Enjeux militaires, économiques, scientifiques... Les Outre-mer au cœur de la stratégie maritime de la France

Annick Girardin, ministre de la Mer, était auditionnée par la Délégation sénatoriale aux Outre-mer jeudi 21 octobre 2021.
Annick Girardin était auditionnée jeudi matin au Sénat sur le rôle des territoires ultramarins français dans la stratégie maritime nationale. La puissance maritime française est multidimensionnelle, a rappelé la ministre de la Mer.

L'exécutif aime à le rappeler : la France a le deuxième espace maritime mondial, forte de ses 10,2 millions de km² de zone économique exclusive (ZEE). Ce qui fait d'elle une puissance, que le gouvernement souhaite réaffirmer au travers de sa stratégie maritime nationale.

Annick Girardin, la ministre de la Mer - un ministère ressuscité en 2020 par Emmanuel Macron - était invitée par les sénateurs membres de la délégation aux Outre-mer jeudi matin afin d'expliquer la place qu'ont les territoires ultramarins dans la stratégie du pays.


Rester ferme sur la souveraineté

Présence militaire, relations diplomatiques, exploitation des ressources, exploration scientifique... C'est une politique à plusieurs facettes que mène le gouvernement dans les eaux françaises. Et les Outre-mer ont un rôle crucial à jouer.

C'est grâce aux Outre-mer que la France dispose du deuxième espace maritime mondial. C'est grâce aux Outre-mer que la France est présente dans les trois océans. C'est grâce aux Outre-mer que la France dispose d'une richesse exceptionnelle, et d'une immense responsabilité en matière de biodiversité.

Annick Girardin, ministre de la Mer


L'ancienne ministre des Outre-mer a détaillé la présence militaire française dans les différents bassins géographiques où elle possède des territoires. Dans la zone Indo-Pacifique, ce sont 7 000 hommes qui sont stationnés sur le territoire national ou des territoires alliés. Quatre frégates, trois bâtiments de soutien et d’assistance, six patrouilleurs et trente-deux aéronefs quadrillent également l'espace.

En Antilles-Guyane, la marine nationale protège la zone grâce à deux frégates, huit patrouilleurs, deux bâtiments d'appui et deux aéronefs. Annick Girardin a souligné que la sécurité maritime devait aussi passer par la lutte contre la pêche illégale et le trafic de drogue. "Dans ce bassin, la douane est dotée de trois vedettes et d'un aéronef. Pour la gendarmerie nationale, ce sont quatre hélicoptères qui sont présents."

La ministre a critiqué les approches plus combatives et unilatérales des autres puissances mondiales lorsqu'il s'agit de défendre leur souveraineté : "Il y a la méthode chinoise qui consiste à bétonner les atolls et menacer d'avoir recours à la force systématique (...) Il y a la méthode britannique, qui, elle, consiste plutôt à mépriser les États voisins et à prendre des décisions unilatérales."

La méthode que nous portons, que porte le président de la République (...), c'est celle d'une fermeté sur notre souveraineté mais d'un bon voisinage sur le partage des ressources et sur la responsabilité en matière de protection.

Annick Girardin


Le développement stratégique des grands ports maritimes

La stratégie française passe aussi par la puissance économique. Dans cette optique, Annick Girardin porte le projet de "faire de la France le premier port d'Europe", en s'appuyant notamment sur les grands ports des Outre-mer. Dans le cadre du plan de relance de 100 milliards d'euros, la ministre de la Mer a rappelé que les ports ultramarins ont reçu plus de 23 millions d'euros.

Le port de Mayotte a vocation à devenir un port d'État, c'est-à-dire un établissement public, a annoncé la ministre. Quant à celui de Saint-Pierre et Miquelon, sa nouvelle gouvernance sera installée d'ici l'année prochaine.

La pêche est aussi un enjeu primordial pour la prospérité de la France. Annick Girardin souhaite voir la pratique d'aquaculture se développer, et "plaide pour que l'Europe impose des quotas" dans ce domaine. 50 millions d'euros du plan de relance ont été dédié à la pêche. Les Outre-mer en ont reçu 6 millions, a-t-elle précisé.

France 2030 : explorer les grands fonds marins, "sans écarter l'exploitation"

La ministre de la Mer a également été interrogée sur le projet d'exploration des grands fonds marins porté par Emmanuel Macron, annoncé la semaine dernière dans le cadre du plan d'investissement France 2030. Le chef de l'État était resté succinct sur ce volet, assurant qu'il s'agissait bien "d'exploration" dans un but de connaissance scientifique de la mer, et non pas "d'exploitation".

Or, lors de son audition, Annick Girardin a assuré que l'exploitation des ressources découvertes n'était pas "écartée". Elle a par ailleurs précisé que les explorations pourraient avoir lieu dans la ZEE française, dans le plateau continental, mais aussi dans les eaux internationales, bien que ces dernières nécessiteraient un permis.

"Des travaux sont d'ores et déjà prévus dans le Pacifique", a avancé la ministre. Le plan France 2030 prévoit deux milliards d'euros, sur cinq ans, pour l'exploration des fonds sous-marins, une partie de cette enveloppe étant toutefois également consacrée aux ambitions spatiales de la France.