes, des mesures et des promesses pour les territoires ultramarins qui possèdent des enjeux propres ou avec des conséquences amplifiées par rapport à l’Hexagone.

Avec près de deux millions d’électeurs, l’Outre-mer possède un poids politique important en représentant 4% du corps électoral. Ainsi, la majorité des candidats ont dans leur programme un volet consacré aux territoires ultramarins. Des propositions pour répondre aux enjeux locaux que les candidats ont en partie présentés dans notre émission Outre-mer 2022. Pour l’Outre-mer, trois grandes thématiques ressortent : La vie chère, l’insécurité et l’environnement.

La vie chère

C’est la première préoccupation des ultramarins. Produits alimentaires, eau, tabac,… tout est plus cher en moyenne en Outre-mer, allant selon les chiffres de l’Insee à plus 6,9% à Mayotte et à plus 38,5% en Polynésie française en moyenne par rapport à l’Hexagone. Plusieurs raisons expliquent cet écart de prix, l’éloignement, les taxes dont le fameux octroi de mer, le coût de la matière première,… Surtout, cette vie plus chère est amplifiée par un taux de pauvreté bien supérieur à l’Hexagone. De 14% dans ce dernier, ce taux monte à 77% à Mayotte et se situe à 33% en Martinique. Autre facteur aggravant, le taux de chômage qui est de 30% à Mayotte, de presque 20% en Guyane et de 10,9% en Nouvelle-Calédonie.

Une situation qui inquiète les ultramarins et le contexte actuel avec une forte inflation n’arrange pas les choses. Pour remédier à ces problèmes, les candidats ont fait des propositions :

  • Pour Yannick Jadot, la question du montant du revenu se pose, mais pour lui, il y a un gros problème de dépendance vis-à-vis de l’Hexagone qui fait monter les prix en Outre-mer. Le candidat d’Europe Ecologie Les Verts souhaite aller vers plus d’autonomie alimentaire et énergétique pour faire baisser les prix. Mais, pour faire face à la conjoncture actuelle, Yannick Jadot veut un chèque énergie de 400 millions d’euros par an pour les six millions de famille qui en bénéficient en France.

 

  • Nathalie Arthaud veut une augmentation massive des salaires allant de 400 à 500 euros par mois. Surtout, elle veut que les salaires soient réindexés sur l’inflation. Enfin, elle propose un Smic net de 2 000 euros mais plus élevé de 30% en Outre-mer, ce qui représente 2 600 euros.

 

  • Outre l’augmentation du Smic, Jean-Luc Mélenchon veut bloquer la hausse des prix sur les produits de premières nécessités. De plus, pour éviter le trop d’importations qui fait augmenter les prix, le candidat de l’Union populaire veut aller vers "l’autonomie alimentaire des territoires".

 

  • Valérie Pécresse propose des mesures similaires au candidat de la France Insoumise pour lutter contre la vie chère. Ce sont 600 produits de première nécessité, et non plus 100 comme actuellement, qui feront partie d'un panier bloqué et leurs prix seront baissés de 30%. 

 

  • Marine Le Pen veut qu’il y ait des prix raisonnables en Outre-mer. De plus, elle veut supprimer l’octroi de mer sauf pour les "produits étrangers qui rentrent en compétition avec les productions locales". Plus largement, la candidate du Rassemblement National souhaite prendre 22 mesures pour rendre 150 à 200 euros par mois en moyenne à tous les Français, de l'Hexagone et d'Outre-mer.

  • Jean Lassalle n’a pas exprimé de propositions concrètes à ce sujet. Néanmoins, le député veut un prêt de 20 000 euros garanti par l’Etat dont chacun pourrait bénéficier.

 

  • Emmanuel Macron, en campagne par sa réélection, défend son bilan et souhaite aller plus loin : "On a baissé de 4 à 5 points le chômage dans les Antilles. On a diminué le chômage deux fois plus vite dans des territoires ultramarins que dans d’autres territoires. (…) Le sujet de la vie chère n’est pas un sujet que je découvre, on a essayé d’y répondre (…), il y a le fait que beaucoup de produits sont importés. Mais il y a eu des réponses, bons alimentaires et distributions de chèques, mais la problématique reste, donc premier point, il faut produire davantage dans nos Outre-mer. (…) Il faut mettre plus de concurrence. (…) Les dispositifs d’embauches pour les jeunes sont une bonne stratégie pour le pouvoir d’achat".

 

  • Pour Eric Zemmour, pour lutter contre la vie chère, il faut d’abord réformer l’octroi de mer en le réduisant, mais en compensant le montant pour les collectivités locales. De plus, le candidat de Reconquête ! veut une augmentation du salaire net sans augmenter le brut, il veut aussi baisser la CSG pour les salariés gagnants moins de 2 000 euros et veut une prime sans charge représentant jusqu’à 2-3 mois de salaires.

 

  • Anne Hidalgo souhaite "mettre des moyens financiers pour limiter les effets de l’inflation" et "bloquer les prix de l’énergie, (…) je fais en sorte que le prix du carburant soit bloqué et diminué par la baisse de la TVA à 5,5 %".  La candidate souhaite aussi une baisse de l’octroi de mer.

 

  • Pas de véritables programmes concernant les Outre-mer pour Philippe Poutou, mais pour lutter contre la vie chère, le candidat du NPA veut le partage des richesses.

 

  • Fabien Roussel, outre l’augmentation du Smic, souhaite une "baisse des factures énergétiques, baisser le coût des assurances,  des prêts bonifiés et des prêts à taux négatifs, notamment pour commencer".

 

  • Nicolas Dupont-Aignan veut réformer l’octroi de mer en le conservant quand il y a des productions locales et stimuler la concurrence pour faire baisser les prix.

Insécurité

Les territoires ultramarins sont bien moins confrontés aux vols sans violence que l’Hexagone avec 4,9% de vols pour 1 000 habitants contre 8,2%. En revanche, le nombre d’homicides est bien plus élevé avec 0,5% d’homicides pour 10 000 habitants contre 0,1% pour l’Hexagone.

Face à ces problématiques, les candidats à l’élection présidentielle font des propositions :

  • Sans détails particuliers, Yannick Jadot veut lutter contre l’orpaillage illégal.

 

  • Nathalie Arthaud qui axe presque tout son programme autour des travailleurs et de l’augmentation des salaires souhaite néanmoins accueillir tous les migrants qui souhaitent venir, en référence à la situation à Mayotte.

 

  • Jean-Luc Mélenchon est clair sur la situation migratoire à Mayotte et souhaite mettre en place ce qui a été préconisé par les politiques locaux : "La forme et le niveau d’immigration des Comores vers Mayotte est un phénomène intenable par Mayotte. [...]  On ne peut pas continuer comme ça, ce n'est pas qu’on ne veut pas, c'est qu’on ne peut plus. [...] Il y a un grand cahier général qui a été mis au point par tous les Mahorais de tous les points de vue politique. Il coûte 2 milliards et je m’engage à ce que ce programme soit planifié et appliqué”.

 

  • Valérie Pécresse veut une tolérance zéro sur l’insécurité. Elle veut construire des centres de rétention ainsi qu’un centre pénitentiaire à Mayotte. La candidate des Républicains souhaite aussi recruter dans la police et dans la justice.

 

  • Marine Le Pen sera intransigeante en ce qui concerne l’immigration : "Mayotte n’accueillera plus personne. Je mettrai des moyens maritimes, des moyens aériens, des moyens militaires avec une base à Mayotte."

 

  • Jean Lassalle n’a pas exprimé de propositions concrètes à ce sujet concernant les Outre-mer. Au niveau national, le candidat souhaite recruter 6 000 gendarmes et policiers et construire des prisons sans préciser le nombre.

 

  • Emmanuel Macron ne s’est pas prononcé sur l’insécurité dans les Outre-mer. Toutefois, concernant la situation migratoire à Mayotte, le président-candidat s’est dit ouvert à la question du droit du sol.

 

  • Eric Zemmour, tout comme la candidate du Rassemblement National, ne veut plus d’immigration à Mayotte, et il y supprimera le droit du sol. Il veut aussi rétablir un "vrai contrôle des frontières" à Mayotte et en Guyane.

 

  • La candidate du Parti Socialiste, Anne Hidalgo, comprend les raisons sociales à l’origine de la violence, mais pour répondre à l’insécurité, elle veut augmenter la présence policière.

 

  • Philippe Poutou n’a exprimé qu’un seul sentiment à ce sujet, il regrette la "maltraitance des migrants" à Mayotte.

 

  • Fabien Roussel, le candidat du Parti Communiste veut qu’il y ait le même nombre de magistrats pour 1 000 habitants dans les territoires ultramarins que dans l’Hexagone.

 

  • Nicolas Dupont-Aignan, tout comme Marine Le Pen et Eric Zemmour est pour "la suppression du droit du sol à Mayotte" pour maitriser l’immigration. 

Environnement

Les Outre-mer, c’est 80% de la biodiversité française. L’environnement est un sujet majeur dans les territoires ultramarins. Au-delà des problèmes de pollution et de surexploitation des ressources naturelles, les Outre-mer sont confrontés par la montée des eaux, à la disparition des coraux et à l’augmentation des phénomènes climatiques extrêmes. Tout comme pour l’insécurité, certains territoires sont confrontés à des problèmes particuliers, c’est notamment le cas pour les Antilles avec le chlordécone.

Le chlordécone est un sujet qui clive la classe politique et les candidats à l’élection présidentielle, mais ils sont plusieurs à vouloir l’indemnisation des victimes et la dépollution des terres :

  • Candidat d’Europe Ecologie Les Verts, Yannick Jadot veut aller très loin en ce qui concerne le scandale du chlordécone. En effet, ce dernier veut indemniser toute la population et pas seulement les travailleurs qui ont été directement exposés à ce pesticide. Il faut dire que 90% de la population des Antilles est contaminé par le chlordécone. Pour dépolluer les sols, Yannick Jadot veut massivement investir dans la recherche pour aller vite.

 

  • Nathalie Arthaud n’a fait aucune proposition à ce sujet.

 

  • Jean-Luc Mélenchon propose de réaliser un diagnostic général ainsi qu’un accès aux soins gratuits pour les personnes touchées dans un premier temps. Le candidat regrette qu’il n’y ait pas eu d’études sur le risque de mortalité d’une personne contaminée par le chlordécone qui attrape le covid.

 

  • Pour la candidate des Républicains Valérie Pécresse, il faut un alignement des conditions d’indemnisation des victimes du chlordécone sur le modèle des victimes de l’amiante.

 

  • Marine Le Pen n’a pas abordé directement le problème du chlordécone lors de cette campagne. Néanmoins, c’est un sujet que la candidate du Rassemblement National a déjà abordé, faisant plusieurs propositions, à commencer par un audit complet de la situation écologique et médicale liée à cette pollution, une aide à la reconversion des parcelles contaminées, le financement de la recherche pour dépolluer les sols et la mise en place d’un fond d’indemnisation des victimes.

 

  • Jean Lassalle n’a fait aucune proposition à ce sujet.

 

  • Emmanuel Macron a défendu son bilan et souhaite aller plus loin : "On a mis en place les premiers financements, identifier les responsabilités, (…) il faut regarder le sujet jusqu’au bout et indemniser jusqu’au bout les personnes". Le président-candidat souhaite sonder la qualité des terres et veut accompagner les victimes.

 

  • Eric Zemmour n’a fait aucune proposition à ce sujet.

 

  • Anne Hidalgo veut mettre en place un plan de dépollution des sols dans les Antilles et veut une prise en charge intégrale par la sécurité sociale de tous les frais médicaux liés à l’empoisonnement au chlordécone.

 

  • Philippe Poutou n’a fait aucune proposition à ce sujet.

 

  • Fabien Roussel est allé aux Antilles, notamment pour discuter avec les agriculteurs du chlordécone. Toutefois, le candidat communiste n’a pas fait de propositions à ce sujet.

 

  • Nicolas Dupont-Aignan n’a fait aucune proposition à ce sujet.

 

La vie chère, l’insécurité et l’environnement, trois enjeux essentiels pour les outre-mer, trois grands enjeux qui font partie des principales préoccupations des électeurs ultra-marins.