Archives d’Outre-mer : Martinique - Sur les traces du domaine de l’Habitation sucrière de Crève-Cœur

Les Ruines de l'Habitation sucrière de Crève-Cœur, Martinique
A quelques jours de la journée commémorative du souvenir de l’esclavage et de son abolition (10 mai), le devoir de mémoire prend ici tout son sens. Les Archives d’Outre-mer vous proposent de découvrir les vestiges de l’Habitation Crève-cœur, à Saint-Anne en Martinique, où l’esclavage a laissé une empreinte intemporelle sur ce site chargé d’histoire.

Alors que touristes et habitants martiniquais animent les plages de Sainte-Anne, il est un aspect de la commune « ô combien important » qu’il faut considérer… Et qui reste méconnu. C’est celui d’un patrimoine disposant d’un nombre considérable de ruines et vestiges, dont fait partie l’Habitation sucrière de Crève-Cœur.

Sainte-Anne, au début de la colonisation

Sainte-Anne fait partie intégrante à cette époque de la paroisse du Marin. Vers 1730, elle devient une paroisse autonome puis une commune en 1837.

Forte de 1500 hectares de terres plantées de canne à sucre, Sainte-Anne représente plus de 40 % de l’arrondissement du Marin. Les nombreuses ruines et distilleries démontrent l’importance de l’activité sucrière à cette époque. Plus de 90% de la population est alors composée d’esclaves, travaillant sur une vingtaine d’habitations dont celle de Crève-Cœur.

L’Habitation Crève-Cœur, son histoire

L’habitation sucrière de Crève-Cœur, dominée par le piton du même nom, aurait été construite au début du 18ème siècle. Une époque qui marque l’essor des grands planteurs sucriers et du commerce triangulaire. Sainte-Anne compte alors 18 habitations sucrières sur sa commune.

Les différentes constructions de l’habitation sucrière datent de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, selon une disposition classique : maison du maître, moulin à bêtes, distillerie, purgerie, bâtiments d’exploitation, enclos des animaux…. Les esclaves sont quant à eux logés dans des cases rudimentaires. 

Les grandes dates qui ont marqué la propriété de Crève-Cœur :

  • 1817 L’habitation appartient à cette époque à la famille Blondel la Rougery
  • 1855, Elle est rachetée par M. Duperrier Desportes
  • 1884, marqué une profonde crise sucrière
  • 1886 Vente aux enchères de la propriété
  • fin XIX siècle Rachat par l’usine centrale du Marin 
  • 1911 Vente aux enchères, morcellement du domaine en 38 lots

Dans les années 70, les ruines sont redécouvertes par l’Office national des Forêts et les archéologues qui marquent un nouvel intérêt pour le lieu. Elles sont aujourd’hui inscrites au titre des Monuments historiques, par arrêté de 1992.

Regardez le reportage d’Hélène Camouilly diffusé le 07 mai 2000 dans l’Emission « En Communes » consacrée à l’histoire de l’Habitation Crève-Cœur :

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Fouilles archéologiques sur un village d’esclaves à Crève-Cœur

Quel était le quotidien des esclaves ? Une équipe d’archéologues franco-américains procède à des fouilles sur le site de l’ancienne rue Cases-Nègres qui mène de l’Habitation Crève-Cœur à Sainte-Anne. Une démarche inédite en Martinique… C’est la première fois que des fouilles sont organisées sur un village d’esclaves.

Reconstitution des cases d'esclaves - Martinique, ile des Antilles françaises

Gravure extraite du Journal illustré de 1864. Ancien moulin a vent pour la canne à sucre aux Antilles, Martinique au 19e siècle.

Regardez le reportage de Delphine BEZ, diffusé dans le journal de RFO Martinique, le 10 juillet 2005 :

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Plus récemment, dans le cadre de la commémoration du 150e anniversaire de l’insurrection du Sud (septembre 1870), Serge Letchimy a inauguré une fresque illustrant un groupe d’insurgés, exprimant leur colère, leur détermination, et leur soif de justice. Le site  historique de l’Habitation Crève-Cœur reste -et restera- pour les martiniquais un véritable patrimoine culturel et historique.