N'allez surtout pas demander à Willy Bissainte s'il est prêt. "En voile, tout le monde le sait, on n'est jamais prêt", sermonne le skipper. Et le Guadeloupéen parle en connaissance de cause. Dimanche 6 novembre, il prendra son quatrième départ sur une Route du Rhum, toujours embarqué sur ce monocoque qu'il entretient soigneusement.
Rencontre avec Willy Bissainte à Saint-Malo :
Une belle histoire d'amour, en somme. "Là, je suis d'accord avec ce mot", concède-t-il. Une relation que le navigateur cultive avec persévérance et fidélité. "Les professionnels peuvent se permettre de changer de bateau tous les ans, mais nous, les amateurs, il faut essayer de ne pas le faire", explique Willy Bissainte. "On achète un bateau et il faut progresser avec, l'améliorer au fur et à mesure." Une affaire de "coordination" et de "compréhension".
Ce sera mon dernier bateau et si jamais ça se passe bien, que j'ai envie de continuer, ce serait sur celui-là, en l'améliorant. Je commence à connaître certains éléments mais je ne connais toujours pas tout et je ne connaitrai jamais tout.
Il y a quatre ans, pour sa troisième Route du Rhum, Willy Bissainte avait été contraint d'abandonner tôt dans la course. Six heures après le départ, son bateau s'est échoué sur le plateau de l'archipel des Sept-Îles, situé au nord de la Bretagne. Une grosse déception aujourd'hui transformée en moteur pour préparer encore mieux sa course, ne pas reproduire les mêmes erreurs et améliorer son bateau.
Tradisyon Gwadloup a retrouvé sa quille d'origine pour "plus de puissance" et s'est vu doté d'un hydrogénérateur supplémentaire, d'un système de pilote automatique "dernière génération" et plein d'autres détails que le skipper a imaginés grâce à ces quatre années d'expérience supplémentaires et "un énorme travail en amont". Pourtant, à quelques jours du départ, Willy Bissainte ne parle pas d'objectif mais de "persévérance".
La "plus belle course"
Sur la Route du Rhum, la "plus belle course au large en solitaire" selon lui, il n'est "pas là pour faire un coup", ni pour "donner envie". Du moins, pas seulement. "La Route du Rhum, c'est une épreuve, DES épreuves", rappelle le skipper en connaissance de cause, "et j'encourage à en faire plusieurs, à ne pas s'arrêter à la première, parce que c'est en faisant d'autres Route du Rhum qu'on va faire des erreurs, progresser et avancer."
Des milliers de gens viennent nous voir tous les jours, il y a une quantité de bateaux avec une panoplie de catégories différentes, ça met en lumière la Guadeloupe. Pour moi, c'est la plus belle course au large en solitaire. Et nous Guadeloupéens, on a la chance d'accueillir l'arrivée dans notre petite Guadeloupe.
Un véritable carburant pour le skipper qui se sait suivi sur son archipel et qui voudrait que l'on n'oublie pas le "rhum" dans le nom de la course. "Avec les îles de Guadeloupe et de Martinique, on a, semble-t-il, les meilleurs rhums du monde mais je trouve que ce n'est pas tellement mis en avant", regrette Willy Bissainte. "Au-delà de la bouteille, le rhum c'est les champs de canne à sucre, la coupe, les distilleries et puis des mois de travail pour donner du sucre, du jus, du rhum blanc, du rhum vieux…" Encore une affaire de paramètres multiples, de patience et de persévérance. Le cocktail parfait pour une Route du Rhum façon Willy Bissainte.