Une vingtaine de personnes originaires de l’île de La Réunion étaient présentes à la marche des fiertés antiraciste et anticapitaliste qui s’est tenue dimanche 20 juin à Paris. Un événement sans précédent co-organisé par l’association réunionnaise LGBTQI+, Requeer.
“C’est extraordinaire qu’on soit là”, “c’est magique”, ou encore “c’est une journée historique”. Toutes et tous s’accordent pour dire que ce dimanche est une journée à marquer d’une pierre blanche. "Jamais je n'aurais cru pouvoir marcher à Paris avec des Réunionnais comme moi pour défendre nos droits”, lâche Estelle. Et pourtant, ils sont bien là. Armés de slogans en créole réunionnais, de panneaux de toutes les couleurs, s'apprêtant à participer à la marche des fiertés antiraciste et anticapitaliste à Paris.
"C’est ma première pride"
Parmi la centaine de personnes rassemblées sur le parvis de l’Opéra Garnier à Paris dès 13h00, impossible de rater le cortège tout droit venu de La Réunion. Composé d’une bonne vingtaine de personnes, ce dernier s’apprête à défiler pour les droits des personnes LGBTQI+. Certains font partie de l’association Requeer, fondée sur l’île de l’océan Indien par Brandon Gercara.
Ces natifs de La Réunion, pour la plupart installés dans l’Hexagone afin de suivre des études supérieures, sont bien décidés à faire entendre leurs voix. Le faire dans la rue, au cours d’une marche des fiertés, est une première pour certains participants. “J’ai appris ce matin que la marche avait lieu à Paris et qu’il y aurait des Réunionnais comme moi”, explique Sylvain, 21 ans. Dès qu’il a eu vent de l’événement, le jeune homme originaire de Saint-Denis de La Réunion n’a pas hésité une seule seconde pour rejoindre ses camarades de lutte dans la rue. Le tout sans se poser la moindre question, “alors que c’est ma première pride”, ajoute-t-il.
Pour sa première participation, Sylvain a délibéremment choisi la marche des fiertés antiraciste et anticapitaliste, "pour être avec des gens qui me ressemblent". Organisée en contre-pied de la pride de Paris prévue le 26 juin prochain, cette marche est née après que plusieurs activistes ont constaté un manque de représentativité et de diversité au sein des instances qui organisent l'événement. "Je suis une femme racisée et ultramarine, je vis au quotidien des discriminations autres que celles liées à mon orientation sexuelle", explique Salila. "On est à l'intersection entre plusieurs luttes" ajoute-t-elle pour justifier sa présence à cette "contre-pride".
Quelques semaines seulement après la première pride à La Réunion
Pour les plus habitués, comme Estelle, venir à cette marche est aussi l’occasion de se retrouver. “La toute première marche des fiertés s’est tenue chez nous, à La Réunion, il y a à peine quelques semaines. Cet événement nous a donné beaucoup de visibilité sur l’île.”
Une marche à l'initiative de l’association Requeer, qui a eu un écho bien au-delà de cette île française de l’océan Indien. Salila raconte : “Je n’étais pas à La Réunion, mais j’ai tout suivi, j’ai regardé toutes les vidéos. J’aurais tellement voulu y participer. J’aurais adoré avoir quelque chose de similaire lorsque j’étais encore au collège”. “J’en ai pleuré tellement j’étais émue”, explique de son côté Jaz’ (*), 24 ans, originaire de La Plaine des Palmistes, et établie dans l’Hexagone depuis 2008.
“Je ne pensais pas qu’un tel événement serait possible sur mon île et c’est un mouvement dont on a vraiment besoin mais dont on ne parle pas assez.”
"Quelque chose est en train de bouger"
Bien qu’il vive à La Réunion, Brandon Gercara, président et fondateur de Requeer, était présent à Paris ce dimanche pour défiler. “On s’attendait à ce qu’il y ait du monde puisqu’on s’organise depuis plusieurs semaines. Mais on est vraiment nombreux, on a même croisé des Réunionnais dans les autres cortèges. La diaspora est vraiment mobilisée”, affirme-t-il, tout sourire.
Durant la marche, également organisée en soutien aux personnes migrantes et sans papiers, des hommages ont été rendus aux victimes d’actes homophobes et transphobes. Des actes anti LGBT qui seraient cependant en baisse, comme l’indique le ministère de l’Intérieur dans un communiqué du 12 mai 2021. “Quelque chose est vraiment en train de bouger, je le sens”, glisse Brandon Gercara, qui espère que cette première participation d’un cortège réunionnais en appellera d’autres.
(*) le prénom a été modifié.