"25% de la population de Martinique et 14% en Guadeloupe" seraient concernés par une surexposition à ce pesticide utilisé jusqu'en 1993 dans les bananeraies, a précisé Edwige Duclay en s'appuyant sur les chiffres de Santé Publique France.
Selon un rapport publié le 6 décembre par l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), près de 90% des populations de Martinique et de Guadeloupe sont contaminées au chlordécone. Toutefois, "les scientifiques ont confirmé que ce n'est pas parce qu'on a du chlordécone dans le sang qu'on va forcément être malade", a-t-elle poursuivi, indiquant que le seuil de surexposition est fixé "à 0,4 microgramme par litre de sang".
Un budget de 92 millions d'euros
"Quand on a de la chlordécone dans le sang, on peut s'en débarrasser au bout de six mois, on peut diviser par deux la teneur dans le sang en réduisant son exposition, c'est à dire manger des produits non contaminés la chlordécone. C'est pour cela qu'il y a un dispositif d'analyse gratuit qui est déployé et dont tout le monde peut bénéficier dans les territoires de Martinique et de Guadeloupe".
"Mon travail est de mettre en place ce plan chlordécone qui est doté d'un budget inédit de 92 millions d'euros", a souligné Edwige Duclay. "C'est de faire en sorte que l'on puisse protéger la santé des populations. Ma mission est que ce plan devienne réalité, et puisse avoir un effet sur le quotidien des populations antillaises, par exemple en faisant des analyses de sol qui sont gratuites".
"Toutes les cultures ne sont pas contaminées à la chlordécone. Les légumes racines le sont potentiellement, mais les arbres fruitiers ne sont pas sensibles à la chlordécone. Donc on peut cultiver même sur des sols contaminés des produits non contaminés", a-t-elle également affirmé.
Le fonds d'indemnisation pérennisé
Mme Duclay a rappelé les moyens mis à la disposition des populations afin de réduire leur exposition, comme les dépistages sanguins depuis fin 2020 ou le dépistage des sols. "Si les populations appliquent les recommandations mises en place depuis des décennies, ils verront une diminution importante de leur exposition au chlordécone", a-t-elle ajouté.
Le fonds d'indemnisation mis en place fin 2020 et à destination des victimes de pesticides dans le cadre du travail sera également pérennisé. Cependant, selon Edwige Duclay, seules "55 demandes d'indemnisation ont été déposées" en Martinique et en Guadeloupe.
"Mais il y a tout un travail d'accompagnement qui est en place, particulièrement en Martinique où une association va chez les personnes et les aide à monter des dossiers pour qu'ils puissent être instruits. Il y a encore un effort à faire pour mieux partager ce dispositif. Il y a eu des actions de communication et on peut encore mieux faire".
Fin 2021, le cancer de la prostate, dont le record mondial est détenu par les Antilles, a été reconnu comme une maladie professionnelle pour les exploitants, agriculteurs et enfants exposés au chlordécone en période prénatale par le biais d'un de ses deux parents, ouvrant ainsi la voie à des compensations financières.