Ruddy Nelhomme a atteint un âge où l'on ne s'intéresse plus vraiment à sa formation d'origine. Erreur. Pour mieux connaître le Guadeloupéen, il faut remonter dans le temps. Début des années 90. Époque Ruddy étudiant : "J'aimais l'économie. C'était mon truc. J'ai obtenu un BTS technico-commercial à Châtellerault avant d'enchaîner sur une licence de science éco à Poitiers."
Ruddy Nelhomme n'est pas devenu banquier pour autant. Juste plus conscient de toute la dimension économique du sport. "En devenant coach de basket professionnel, je savais qu'un club, ce n'était pas uniquement des joueurs sur un terrain. C'est avant tout une entreprise qui doit boucler un budget avec un ensemble de femmes et d'hommes, des partenaires… C'est vraiment une équipe au sens large."
Du Ban-é-Lot aux Bleus via Cholet
En 1988, le jeune Nelhomme quitte le Ban-é-Lot pour rejoindre l'Hexagone : "Sans une ambition démesurée, je tiens à le préciser. Sauf que tout va s'enchaîner petit à petit." Joueur à Parthenay, puis à Poitiers : "À cette époque, j'ai commencé à entraîner des jeunes."
Le Guadeloupéen décide ensuite de se tourner vers le coaching à 100%. Les rencontres font le reste. Les espoirs de Cholet, puis l'équipe première avant un long bail à Poitiers. "J'ai connu plein de structures différentes : des clubs amateurs, semi-amateurs, professionnels et enfin l'international", raconte-t-il.
Ruddy peut être fier de son parcours. Hors de question cependant de ne pas saluer tous ceux qui l'ont aidé à grandir : "Tout d'abord, il y a eu Gérard Gustarimac, mon entraîneur chez les minimes du Ban-é-Lot. J'ai beaucoup échangé avec ce vrai passionné de formation. Ensuite, ma rencontre avec Pierre Vincent a été déterminante. Il m'a coaché quatre ans au CEP avec une vision très tactique du basket. Passionnant. Je ne peux pas oublier Alain Baudier, mon président à Poitiers qui a établi une relation de confiance avec moi. Et puis bien sûr, Vincent Collet que j'ai côtoyé dès ma première saison avec les pros de Cholet. Il entraînait Le Mans à l'époque. Des discussions fantastiques. Toutes ces rencontres m'ont permis de franchir des étapes. Non seulement en tant que coach, mais également en tant qu'homme."
Pouvoir travailler sur la durée
Ruddy Nelhomme aime le temps long. Déjà 13 ans en équipe de France. Série en cours. En club, il a officié 12 ans à Poitiers. De 2007 à 2019 : "Travailler sur le temps long, c'est très précieux. À Poitiers, j'ai vu grandir des joueurs : Evan Fournier, Moustapha Fall, Rasheed Wright… Et puis, j'ai vu évoluer un club. Monter. Souffrir aussi."
Sauf que le basket tricolore a encore du mal avec cette notion de temps long. Et là, le diplômé en économie reprend le dessus. "En bourse, ce n'est pas parce qu'une valeur descend qu'il faut tout brader. Pourquoi ne pas appliquer cette théorie dans le sport ?"
Une équipe de basket a rarement beaucoup de temps pour s'imposer. Quelques défaites d'affilée et tout peut vaciller. "C'est le drame du sport français", déplore-t-il. La vie (ou la survie) d'un entraîneur ne tient souvent qu'à un fil : "Alors que rien ne se joue en un, deux ou trois mois. C'est absurde. Il faut privilégier le travail sur la durée. Discuter avec les dirigeants, les joueurs. Faire confiance aux jeunes. Pour cela, seule une vision à moyen terme est payante."
Un adepte du basket global chez les Bleus
Ruddy Nelhomme a rejoint l'équipe de France en mai 2010. À la demande de Vincent Collet. "Je l'accompagne depuis 13 ans dans les bons et les mauvais moments." Son rôle exact ? Coach assistant multicartes : "Je dois être capable d'aider sur tout : l'attaque, la défense, le travail individuel, le soutien vidéo. Je ne suis pas un couteau suisse. C'est juste ma vision d'un basket global."
Trois JO au compteur. Et les quatrièmes sont déjà en vue. "À Paris, la pression va être énorme. Tout comme l'attente, souffle-t-il. Il faudra essayer de faire fi de tout ça. Pour aller chercher une médaille."
Depuis peu, le Guadeloupéen est également responsable des relations entre l'équipe nationale garçon et le Pôle France (qui réunit toutes les équipes tricolores jeunes), "afin d'uniformiser tout ce qui est fait. Adopter une même philosophie." En résumé, préparer les jeunes pousses à devenir les tauliers du futur. "J'adore voir les jeunes grandir. Ça me permet aussi de rester au contact."
Tout cela sans le moindre regret ou remords de ne plus être entraîneur principal. "Absolument pas. Si on est capable d'être coach dans son club, on doit pouvoir devenir second couteau en équipe de France. Car l'équipe de France, c'est le top !"