Engagé avec le Guadeloupéen sur la transat Belle-Île / Marie-Galante, Lomano Takasi ne passe pas inaperçu. À bord du bateau "Captain Alternance" de Kéni Piperol, son sourire communicatif en dit long sur le personnage. Premier skipper originaire de Futuna [dans l’archipel de Wallis-et-Futuna] à s’engager dans une course transatlantique, il est dans l’ombre de ses deux coéquipiers. Le Futunien observe et analyse son environnement. "J’ai de la chance de partir avec deux skippers qui se connaissent bien [Keni Piperol et Thomas Jourdain, NDRL], j’apprends d’eux et je vais essayer d’apporter un petit plus", confie-t-il.
Lomano Takasi est ce que l’on appelle dans le jargon un "Bizuth" — un novice dans la course au large. Sa première traversée de l'Atlantique, il va l’effectuer à l’âge de 33 ans. "Ça arrive un peu sur le tard, concède-t-il. Mais j’ai fait pas mal de choses dans ma vie et je me suis mis à faire du bateau qu'à l’âge de 23 ans. Donc il faut accumuler pas mal d’expérience avant de se lancer sur de tel bateau. " Ce touche-à-tout était bien loin de s’imaginer un avenir de skipper quand il a entamé ses études de STAPS option marketing-communication. "Je me voyais sportif professionnel, ça, c'est sûr, mais pas navigateur […] Avec mes études j’ai rencontré des personnes qui m’ont fait aimer la voile et j’ai pris beaucoup de plaisir à rentrer dans ce milieu."
"Je ne sais toujours pas si je suis un marin "
Lomano Takasi est arrivé dans le monde de la voile par hasard. Lancé dans des recherches désespérées pour trouver un stage pour ses études, le Futunien candidate à Douarnenez (dans le Finistère en Bretagne), aux côtés du skipper Gwen Chapalain. C’est le début de son histoire d’amour avec les bateaux.
Depuis que je suis gamin, je suis attiré par les grands espaces naturels et les sports extrêmes. Donc avec la voile, j’ai trouvé un terrain de jeu où je peux conjuguer tout ça
Lomano Takasi
Comme beaucoup de natifs du Pacifique, Lomano Takasi pratique le rugby : "J’y ai joué très longtemps, j’étais ailier, j’espérais jouer à très haut niveau, mais ça n’a pas marché pour moi et j’ai basculé dans la voile ". Avec ses petites lunettes rondes et ses cheveux brossés, le Futunien ne ressemble pas à ses collègues marins. Il casse les codes, et il est le premier à questionner sa légitimité. " Je ne sais toujours pas si je suis un marin, je vous dirai ça à mon retour", plaisante-t-il sur les pontons à Belle-Ile.
S'engager dans cette transat en direction de Marie-Galante, c'est un "un rêve de gosse". Très apprécié à bord de "Captain Alternance", Lomano Takasi apporte un vent de fraîcheur à un duo déjà bien aguerri (Keni Piperol et Thomas Joudrain). "[Lomano] a une vision autre que celle qu’on a avec Thomas [Jourdrain], ça fait déjà deux ans qu’on navigue ensemble, donc on a déjà fait un petit peu le tour de notre façon de fonctionner", explique le Guadeloupéen Kéni Piperol.
Son rêve est de participer à la Route du Rhum 2026
Après la transat Belle-Ile-en-mer / Marie-Galante, Lomano Takasi retournera à la préparation de son gros objectif de l’année : la solitaire du Figaro. "C’est l’une des courses les plus difficiles qui existe et pour apprendre, il n’y a rien de mieux que de se mettre en difficulté..." prévient le marin qui s'élancera sur cette course du 19 août au 15 septembre. Skipper en Figaro 3 —bateau de 10 mètres de long — il ne veut pas brûler les étapes.
Mais le "Bizuth" a des envies de large, de chaleur, de mer turquoise et surtout de rhum. Dans un coin de sa tête, Lomano Takasi s’imagine déjà un destin de grand navigateur et vise les plus grandes courses du monde, comme la transat Jacques Vabres 2025 et la Route du Rhum 2026 [course en solitaire qui se déroule tous les quatre ans entre Saint-Malo et la Guadeloupe]. "Pour le moment, je n’ai pas encore travaillé sur le sujet, j’ai une saison à démarrer en Figaro, mais quand le moment sera venu, on en parlera avec mes partenaires, informe le Futunien. Mais il va falloir acter ça rapidement, car les places sont chères pour participer à la Route du Rhum."
Pour se donner un avant-goût de rhum et humer un peu les contours de la Guadeloupe, Lomano Takasi aura un beau terrain de jeu entre les alizés et les vagues sur la route le menant à Marie-Galante. "Je rêve de voir cette île apparaître. […] Belle-Île, c'est la première étape, mais ce dont on rêve tous, c'est Marie-Galante."