La diversité au sein de l'art est une problématique délicate : les personnes noires sont rarement représentées dans la peinture classique. Cependant, des initiatives de sensibilisation à cette problématique existent, et dénotent d'une certaine prise de conscience du manque de représentation. En 2019, le Musée d'Orsay organisait l'exposition Le modèle noir, retraçant l'iconographie autour des corps noirs au fil des siècles. L'exposition avait aussi été accueillie au Mémorial ACTe en Guadeloupe.
Parmi les artistes exposés, Elizabeth Colomba, peintre d'origine martiniquaise, qui présentait Laure (portrait d'une négresse), un tableau peint spécialement pour l'exposition. L'œuvre figure Laure, le modèle de la femme de chambre du tableau Olympia de Manet. Une grande part du travail de l'artiste consiste à représenter des modèles noirs.
Se réapproprier l'Histoire
Elizabeth Colomba est née en Hexagone de parents martiniquais : la dualité de ses origines et de l'environnement où elle a grandi a servi à inspirer sa démarche artistique. Ses tableaux explorent la thématique de la représentation des corps noirs féminins dans les formes classiques et néoclassiques de la peinture européenne traditionnelle.
Elizabeth Colomba décrit son approche comme un effort de "réintégration des corps noirs et de réappropriation de l'espace utilisé pour raconter l'histoire de l'art". Une réintégration qui suppose un manque initial d'inclusion : la peinture classique et néoclassique représente traditionnellement des personnes blanches.
Queenie, "une histoire universelle"
Peintre à l'origine, c'est avec un roman graphique qu'Elizabeth Colomba retrace la vie de Stéphanie St Clair, surnommée "Queenie", une gangster martiniquaise du Harlem des années 1930 qui a réellement existé. Queenie, la marraine de Harlem est une bande-dessinée co-scénarisée par Elizabeth Colomba et Aurélie Levy.
Queenie nous plonge dans la Renaissance de Harlem, une période de renouveau intellectuel et artistique de la communauté noire. Queenie, une femme noire mafieuse, est érigée en héroïne qui veille sur sa communauté et dénonce la corruption à Harlem, notamment de la police.
La force du personnage est qu'elle "peut avoir des échos dans chaque personne". Elizabeth Colomba évoque par ailleurs un "écho irrésistible" par rapport à sa propre vie : Queenie et Elizabeth Colomba sont deux femmes martiniquaises installées à Harlem. Selon l'artiste, "l'histoire de Queenie est assez universelle et peut inspirer tout le monde".
Queenie paraîtra le 27 août aux éditions Anne Carrière.
Écoutez l'entretien d'Elizabeth Colomba avec Kenza Cissé :
Queenie, la marraine de Harlem