Raviver la flamme pour se souvenir des soldats d’Outre-mer

La Fédération Nationale des Anciens d’Outre-mer et Anciens Combattants des Troupes de marine (FNAOM-ACTDM) a rendu hommage mercredi 20 octobre à tous ces soldats ultramarins qui se sont battus et sont morts pour la France.

*Jusqu’à la fin des colonies, le terme Outre-mer désignait tous les territoires en dehors de l’Hexagone, donc les Outre-mer actuels, mais aussi les colonies en Afrique et en Asie. C’est dans ce sens-là qu’il est employé dans cet article, car c’est un hommage qui concerne aussi bien les soldats des Outre-mer d’aujourd’hui que les tirailleurs sénégalais ou algériens, et tous les autres qui ont servis sous les drapeaux.

"Le Soldat inconnu qui se trouve ici sous l’arche immense, est peut-être un soldat d’Outre-mer." Mercredi 20 octobre, le Général Philippe Bonnet, président de la Fédération Nationale des Anciens d’Outre-mer et Anciens Combattants des Troupes de marine (FNAOM-ACTDM) a rendu hommage aux soldats ultramarins morts pour la France à l'occasion de la Journée du soldat d’Outre-mer. "La Journée du soldat d’Outre-mer, pour nous, anciens combattants des troupes de marine, c’est l’occasion de rendre hommage à tous ces soldats venus d’Afrique, des Antilles, du Pacifique, de Madagascar..., pour participer aux conflits auxquels l’Armée française participe depuis 150 ans. Se rappeler leur sacrifice", détaille le Général.

 Le ravivage de la flamme sous l’Arc de Triomphe existe depuis 1923 et la cérémonie a lieu tous les soirs à 18h30. Mais en cette journée, elle avait un côté particulier. La cérémonie a été écourtée cette année, il n’y a pas eu de dépôt de gerbe itinérant au jardin d’agrément à Vincennes. Elle a été fixée en ce mois d’octobre en lieu et place du mois de juin pour raisons sanitaires. "Nous faisions ça d’habitude au mois de juin, parce qu’en juin 1940 ont eu lieu des massacres. Des nazis ont tout simplement exécuté des tirailleurs pour la couleur de leur peau. C’est donc à ce moment-là que notre cérémonie prend le plus de sens à nos yeux", explique le président du FNAOM-ACTDM.

Se souvenir des morts des Outre-mer

Depuis 1914, plus de 100 000 soldats ultramarins sont morts pour la France. Le Général Philippe Bonnet précise que "87 000 (ont péri) pendant la Première Guerre mondiale, et pendant la Deuxième Guerre mondiale, environ 25 000". Jean-Pierre Saint-Eloi, originaire de Guadeloupe, militaire et commissaire de la flamme (chargé de s'en occuper) vit ce moment comme étant une journée "particulière par rapport à nos anciens que nous avons perdu pendant ces deux guerres, et ceux que nous avons perdu en opération extérieure. C’est pour qu’on se souvienne d’eux, pour ne pas les oublier. Ça sert à ça la tombe du Soldat inconnu, à se recueillir".

Une journée de mémoire qui est pour José Althey, conseiller municipal délégué de Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis) et originaire de Trois-Rivières en Guadeloupe, "très important d’entretenir, (pour) la mémoire de nos compatriotes qui sont venus ici. Mais aujourd’hui, dans un contexte politique ou un certain nombre d’extrêmes considèrent qu’il faut changer les prénoms, et que pour être français, il faudrait être gaulois. Mais nous sommes français, parce que nous avons défendu la patrie. (…) Nous avons le devoir de maintenir cette mémoire et de dire qu’eux aussi, c’était la France et la France, c’est nous, parce que nous sommes les petits-enfants de ces gens-là".

C’est donc un hommage émouvant qui s’est déroulé en cette journée du soldat d’Outre-mer, comprenant le dépôt de gerbe sur la tombe du Soldat inconnu, le ravivage de la flamme, la "Marche funèbre" et La Marseillaise entonnée en cœur par tous les participants. Un discours a notamment été prononcé pour mettre en exergue deux héros ultramarins, morts exécutés en 1940 par les nazis, parce que noirs.

Moïse Bebel, officier guadeloupéen mis à l’honneur

Ces deux ultramarins sont le capitaine Charles N’Tchoréré et le capitaine Moïse Bebel. Le premier, originaire du Gabon, est fait prisonnier après avoir résisté longuement à la tête de son unité. Or, les Allemands séparèrent les soldats blancs et les soldats noirs. Ces derniers, dont fait partie le capitaine N’Tchoréré sont sommairement exécutés. Le même jour, son fils mourrait au champ d’honneur dans les rangs du 2e régiment d’infanterie coloniale.

Quant au capitaine Moïse Bebel : "C’est un Guadeloupéen qui est originaire des Trois-Rivières, qui est un officier d’active, et qui en 1940 est engagé avec ses tirailleurs (sénégalais). C’est un homme d’une grande vaillance et il a été fait prisonnier comme un certain nombre de tirailleurs à ce moment-là. Il a été exécuté. Quelques années plus tard, sa dépouille est revenue en Guadeloupe accompagnée d’autres frères d’armes. Il a été accueilli par des milliers de personnes, qui ont par-là, voulu signifier leur attachement à la grande personne qu’il était. À cet égard, nous allons soutenir une démarche qui consistera à élever une statue à sa mémoire à Erquinvillers (Oise), sur les lieux même où il a été exécuté", détaille le Général Philippe Bonnet. Un projet aussi porté par José Althey qui "travaille pour leur reconnaissance" et pour qui "il était nécessaire d’être là pour honorer leur mémoire".