C’est en 1976 que l’aventure débute. A l’origine de cette course transatlantique en solitaire et sans escale, citons une rencontre et une volonté. La volonté est celle du syndicat des rhumiers de Guadeloupe. Ce dernier réfléchit à organiser un évènement qui mettrait en avant ses îles et son savoir-faire. Autre protagoniste, le publicitaire Michel Etevenon a pour ambition de mettre en lumière une compétition de sport nautique, qui serait largement relayée par les médias grand public.
De cette rencontre va naître en 1978 « la transat de la Liberté » qui sera rapidement rebaptisée la Route du Rhum. Organisée tous les 4 ans, monocoques et multicoques y sont admis sans restriction de taille, contrairement à la course reine de l'époque, la Transat Anglaise, entre Plymouth et Newport. La voile devient ainsi ouverte à tous les passionnés du grand large sans contrainte, ni limite de taille.
Professionnels et amateurs s’y engagent sur une même ligne au départ de Saint-Malo.. De l’autre côté de l’Atlantique, les Guadeloupéens guettent l'arrivée de ces héros des mers, pour cette première édition.
Depuis Saint-Malo, les abandons se multiplient
Le 5 novembre 1978, ce sont quelques 38 bateaux qui sont présents sur la ligne de départ et mettent le cap sur la Guadeloupe. Les grands noms de la course au large du moment sont au rendez-vous: Mike Birch, Alain Colas, Florence Arthaud, Michel Malinovsky, Olivier de Kersauson, ou encore Philippe Poupon.
Cette première transat « version française » est un véritable succès devant les remparts de Saint-Malo. C’est Eric Tabarly, navigateur émérite, qui donne le coup d’envoi de la course. Dès le départ, la course prend des allures de parade maritime, des milliers de bateaux amateurs accompagnent l'évènement. Conséquences fâcheuses pour Marc Pajot, dont le bateau est victime d’une collision avec un voilier amateur. Eugène Riguidel connait lui aussi un malheureux début de course, victime d’une collision avec le ferry Armorique (le bateau du comité de course).
Cette première semaine est une course à élimination directe. Plusieurs concurrents doivent ainsi renoncer suite à des avaries multiples (tempêtes, avaries matériels…..). Marc Pajot n’est pas épargné par les avaries. Son bateau, déjà endommagé au départ de Saint-Malo, est contraint de demander assistance. En effet, la coque de son catamaran prenant l’eau, il est contraint à l’abandon.
Regardez ce reportage de Stéphane Manier, diffusé dans l'émission Sports Première sur TF1 le 12 novembre 1978 :
Un point à la mi-course
Les concurrents sont en mer depuis 15 jours. A une semaine de l’arrivée, la lutte faire rage en tête de la course, il est bien difficile pour les organisateurs comme pour les téléspectateurs de faire un pronostic. Sur le plateau de l’émission Stade 2, les journalistes sportifs débriefent avec le skipper Jean-Yves Terlain : point d’avancement des bateaux à mi-parcours et explications sur les choix stratégiques des skippers.
Regardez ce reportage de Gilles Cozanet, diffusé dans l'émission Stade 2 sur Antenne 2, le 19 novembre 1978 :
98 secondes d’écart
Alors que tous les regards sont portés sur les deux favoris de la course, Michel Malinovsky et Alain Colas, Mike Birch va également tenter de jouer sa place parmi les grands.
Après 23 jours de course, la victoire semble promise à Michel Malinovsky avec son grand monocoque de 21 mètres. Mais un incroyable coup de théâtre va se jouer à quelques encablures de la ligne d’arrivée. Mike Birch va profiter des soucis techniques de son adversaire (pilote automatique en panne) pour arracher la victoire avec 98 secondes d’avance. Il entre ainsi dans la légende en remportant la première Route du Rhum, démontrant ainsi qu’un trimaran de 11 mètres (le plus petit de la course) peut rivaliser avec les grands monocoques.
Aujourd’hui encore, cet écart reste le plus faible entre un vainqueur et son dauphin.
Regardez ce reportage de Pierre Salviac, diffusé dans l'émission Stade 2 sur Antennes 2, le 29 novembre 1978 :
La disparation d’Alain Colas
Une liaison radio et puis plus rien….. Alain Colas, à bord de son trimaran Manureva, disparait en mer alors qu’il est en tête de la course. C’est au large des Açores et au cœur d’une tempête qu’il prononce ses derniers mots, le 16 novembre 1978, après 11 jours de mer.
Je suis dans l’œil du cyclone. Il n’y a plus de ciel, tout est amalgame d’éléments, il y a des montagnes d’eau autour de moi
Alain Colas à bord de Manureva avant sa disparition
Alain Colas n’a jamais été retrouvé. Ni même son bateau Manureva dont le nom signifiait « Oiseau des Iles » en tahitien.
Après sa disparition, Serge Gainsbourg écrit en 1979, les paroles de la célèbre chanson « Manureva », interprétée par Alain Chamfort. Un hommage qui fait désormais partie des standards de la chanson française.